L’âme des objets transmissionnels, liens familiaux avec la Shoah

Photo Claude Menninger

Plusieurs
animations sur ce
thème ainsi qu’une
exposition
photographique
réalisée par Michel
Borzykowski, coa-animateur du
« Réseau 2G » à
Genève, nous donnent à voir et à appréhender « ce que tu as
hérité de tes pères », selon l’expression de Goethe, reprise
par le psychiatre et psychanalyste Daniel Lemler.

Ces « objets transmissionnels » mis en scène dans des
photographies prises par Michel Borzykowski, comme leur
qualificatif l’indique, ont été transmis aux survivants de la
Shoah. Dans le mot « transmissionnel », l’on perçoit
également la notion de « mission » car c’est à un véritable
devoir de mémoire que ces objets font référence.

C’est ainsi que lors de rencontres avec des descendants de la
2e ou  3e génération de rescapés de la Shoah, des objets mis
en lumière ont témoigné de l’âme toujours présente de ceux
qui ne sont plus. Ces objets font le lien avec les vivants et les
morts.

Ils nous parlent tel ce morceau de plomb qui servait au père
de Lydia à presser les tissus à découper et sa fille, de nous
confier, qu’il contient tout « un poids affectif ». Pour
Charlotte, c’est une théière d’Indonésie qui lui permet de
renouer avec sa famille juive déportée. Yves, quant à lui,
jongle avec les chapeaux de ses oncles ! L’écrivain Joseph
Joffo exhibe la bille qu’il avait obtenue en échange de son
étoile jaune…Gloria a conservé une poupée qui pleure quand
on tourne la clé insérée dans son dos et qui, à n’en pas
douter, fait remonter à la surface du monde les larmes qui
hantent ses nuits.

Car tous ces objets, aussi modestes soient-ils, contribuent à
lutter contre l’oubli. Et même si « l’intensité du traumatisme
s’atténue à chaque génération » comme le pense Michel qui a
conservé une montre qui lui fait signe depuis l’au-delà, il
prend soin d’ajouter « les dangers de demain nous sont
encore inconnus ».

Et Daniel Lemler de conclure dans sa conférence que chaque
objet transmissionnel renvoie à une histoire particulière en
lien avec l’Histoire avec un grand H et d’affirmer, à très juste
titre, que nous sommes tous des « survivants de la Shoah »
qui a secoué l’Europe dans les tréfonds de l’âme humaine. Il
nous appartient aujourd’hui de sortir de notre carcan
narcissique pour accueillir l’altérité qui ne peut que nous
ouvrir des horizons meilleurs.

Françoise Urban-Menninger

Lieu d’Europe – Strasbourg