#Lecturesconfinement : Le bonheur, sa dent douce à la mort. Autobiographie philosophique de Barbara Cassin de l’Académie française par Laurent Pfaadt

C’est une drôle d’autobiographie que
celle de Barbara Cassin, récemment
élue à l’Académie française. Oui de
l’humour, il y en a dans cette enfance
passée auprès de parents peintres à
leurs heures, de cet grand-oncle
illustre qui lui propose de devenir
sténo ou de ces virées étudiantes et
de ces rencontres intellectuelles qui
appartiennent à un autre âge. Mais à
travers ces pages truculentes se
nichent également des leçons de vie
que l’on goûte, que l’on savoure. Qui a
dit que la philosophie était
mélancolie ? Certainement pas elle…

D’ailleurs, de la philosophie il est en évidemment question avec
Barbara Cassin. Tout le temps. Comme une boussole pour avancer.
La brillante helléniste nous convie avec bonheur à une navigation en
compagnie de Platon, de Parménide, de Protagoras ou d’Aristote
mais également de Leibniz, Kant, Heidegger et Lacan permettant
ainsi de remettre en perspective ce monde souvent privé de sens. Ce
voyage permet ainsi de tracer des fils d’Ariane entre leurs
enseignements et notre époque, entre la vie de Barbara Cassin et
aujourd’hui comme lorsqu’elle oppose Platon à Gorgias, l’une de ces
« sales ordures démagogues » dont la vérité n’était pas la
préoccupation première. Tiens…tiens…nous pensons à quelqu’un…

L’Académicienne ne serait pas immortelle si elle ne nous invitait pas
à chevaucher joyeusement la langue française, sur les barricades de
mai 68, dans les retraites passionnées de René Char ou en
compagnie d’Alain Rey. Cette langue qui autorise tout, celle qui
transforme des adolescents psychotiques en êtres sublimes, celle
qui réconcilie une nation, celle qui, enfin, permet toutes les libertés.
Car, à y regarder de plus près ou plutôt à y lire de plus près, ce livre
est un formidable plaidoyer pour la liberté, pour toutes les libertés.
En refermant le livre, on se sent mieux armé de ce courage qui nous
faisait peut-être défaut, prêt à « suivre ce qu’on attend pas »

Le bonheur, sa dent douce à la mort. Autobiographie philosophique de
Barbara Cassin de l’Académie française (Fayard)
par Laurent Pfaadt