20mSv au TNS

Le nucléaire, une affaire sensible dont la discrétion  intrigue et mérite qu’on s’interroge,  ce que fait Bruno Meyssat dans cette pièce qu’il a mise en scène et dont le titre qui nous semble mystérieux correspond au seuil annuel d’exposition aux radiations auxquelles sont soumis les travailleurs dans les centrales nucléaires.

Nous vivons dans la proximité du nucléaire, en France 58 centrales sont en activité. Nous savons, en raison des grandes catastrophes de ces dernières années Tchernobyl et Fukushima les dangers que cela représente mais nous feignons de l’oublier. Malgré tout le problème revient régulièrement sur le devant de la scène : Fermeture de la centrale de Fessenheim souvent promise, contestée, repoussée. Coup d’éclat des militants de Greenpeace s’introduisant dans une centrale pour montrer combien la surveillance y  est peu fiable.

Alors, comme une invitation à prendre conscience de tout cela, de tout ce que nous cachent les responsables d’E D F, de ce que nous préférons laisser de côté ou en arrière-plan de nos préoccupations, le metteur en scène nous pousse à ouvrir les yeux sur ce monde quelque peu mystérieux en se servant du théâtre comme de ce lieu  qui nous permet  pendant un temps donné (ici 2heures) d’aborder ensemble une question des plus anxiogènes.

Pour ce faire, des textes de scientifiques sont projetés, des interviews menés en live par les comédiens qui endossent aussi bien les rôles  d’interviewers que  des personnes interrogées. Les acteurs manipulent nombre d’objets évocateurs de ces contrôles qu’il faut effectuer après qu’une catastrophe a eu lieu. Ils revêtent des scaphandres, mettent des masques, s’aspergent d’eau, entassent des sacs remplis de déchets. C’est tout un arsenal qui est convoqué sur le plateau pour  figurer ces obligatoires précautions et cela devient vite oppressant.

Peu à peu on pénètre dans ce monde de l’après catastrophe. On suit les gestes mesurés des protagonistes, simultanément on lit les informations, les déclarations projetées pour nous éclairer  et qui nous font prendre conscience du business que tout cela représente, mais aussi de l’évident manque de préparation effective au cas où il surviendrait un accident gravissime. Cela fait froid dans le dos et l’on se demande comment il est il est encore possible de poursuivre dans cette voie du nucléaire dont le coût final serait exorbitant et les dommages incommensurables.

Une pièce qui réveille l’attention par son côté paradoxalement réaliste et quasi fantastique.

Par Marie-Françoise Grislin