Festival Les Etoiles du Documentaire

Luc Maechel et Simone Fluhr ©Kamal Ourahou

Suite et perspectives

Retour sur le
Festival Les Etoiles
qui a eu lieu à
Strasbourg, au
cinéma l’Odyssée,
les 9 et 10 février.
Cette deuxième édition a connu une
fréquentation encourageante, avec un public jeune qui a été au rendez-
vous, à la grande satisfaction des organisateurs, désireux de faire
connaître le genre du documentaire à un public qui spontanément ne
s’y intéresse pas forcément.


Les documentaires

Trois classes de collégiens sont venues à la rencontre de Simone
Fluhr et son film Rivages, lui posant des questions aussi
pertinentes que d’une fraîcheur revigorante. Dautres collégiens
ont  beaucoup apprécié l’excellent Deux Cancres de Ludovic
Vieuille, réagissant avec des éclats de rire contagieux à la
situation qui leur est sans doute familière de ce père et fils
confrontés aux affres des devoirs. Autre public intéressé et très
présent, des étudiants en cinéma que Kijima Stories a fortement
impressionnés, à en juger par leur échange avec l’enthousiaste
réalisatrice Laétitia Mikles. Son film est effectivement d’un grand
intérêt et passionnant à bien des égards. Alliant réalisme et
poésie, Sur le rebord du monde d’Hervé Drézen est un voyage très
dépaysant au pays de Penmarc’h avec un réalisateur qui est un
véritable artiste par son engagement et par son refus du système.
Malheureusement, qui veut réaliser un documentaire est tenu de
constituer des dossiers pour séduire producteurs et chaînes de
télé, une réalité contraignante et terre-à-terre qui n’a cessé d’être
évoquée lors de ce festival, comme celle de la diffusion des
documentaires qui souffrent d’un manque aigu de visibilité par le
grand public – d’où l’intérêt de ce Festival Les Etoiles qui n’existe
pour le moment qu’à Rennes et à Strasbourg mais devrait
également trouver sa place l’an prochain à Bordeaux, Nantes et
Marseille. Quid de l’avenir du documentaire et notamment de la
place des auteurs dans l’espace frontalier ? Ce fut le sujet d’une
réunion entre professionnels de la filière image qui a eu lieu en
marge de ce Festival.

Le Transfrontalier en questions

Une séance de réflexion a réuni différents auteurs-réalisateurs de
documentaires autour de la question de leur statut, de leur travail
et des coopérations actives ou non entre les pays limitrophes de la
Région du Grand Est, la seule en France qui partage sa frontière
sur près de 760 km avec quatre pays :  l’Allemagne, la Belgique, le
Luxembourg et la Suisse. La question du transfrontalier se pose de
façon prématurée lorsque la diffusion des documentaires est le
problème crucial qui se pose au sein même de chaque pays. Grâce
au Grand Est cependant, et grâce à un réseau de salles, le
documentaire trouve sa place dans la  programmation de  salles de
cinéma. La Région Grand-Est s’investit aussi dans l’aide à
l’écriture. Avec les pays limitrophes, synergie et complémentarité
sont à trouver. Si les politiques « vendent » le « transfrontalier », il
reste un concept utopique en matière de création audiovisuelle
car chaque pays a son propre fonctionnement et sa législation du
droit des auteurs-réalisateurs. Si les lois peuvent changer, reste
que la façon de travailler et l’esprit même qui anime la création et
la réalisation d’un film diffèrent tellement que les freins restent
énormes, sans compter le problème de la langue. Qui croit que les
Alsaciens et les Allemands trouvent facilement un terrain
d’entente se trompe. Un producteur alsacien en a fait l’amère
expérience avec un film qui n’a pas trouvé preneur Outre-Rhin,
alors qu’il était tourné dans les deux langues. Les chaînes de
télévision restent frileuses en Allemagne, le côté didactique du
documentaire devant être privilégié. Tout doit y être surligné, sur-
commenté, comme si l’on ne faisait pas confiance à l’intelligence
du spectateur et à son imagination. Quant à la chaîne ARTE, elle
n’est souvent pas plus audacieuse que ses consœurs assujetties à
l’audimat. Un espoir cependant, la différence de culture, en
termes de création documentaire, est moindre entre la France et
la Belgique. Cette réunion entre professionnels du documentaire
a permis d’interroger la question du transfrontalier, certes sans
pouvoir y répondre, mais en ayant posé les jalons d’un début de
réflexion qui sera menée dans les années à venir, le transfrontalier
offrant des perspectives intéressantes tant professionnelles que
publiques. Reste comme l’a dit l’un des intervenants, en guise de
conclusion, à « écrire, écrire, écrire… »

Les étoiles du documentaire,
Du 9 et 10 Février 2018

Elsa Nagel