Les Nations célèbrent l’Europe

Jordi Savall et le Concert des Nations achevaient à la Philharmonie de Paris son cycle Beethoven

Jordi Savall
© Barbara Rigon

La Philharmonie de Paris était pleine comme un œuf. Les raisons ?
Une Neuvième symphonie de Beethoven toujours prompte à attirer
les foules. Et interprétée par l’un des ensembles les plus talentueux
de la planète, le Concert des Nations, sous la conduite de son
emblématique et engagé chef d’orchestre, Jordi Savall. Autant dire
tous les ingrédients pour une soirée d’anthologie, ce qu’elle fut
assurément. Élargissant ainsi depuis plusieurs années son spectre
musical, le Concert des Nations s’est engagé depuis juin 2019 dans
un incroyable projet consistant à interpréter à la Philharmonie de
Paris l’intégrale des symphonies de Beethoven.

Avec les 8e et 9e, Jordi Savall a ainsi transformé cet épilogue en
apothéose. La huitième a offert aux spectateurs, le spectacle d’une
œuvre en mouvement. L’interprétation sur instruments d’époque
(vents en bois notamment) et la fidélité aux tempi d’origine
inscrivirent la symphonie dans une histoire, celle d’un classicisme
abouti, dans la longue tradition impulsée par Joseph Haydn. Dans
cette respiration musicale assez incroyable se dégagea notamment
la beauté du violoncelle solo dans le deuxième mouvement.

Le public était ainsi prêt à recevoir cette neuvième symphonie
comme l’immense don d’une formation musicale qui a fait de la
musique le pont entre les cultures et les êtres. Une fois de plus, le
Concert des Nations n’a pas failli à sa réputation. Jordi Savall et ses musiciens ont ainsi bâti une véritable cathédrale sonore où dans
chaque chapelle pouvait se lire l’histoire de l’Europe avec ses
tragédies portées par des percussions incroyables, ses soubresauts
transcendés par les cordes et ses appels à l’unité sublimés par les
chanteurs en particulier par Mingjie Lei, ténor dont la magnifique
tessiture en a fait l’une des grandes voix de la scène lyrique. Et
comme si cela ne suffisait pas, l’architecte de ce magnifique édifice
rappela que « la musique est le véritable langage de l’Europe » avec, une
fois n’est pas coutume, des Nations au service de cette dernière.

Par Laurent Pfaadt