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#Lecturesconfinement : Retour à Lemberg de Philippe Sands par Veronika Wand-Danielsson

C’est une histoire européenne
fascinante mais tragique, l’histoire
commune de l’Europe de l’Est et de
l’Ouest qui commença dans une
ville qui changea de nom plusieurs
fois selon leurs occupants Lemberg
– Lvov – aujourd’hui appelée Lviv et
se trouvant en Ukraine.

C’est aussi l’histoire de l’avocat
Philippe Sands spécialisé dans les
droits de l’homme visitant pour
une conférence la ville natale de
son grand-père, Lviv (Lemberg). En
retraçant la vie de sa famille, de son grand-père Léon Buchholz,  il
découvre dans ses recherches aussi la vie des deux grands juristes,
d’origine juives, fondateurs des concepts de crime contre l’humanité
et de génocide, Hersch Lauterpacht et Raphael Lemkin ayant étudié
tous les deux à Lemberg.

Le livre décrit de manière très personnelle et par les destins de ses
différents personnages, la tragédie européenne de l’antisémitisme,
répandu dans toute l’Europe. Il décrit entre autres le destin de Miss
Tilney, une femme remarquable qui sauva la mère de l’auteur mais
aussi la vie d’un des principaux dirigeants nazis, gouverneur général
de la Pologne occupée, Hans Frank, qui contribua à la « Solution
finale » et fut condamné à mort au procès à Nuremberg.

Il analyse surtout par les approches de ces deux grandes
personnalités, Lemkin et Lauterpacht, la responsabilité d’un État à
protéger les siens, y compris ses minorités – une responsabilité non
définie jusqu’à la deuxième guerre mondiale. Ce n’est qu’en
préparant le procès de Nuremberg où les idées de Lauterpacht et
Lemkin ont pesé, que les concepts de crime contre l’humanité et de
génocide ont été définis et reconnus dans le droit international.
Leurs idées ont aussi inspiré la Déclaration des Nations Unies sur les
droits de l’Homme ainsi que la Convention Européenne des droits
de l’Homme et enfin la Convention européenne sur le Génocide.

Un livre indispensable pour mieux comprendre notre histoire
commune européenne ainsi que les bases des droits de l’Homme en
Europe et dans le monde.

Veronika Wand-Danielsson est diplomate, ancien ambassadeur de Suède en France

Retour à Lemberg de Philippe Sands (Albin Michel)
par Veronika Wand-Danielsson

#Lecturesconfinement : Journal intime de Richard Burton par Stéphanie des Horts

Il y a d’abord ces yeux violets. Ou
bleu outremer. Ou vert
émeraude. Ou bien jaunes
comme les loups. Et puis cette
femme, ses colères, sa beauté,
son intelligence, sa perversité, sa
force. Elle se nomme Cléopâtre, il
la croise en Italie, il ne la quittera
plus. Ou presque. Cléopâtre se
grise de bijoux, d’amour, de
succès. On entre par une porte
chez Bulgari, on sort par une
autre. Pour se jouer des
paparazzis et de leur Rolleiflex.
On s’aime passionnément, c’est interdit. Cléopâtre et Marc-Antoine,
l’histoire se termine mal, tout le monde le sait. Burton est déchiré,
Liz Taylor plus légère avec l’adultère. Ils sont mariés. Chacun de leur
côté. L’acteur quitte sa femme et ses deux enfants. Liz Taylor vire
Eddie Fisher qu’elle avait fauché à Debbie Reynolds. Burton/Taylor,
leur liaison choque le monde, même le pape les condamne, c’est dire!
Amants pendant deux ans, ils se marient en 1964. Puis passent
leurs temps à s’adorer et se quitter. Colère, alcool, passion et
cinéma. Cela donnera Cléopâtre, Qui a peur de Virginia Woolf, la
Mégère apprivoisée
et tant d’autres. « Furious love », assurément ! Dix
ans de vie commune, un amour par-delà la mort. Des lettres
enflammées, des cris, l’ardeur, la folie… Et puis ce journal. Il y raconte
tout. Avec poésie, vigueur et tendresse. La Guerre de Troie à côté,
c’est d’un banal.

