Los dias afuera

Une scénographie prometteuse qui donne à voir côté jardin une batterie, côté cour une voiture rouge, en fond de scène des praticables et un écran.


© Eugenia Kais

Elles arrivent en robe de soirée cinq femmes et un homme en costume chic, se présentent, déclinent leur nom, voici Yoseli, Estefania, Noelia, Carla, Paulita et Ignacio, la musique aussi est déjà présente et nous partons vers leur destin dont la première chanson dit qu’on ne le choisit pas. Tous sont jeunes, entre 28 et 40 ans, viennent de passer plus de mille jours  dans la prison d’Ezira à Buenos-Aires où a lieu leur rencontre avec la metteuse en scène Lola Arias, une fabuleuse rencontre qui leur a permis de participer au tournage d’un film « Reas » réalisé dans une prison désaffectée et qui met en perspective l’enfermement  avec cette pièce de théâtre musical qui évoque principalement la vie après la prison.

Leur présence, leur authenticité, leur capacité au chant, à la narration, à la danse ont subjugué un public, qui sans doute, d’avance les attendait mais s’est révélé totalement réceptif, ému, bouleversé.

Avec un élan sans retenue elles-il s’avancent vers nous pour nous confier les moments délicats, difficiles de leur vie marquée par la pauvreté, les rencontres qui enclenchent la drogue, la prostitution, les séjours en prison et resteront, comme il le sera dit à la fin du spectacle », inoubliables et après lesquels « l’avenir restera à tout jamais marqué et incertain ».

Mais avec quelle ingéniosité artistique ces choses-là sont dites, racontées, exprimées !

D’abord il y a leur présence physique et souvent rapportée en gros plan sur l’écran, encore faut-il la mettre, non seulement sous notre regard mais aussi sur notre écoute car dire, chanter, danser sont autant de moyens pertinents pour témoigner de cette énergie qui souligne l’envie de vivre qui les a fait tenir pendant leur incarcération et de revivre lors du retour à la « vie normale ».

Cela explose dans chacune de leurs interventions, lors de ces rencontres à deux ou plusieurs dans la voiture dont l’imageest projetées sur l’écran et où sont évoquées le mal vécu de l’emprisonnement, les trucs pour tenir, comme pour presque tous les tatouages ou, pour deux d’entre elles, visionner durant des nuits des fims d’horreur, la peur de la police quand on retrouve la liberté les difficultés à retrouver un emploi, la discrimination dont sont l’objet ces femmes et cet homme « trans ».

Ces échanges sont immédiatement suivis de musique trépidante interprétée par certaines soutenues à la batterie par la musicienne Inès Copertino, de chants lancés à pleine voix et par la danse (chorégrahie Andrea Servera), le voguing, ou la cumbia, donnant à l’ensemble le caractère d’une comédie musicale pleine de fantaisie et d’entrain.

Cette œuvre exceptionnelle qui sait allier témoignage et réussite artistique a ouvert un chemin de liberté à ces personnes qui ayant connu le pire nous donnent tout d’elles-mêmes et reçoivent leur juste part par l’ovation du public.

Marie-Françoise Grislin pour Hebdoscope

Représentation du 3 février au TNS

En salle jusqu’au 7 février