Déjà l’air fraîchit

Le dixième roman de Florian Ferrier
explore une facette quelque peu
méconnue du Troisième Reich, celle
des femmes instruites. Cantonnées à
leurs rôles de mères et d’agents de
perpétuation de la race aryenne
véhiculés par Hitler et Himmler, il n’y
eut que peu de place pour celles qui
effectuèrent des études et tentèrent
de construire leur propre vie.

Attendant son procès dans la prison
d’Hamelin où se trouvent
emprisonnés quelques criminels de guerre, Elektra Winter, walkyrie des bibliothèques, se remémore ses
actions passées au service du Troisième Reich. Elle a été chargée de
purger bibliothèques et archives de l’Europe entière, de Paris aux
territoires de l’Est. Mais quel crime a-t-elle commis ? se demande le
lecteur dans ce roman très réussi. Celui d’avoir servi d’agent de
nazification des consciences ? Certainement. Celui d’avoir permis la
spoliation d’œuvres d’art littéraires pour le compte du
Reichsmarschall Goering ? Assurément. Ou celui, finalement, d’avoir
satisfait une ambition professionnelle quitte à pactiser avec le
diable ? D’avoir saisi cette liberté professionnelle, mais aussi
sexuelle avec Madeleine, son grand amour, durant cette époque
troublée où ces libertés étaient toutes refusées aux femmes. Car la
guerre a permis cela. Le meilleur comme le pire. Avec Elektra, Déjà
l’air fraîchit
nous emmène dans un voyage passionnant des Deux-
Magots à la Shoah au cours duquel le lecteur se demandera en
permanence où se situe la frontière entre ambition et
compromission, entre liberté et asservissement.

Par Laurent Pfaadt

Florian Ferrier, Déjà l’air fraîchit,
Chez Plon, 672 p.