Lui, le Gallois, pauvre comme Job, fils d’un mineur et d’une serveuse,
élevé par sa sœur aînée, il fait des études et plonge dans
Shakespeare. Cela lui ouvre toutes les portes. Jusqu’à Hollywood.
Ah, le cinéma ! Camera à l’épaule, il explore dans son journal, ses
amours et ses tourments, sa profession et ses désirs les plus intimes.
Liz Taylor l’entraine dans une spirale infernale, leurs excès, leurs
succès, leurs disputes, il raconte tout. Et puis cette époque
incroyable où tout était permis, ses amis, la littérature qui le porte,
et Liz, Liz, Liz, l’amour de sa vie. Tant de fêtes, à Venise, à Paris, à
Londres à New York, tant de bijoux, tant d’alcool et de tabac.

Le présent volume propose une période resserrée de 1965 à 1971.
Six années disséquées comme si nous y étions. Le journal entier
couvre quarante-quatre ans, autant dire que l’éditeur anglais fait
des coupes…

Burton avait-il l’intention de publier ses écrits ?  » Il faut que je
commence à mettre de l’ordre dans ce journal. Je fourre les feuilles dans le
tiroir le plus proche et du coup je ne peux jamais revenir en arrière et voir
ce que j’ai écrit ou pas sur qui-que-quoi-qu’est-ce… »
Aurait-il accepté
d’écrire son autobiographie ? Un éditeur  lui offre un million de
dollars en échange d’un mois de son journal. Sa mort brutale, à l’âge
de 58 ans, coupe court au projet.

Car ce journal, c’est sa vérité, même s’il ne dévoile pas tout. Et si Liz
lisait derrière son dos … C’est le reflet d’une période étincelante,
l’exaltation d’un amour. C’est la voix d’un être complexe, pétri de
contradictions qui voulait tout sauf une vie mouvementée. Un
acteur adulé, un père, un mari, un amant passionné. Il se révèle
mélancolique, troublé par son succès, fier aussi, un homme multiple
qui tente par tous les moyens de gérer ses addictions : l’alcool, le
tabac et la pire d’entre elles, Liz Taylor.

Stéphanie des Horts est écrivaine et journaliste.
Elle vient de publier Jackie et Lee (Albin Michel).

Journal intime de Richard Burton (Séguier)
par Stéphanie des Horts

#Lecturesconfinement : Philippe di Folco, le vrai comte de Montecristo et la collection Insulaires par Clémentine Portier- Kaltenbach

Insulaires. Cette collection est à mes yeux
la plus nécessaire, la plus créative et la plus
jolie du moment. Dirigée par Bruno Fuligni, proposée par les Editions du Trésor, elle
nous fait voyager d’îles en îles. Chaque
opuscule dont la couverture se « déploie »
comme une carte au trésor  nous entraine
dans une île différente. Entre Corse et IIe
d’Elbe, Philippe di Folco nous fait
rencontrer « Le vrai comte de Montecristo ».
Un héros épique, une île, un Anglais
richissime et farfelu et peut-être même un
vrai trésor ? Une lecture jubilatoire et
surtout, du vent dans les voiles, du souffle…de l’air!
Clémentine Portier-Kaltenbach est écrivaine, journaliste et
chroniqueuse.
Dernier livre paru : Un mot, un destin. Dans l’intimité
des femmes célèbres
 (Albin Michel)
Philippe di Folco, le vrai comte de Montecristo et la collection Insulaires (Editions du Trésor)
par Clémentine Portier- Kaltenbach

#Lecturesconfinement : Alma, le vent se lève de Timothée de Fombelle par Laurent Marsick

Un livre essentiel à un moment où
les questions de racisme
ressurgissent dans nos vies… Alma,
le vent se lève
 nous plonge au cœur
de la traite des noirs en Afrique…
Embarquez dans cette aventure,
Alma est une ode à la liberté.
Timothée de Fombelle manie les
mots comme personne, s’il existait
un Nobel de littérature jeunesse il
en serait le perpétuel lauréat ! Sa
nouvelle héroïne Alma va vous
aider à grandir, à prendre
confiance en vous, à croire en la
liberté et en la vie…. sans jamais subir…
Laurent Marsick est journaliste au service culture de RTL,
spécialiste de littérature jeunesse et chroniqueur dans l’émission
Laissez-vous tenter
Alma, le vent se lève de Timothée de Fombelle (Gallimard jeunesse)
par Laurent Marsick

