#Lecturesconfinement : Journal intime de Richard Burton par Stéphanie des Horts

Il y a d’abord ces yeux violets. Ou
bleu outremer. Ou vert
émeraude. Ou bien jaunes
comme les loups. Et puis cette
femme, ses colères, sa beauté,
son intelligence, sa perversité, sa
force. Elle se nomme Cléopâtre, il
la croise en Italie, il ne la quittera
plus. Ou presque. Cléopâtre se
grise de bijoux, d’amour, de
succès. On entre par une porte
chez Bulgari, on sort par une
autre. Pour se jouer des
paparazzis et de leur Rolleiflex.
On s’aime passionnément, c’est interdit. Cléopâtre et Marc-Antoine,
l’histoire se termine mal, tout le monde le sait. Burton est déchiré,
Liz Taylor plus légère avec l’adultère. Ils sont mariés. Chacun de leur
côté. L’acteur quitte sa femme et ses deux enfants. Liz Taylor vire
Eddie Fisher qu’elle avait fauché à Debbie Reynolds. Burton/Taylor,
leur liaison choque le monde, même le pape les condamne, c’est dire!
Amants pendant deux ans, ils se marient en 1964. Puis passent
leurs temps à s’adorer et se quitter. Colère, alcool, passion et
cinéma. Cela donnera Cléopâtre, Qui a peur de Virginia Woolf, la
Mégère apprivoisée
et tant d’autres. « Furious love », assurément ! Dix
ans de vie commune, un amour par-delà la mort. Des lettres
enflammées, des cris, l’ardeur, la folie… Et puis ce journal. Il y raconte
tout. Avec poésie, vigueur et tendresse. La Guerre de Troie à côté,
c’est d’un banal.

Lui, le Gallois, pauvre comme Job, fils d’un mineur et d’une serveuse,
élevé par sa sœur aînée, il fait des études et plonge dans
Shakespeare. Cela lui ouvre toutes les portes. Jusqu’à Hollywood.
Ah, le cinéma ! Camera à l’épaule, il explore dans son journal, ses
amours et ses tourments, sa profession et ses désirs les plus intimes.
Liz Taylor l’entraine dans une spirale infernale, leurs excès, leurs
succès, leurs disputes, il raconte tout. Et puis cette époque
incroyable où tout était permis, ses amis, la littérature qui le porte,
et Liz, Liz, Liz, l’amour de sa vie. Tant de fêtes, à Venise, à Paris, à
Londres à New York, tant de bijoux, tant d’alcool et de tabac.

Le présent volume propose une période resserrée de 1965 à 1971.
Six années disséquées comme si nous y étions. Le journal entier
couvre quarante-quatre ans, autant dire que l’éditeur anglais fait
des coupes…

Burton avait-il l’intention de publier ses écrits ?  » Il faut que je
commence à mettre de l’ordre dans ce journal. Je fourre les feuilles dans le
tiroir le plus proche et du coup je ne peux jamais revenir en arrière et voir
ce que j’ai écrit ou pas sur qui-que-quoi-qu’est-ce… »
Aurait-il accepté
d’écrire son autobiographie ? Un éditeur  lui offre un million de
dollars en échange d’un mois de son journal. Sa mort brutale, à l’âge
de 58 ans, coupe court au projet.

Car ce journal, c’est sa vérité, même s’il ne dévoile pas tout. Et si Liz
lisait derrière son dos … C’est le reflet d’une période étincelante,
l’exaltation d’un amour. C’est la voix d’un être complexe, pétri de
contradictions qui voulait tout sauf une vie mouvementée. Un
acteur adulé, un père, un mari, un amant passionné. Il se révèle
mélancolique, troublé par son succès, fier aussi, un homme multiple
qui tente par tous les moyens de gérer ses addictions : l’alcool, le
tabac et la pire d’entre elles, Liz Taylor.

Stéphanie des Horts est écrivaine et journaliste.
Elle vient de publier Jackie et Lee (Albin Michel).

Journal intime de Richard Burton (Séguier)
par Stéphanie des Horts