Les Noces Chymiques de Christian Rose-Croix

rcEn 1616 paraissait
en allemand, sur les
presses de Conrad
Scher à Strasbourg,
un « texte
fondamental dans
l’histoire de
l’ésotérisme
européen », ainsi que
le rappelle Christine Maillard (directrice de la MISHA) :  Les Noces
chymiques
– le titre original est Chymische Hochzeit Christiani
Rosencreutz anno 1459
.

Paru anonymement et attribué à Johann Valentin Andrea (1586-
1654), ce roman alchimique écrit à la première personne du
singulier est devenu un objet d’étude universitaire pour le moins
innovant, après avoir fasciné Goethe, Umberto Eco et bien d’autres
littérateurs. De quoi s’agit-il ? Des aventures d’un dénommé
Christian Rosenkreuz en l’année 1459, lors d’un parcours en sept
journées, qui a tout d’un voyage spirituel narré en une allégorie «
drapée dans un symbolisme alchimique », comme le souligne Jean-
Pierre Brach (EPHE, Paris), le président de séance.

Professeur d’histoire de l’art (Hear, Université de Strasbourg),
Olivier Deloignon a analysé le contexte de production et de
diffusion des Noces chymiques dans le  milieu éditorial
strasbourgeois et rappelé la figure de son éditeur, le bibliopole
Lazare Zetzner.

Stefania Salvadori s’est attaché à la personnalité de son auteur
présumé, Andreae, et à son rôle clé dans la rédaction des manifestes
rosicruciens. Virginie Pektas (Université de Bochum) rappelle que
Les Noces chymiques  ont inauguré, avec la Fama et la Confessio de
Böhme, un mouvement ésotérique dans lequel se reconnaît un
siècle déchiré par les luttes interconfessionnelles et les derniers
soubresauts du Saint Empire romain germanique.

Aurélie Choné (maître de conférences HDR en études germaniques,
Université de Strasbourg) s’est penché sur la postérité de ce texte
dans la littérature théosophique (la théosophie a été fondée à New
York en 1875), ainsi que dans l’anthroposophique de  Rudolf Steiner
(1861-1925) qui lui avait consacré une étude. Une postérité
également interrogée par le théologien Harald Lamprecht au sein
des nouvelles organisations rosicruciennes dans ce contexte de
théosophie et de haut-grade franc-maçonnique…

Quatre siècles après leur parution, les Noces chymiques suscitent
toujours de féconds échanges de savoirs émaillés d’éclats de vérités
fugaces entre les lignes de haute intensité d’un livre toujours à
écrire. Un livre aux frémissements d’ailes qui les épuiserait tous
comme il épuiserait la parole et contiendrait le monde ?

Michel Loetscher
Parution dans l’édition de novembre 2016