#Lecturesconfinement : Extérieur monde d’Olivier Rolin par Charif Majdalani

Dans Extérieur monde, Olivier Rolin
se donne pour but affiché de faire
son autoportrait. Mais
l’autoportrait ici ne se conçoit que
selon une règle unique,  qui veut
que l’on n’est jamais que ce qu’on a
fait, vu, parcouru, senti et vécu.
C’est de notre expérience du
monde et des hommes, des
paysages que nous avons vus ou parcourus, de l’amour que nous y
avons rencontré ou pas, que nous
sommes pétris, et c’est de cela, de
ce façonnement de soi par
l’extérieur, que sera donc composé l’autoportrait de Rolin. Or ce
dernier, durant sa vie, a énormément voyagé, parcouru le globe
jusque dans ses coins les plus reculés, de la Terre de Feu à
Vladivostok, du Soudan à Khabarovsk. Il a visité les lieux des conflits
les plus sanglants de notre temps, arpenté cent villes, vécu des
amours et des déconvenues innombrables, rencontré une multitude
de gens qui, dans tous les coins de la planète, furent ses guides, ses
amis ou ses interlocuteurs, et croisé aussi sans oser les aborder des
centaines de femmes dont l’inventaire est à lui seul un hymne à
l’universelle beauté du monde.

C’est cette incroyable richesse de souvenirs qui fait la matière
d’Extérieur Monde. Et on devine que les vertigineux et infinis
méandres qui composent cet autoportrait de l’auteur en globe
terrestre ne pouvaient cependant être racontés linéairement. Le
choix de l’écrivain sera donc plutôt de piocher dans la variété des
choses vues et vécues, au gré des sujets ou des motifs. Les faits s’y
génèrent ensuite les uns les autres par associations, proximités,
regroupements, dans une poétique de la digression où chaque
dérive génère de nouvelles associations qui font elles-mêmes
proliférer le texte en le ramifiant sans fin.

Mais ce roman de Rolin est aussi celui d’un grand lecteur pour qui la
littérature et le monde sont en permanente interaction. Rolin
évoque, cite et dialogue avec des dizaines d’auteurs et d’œuvres tout
le long du livre. Et si les écrivains le plus souvent évoqués sont
Proust et Chateaubriand, ce n’est pas seulement parce que Rolin
s’inscrit dans la tradition des grands stylistes français, mais aussi
parce que, à l’instar de la Recherche du temps perdu et des Mémoires
d’Outre-tombe
, Extérieur monde se veut une exploration des effets du temps et du désenchantement sur les humains, et témoigne des bouleversements du monde au carrefour des grandes époques
historiques.

Charif Majdalani est écrivain libanais et professeur de lettres.
Son dernier ouvrage, Beyrouth 2020. Journal d’un effondrement
(Actes Sud) a obtenu le prix spécial du jury Femina 2020.

Extérieur monde d’Olivier Rolin (Gallimard)
par Charif Majdalani

#Lecturesconfinement : Amrita de Patricia Reznikov par Gérard de Cortanze

La peintre indienne d’origine
hongroise Amrita Sher-Gil n’avait
pas froid aux yeux. Après avoir
déclaré « l’Europe appartient à
Picasso, Matisse, Braque et bien
d’autres. L’Inde n’appartient qu’à
moi seule », elle révolutionna la
peinture indienne. Belle,
audacieuse, iconoclaste, libre, elle
parcourut l’Europe, de Budapest à
Paris, en passant par Londres et
Florence, avant de passer les
dernières années de sa vie dans
l’Inde coloniale, entre Lahore et
Simla. Morte prématurément à 28 ans, celle qu’on surnomme
aujourd’hui la « Frida Kahlo indienne », est une gloire dans son
pays et le monde anglo-saxon. Avec ce roman inspiré, Patricia
Reznikov écrit le livre qui peut enfin la faire connaître au monde
entier. Remarquablement écrit, il redonne vie à une figure
féminine hors norme et d’une très grande modernité. La première
rétrospective de son œuvre aura lieu de septembre 2021 à janvier
2022 au Kunstsammliung Nordrhein-Westfalen de Dussëldorf.

