La symphonie des adieux

Une histoire
familiale sous la
Chine
communiste.
Magnifique et
touchant.

Il manquait à la
Chine
contemporaine sa
grande histoire. Une saga où se côtoient puissants et humbles.
Une saga comme une symphonie. Avec ses mouvements lents, ses
adagios tendres et ses allegrettos en forme de tragédies. Voilà à
quoi ressemble le très beau roman autobiographique de
Madeleine Thien, Nous qui n’étions rien, finaliste du Man Booker
Prize. Ceux qui ne sont rien sont ces deux familles confrontées à
l’écrasante roue rouge de la Chine communiste.

Commencé au début des années 1960 au conservatoire de
Shanghai et s’achevant de nos jours, en passant par la révolution
culturelle de 1966 et les évènements de Tiananmen en 1989, le
roman déploie sous la plume si attachante de Madeleine Thien et
constellée de la poésie de Dei Bao, une histoire qui évoque l’exil,
l’impuissance des hommes face à la machine de l’Etat mais
également le libre-arbitre et ce rêve de liberté qui n’a jamais
quitté nos héros, à l’image du père de Marie, Jing Kai, l’un des
protagonistes du livre.

Jouer de la musique sera pour eux, l’inaltérable résistance. Tantôt
requiem, tantôt sonate à l’image de ces variations Goldberg qui
hante Sparrow, elle les guidera à travers les méandres de cette
histoire tourmentée jusqu’au Canada afin de perpétuer leur
mémoire familiale, et à travers eux, celle des humbles, face à tous
ceux qui, avec des moyens d’Etat, voudront les anéantir pour créer
ce fameux homme nouveau. Le requiem se muera alors en hymne.

Par Laurent Pfaadt

Madeleine Thien, Nous qui n’étions rien,
Chez Phébus, 507 p.