Les joyaux de la couronne de Hongrie

Rippl-Ronaï © Galerie Nationale hongroise, Budapest 2016
Rippl-Ronaï © Galerie Nationale hongroise, Budapest 2016

Les plus beaux tableaux du Musée des Beaux-Arts de Budapest à l’honneur d’une magnifique exposition et d’un catalogue éclairant

Acteur essentiel de l’histoire de l’Europe depuis près d’un millénaire à travers le Saint Empire Romain Germanique ou l’empire des Habsbourg devenu austro-hongrois en 1867, la Hongrie s’expose aujourd’hui à Paris. A l’occasion de la rénovation du Szépmuvészeti Múzeum, l’écrin artistique de Budapest, et de concert avec la Galerie Nationale Hongroise, la patrie de Sissi se donne à voir mais également à lire grâce au catalogue de l’exposition qui a pris place dans le palais d’une autre princesse devenue reine, Marie de Médicis.

Outre le fait de recenser ces merveilleux chefs d’œuvre que le public français pourra admirer, l’ouvrage qui accompagne l’exposition permet, à travers la constitution des magnifiques collections artistiques de grandes familles aristocratiques hongroises notamment celle des Esterházy dont l’un des membres joua un triste rôle durant l’affaire Dreyfus, et la construction de ce qui allait devenir le musée des Beaux-Arts de Budapest, de comprendre tout le travail de collecte et d’organisation muséale. En 1906 naissait de ces efforts le nouveau musée des Beaux-Arts conçu par l’architecte Albert Schickedanz et dans lequel prirent place ces Dürer, Hals, Greco, Tiepolo et Goya. Plusieurs représentations du musée permettent ainsi un voyage dans cette Autriche-Hongrie de la fin du XIXe siècle qui n’avait encore qu’une vingtaine d’années à vivre. Des politiques successives d’acquisition menées par les directeurs notamment en direction de l’école française moderne permirent ensuite d’enrichir avec des œuvres modernes une collection qui témoigne aujourd’hui d’une richesse et d’une diversité sans égale en Europe centrale mais surtout, de réaffirmer les liens artistiques si étroits entre la Hongrie et la France.

Ces liens étaient anciens car dès le Moyen-Age, le roi de Hongrie,
Sigismond de Luxembourg s’inspira du style français, notamment
angevin, pour construire ses palais et leurs statuaires. L’ouvrage permet  avec bonheur de découvrir toute la beauté de l’art médiéval hongrois, très largement méconnu, y compris des Hongrois, et qui trouva son apothéose avec le retable de l’Annonciation de Kisszeben (1515-1520) et celui du maître-autel de l’église franciscaine
d’Okolicsno, présent dans l’exposition.

A la fin du 19e siècle, Paris constituait l’épicentre du monde artistique et faisait converger vers ses salons et ses ateliers tous les
artistes de talent. Les maîtres hongrois du symbolisme et de la modernité ne résistèrent pas à l’appel de la capitale française, ce dont le catalogue de l’exposition se fait largement l’écho. Ainsi, Mihaly
Munkacsy, peintre académique tint à Paris un salon à la mode, fréquenté par les grandes personnalités hongroises de passage à Paris et notamment du plus grand musicien hongrois, Franz Liszt, dont il peignit, en 1886, le dernier portrait. Un autre peintre, Jozsef
Rippl-Ronaï dont la Femme à la cage (1892) s’affiche dans toutes les stations de métro ces jours-ci rejoignit le groupe des Nabi en compagnie de ses acolytes Bonnard, Valloton ou Vuillard.

Il apparaissait donc évident que ce départ forcé, en attendant la
réalisation du grand projet culturel hongrois baptisé Projet Liget
Budapest, prenne l’aspect d’une lune de miel artistique qui n’a jamais véritablement pris fin entre la France et la Hongrie.

Chefs d’œuvre de Budapest, Dürer, Greco, Tiepolo, Manet, Rippl-Rónai… Musée du Luxembourg, jusqu’au 10 juillet 2016

Catalogue de l’exposition : Chefs d’œuvre de Budapest, Dürer, Greco,
Tiepolo, Manet, Rippl-Rónai…
Musée du Luxembourg, Les éditions Rmn-Grand Palais, 2016

Laurent Pfaadt