Gérard de Cortanze est écrivain, essayiste et dramaturge, auteur
de nombreux livres dont Assam (Albin Michel), prix Renaudot
2002
Dernier livre paru : Moi, Tina Modotti, heureuse parce que libre
(Albin Michel)
Amrita de Patricia Reznikov (Flammarion)
par Gérard de Cortanze

#Lecturesconfinement : Kudos de Rachel Cusk par Carole Fives

Je conseille le dernier roman de
Rachel Cusk, Kudos, et tous les
livres de cette autrice que je viens
de découvrir, et que j’ai dévorés en
quelques semaines (vive le confinement, juste pour ça !). Elle a
une façon très ironique et très lucide de parler de nos vies, de nos rencontres, de nos comportements. C’est troublant, c’est très très drôle, et c’est surtout une écriture très nouvelle. Elle me fait penser par beaucoup d’aspects à Nathalie Sarraute, dont je vénère le travail, et dont je vous conseille aussi l’excellent livre Tu ne t’aimes pas (Folio).

Carole Fives est écrivaine. Dernier livre paru : Térébenthine
(Gallimard)
 Kudos de Rachel Cusk (L’Olivier)
par Carole Fives

#Lecturesconfinement : Churchill d’Andrew Roberts par Delphine Ernotte

Je lis, ou plutôt je dévore la
biographie de Churchill d’Andrew
Roberts. C’est bluffant de précision,
de finesse et d’intelligence : on
comprend tout et l’auteur rectifie au
passage les propres récits de
Churchill dans Mes jeunes années
notamment. Et ça qui se lit comme
un roman !
Delphine Ernotte est la présidente
de France Télévisions

Churchill
d’Andrew Roberts (Perrin)
par Delphine Ernotte

#Lecturesconfinement : Le vaisseau des morts de B. Traven par Louise Browaeys

Un livre qui m’a hantée et que j’ai lu plusieurs
fois sans jamais en percer l’intime mystère.
Cette image de deux hommes face à leur
chaudière, pelletant le charbon sur un vieux
bateau à vapeur, un vaisseau fantôme qui va
couler, un cercueil flottant qui est en train de
couler sous nos yeux pour que l’armateur
touche la prime d’assurance, et qui nous fait
couler avec lui. Cette monstrueuse Odyssée
sur les mers de l’Europe, dans les années 20,
qui est une histoire si étrangement
universelle. Cette dérive, sans papier, sans
argent, sans identité. Ce suspens existentiel
qui nous fait toucher la matière de l’éternité,
une émotion littéraire incomparable, la beauté sans limite d’une amitié entre deux
hommes. 

Louise Browaeys est agronome, conférencière et
 l’autrice de nombreux livres en
lien avec l’écologie (Permaculture au quotidien, Terre vivante, 2018, et
Accompagner le vivant, Diateino, 2019). 
Son premier roman, La Dislocation
(HarperCollins) est paru en septembre 2020. 
Le vaisseau des morts de B. Traven (La Découverte)
par Louise Browaeys
 

#Lecturesconfinement : L’archipel d’une autre vie d’Andreï Makine par Nathalie Péchalat

Une épopée dans la taïga
russe…Une fuite en avant, une
traque… Ce livre nous emmène
dans un autre monde, nous
rapproche de la nature et nous
ouvre les yeux sur un possible
« ailleurs ». Vivement conseillé
pour ceux qui pensent ou sont en
reconversion professionnelle ou
personnelle.
Nathalie Péchalat, double
championne d’Europe de danse
sur glace, est la présidente de la
fédération française des sports de glace.
L’archipel d’une autre vie d’Andreï Makine (Seuil)
par Nathalie Péchalat