De l’autre côté des croisades

Il est bien connu que l’Histoire est écrite par les vainqueurs. Mais la
justice finit toujours par triompher, dut elle attendre plusieurs
siècles. Il y a près de quarante ans, l’Académicien Amin Maalouf
publiait Les Croisades vues par les Arabes (JC Lattes, 1983), ouvrage
demeuré pourtant sans postérité.

Gabriel Martinez-Gros, l’un de nos plus grands spécialistes de l’Islam
et dont les travaux font autorité jusqu’au Moyen-Orient – il a été
ainsi nommé pour le Prix Sheikh Zayed Book Award – reprend le
flambeau pour nous offrir un essai historique à la fois palpitant et
d’une érudition stupéfiante. Suivant les pas d’Ibn Khaldoun, l’un des
plus grands penseurs non seulement arabes mais également du
Moyen-Age, il restitue l’épisode des croisades dans le temps long et
l’inscrit dans le phénomène plus global de l’effondrement de l’empire
islamique sous l’action conjointe des Mongols et, en Terre sainte, des
Francs. Mais surtout, en réorientant la focale depuis Damas ou
Bagdad, voire Pékin, il permet au lecteur de sortir de sa vision
autocentrée et européiste. Avec cette objectivité salutaire, il lui tend
un pont qui, sitôt franchi, le conduit bien au-delà du simple savoir.

Par Laurent Pfaadt

Gabriel Martinez-Gros, De l’autre côté des croisades, l’Islam entre croisés et mongols
Passés composés, 304p.