Perversions kleptocratiques…

Une praticienne de la comptabilité, Eloïse Benhammou, explique
comment le « capitalisme financier, système d’extorsion le mieux
organisé du monde », conduirait notre société à la faillite.
Comment ? 
En « s’accaparant » le pouvoir de création monétaire et
en privatisant « officieusement » l’Etat réduit au « statut » de filiale…

Notre « modèle social et fiscal » serait-il voué à la cessation des
paiements, la France serait-elle déjà en « virtuel état de cessation
de paiement
 »  C’est l’avis d’Eloïse Benhammou, qui officie dans
un cabinet de comptabilité. Depuis que« les  marchés ont entraîné
dans leurs rouages l’économie des sociétés toutes entières
 », la
praticienne des chiffres attire l’attention sur ce qui « caractérise
essentiellement le capitalisme financier 
», à savoir « l’appropriation
par des personnes privées du pouvoir régalien de création
monétaire
». Celle-ci est fondée sur une « économie de la dette dont
le monopole d’émission appartient aux banques 
».

Ainsi, l’Etat se retrouverait réduit à une fonctionnalité d’
« appareil de capture des richesses produites par le peuple » – les
gouvernements successifs ne cessant pas de « mettre en place des
mesures de diminution de redistribution des ressources et
d’augmentation des cotisations
 »…

Rappel : après la dernière guerre mondiale, le gouvernement
provisoire de la République française, présidé par le général de
Gaulle, a mis en œuvre le programme du Conseil national de la
Résistance qui a « pour principaux objectifs économiques d’évincer
les trusts, de socialiser les grands moyens de production et de
reprendre le contrôle de la politique monétaire
 » … Après le train de
nationalisations, les féodalités économiques et financières sont
expropriées et l’émission monétaire devient un service public.

Mais, à partir des années 80, le « modèle anglo-saxon ultra-
libéral » se met en place graduellement avec ses « trois
fondements : privatisation, libéralisation et dérèglementation 
».
Après le traité de Maastricht, confirmé par le traité de Lisbonne,
la Banque de France n’assure plus sa fonction de création
monétaire au service du bien commun et l’Etat est voué à
l’impuissance politique : « Les banques spécialistes en valeur du
Trésor sont devenues le pivot central du système social, politique et
économique. Elles assurent la gestion des dettes de la France ainsi
que la fonction régalienne de battre monnaie. En fait et en droit, le
monopole d’Etat a été remplacé par un monopole privé. 
»

Depuis la « crise » de 2008 et l’abondante « littérature » parue sur
sa supposée genèse, le lecteur pourrait être convaincu de
« vivre » ( !!!) dans un monde de fraude généralisée dont les
pratiques de spoliation ne connaissent plus de limites :  «
L’idéologie repose sur un principe simple : la privatisation des gains
distribués sous forme de bonus et dividendes quand tout va bien : la
socialisation des pertes dont la charge pèse sur les populations
d’Europe en cas de crise du système
 » – bref, ce sont toujours « les
peuples » qui paient pour se retrouver… mis au ban de la
démocratie : « ce système exproprie par la contrainte de la force
publique le fruit du travail de la classe productive pour le confisquer
au profit de sociétés privées 
»…

Pour Eloïse Benhamou, « le capitalisme financier, conjugué à des
intérêts industriels et commerciaux, organise un système totalitaire
qui fabrique la misère 
». En établissant les déclarations fiscales et
sociales de travailleurs indépendants, elle a été amenée à se
pencher sur le fonctionnement du RSI qu’elle qualifie
d’ « escroquerie en bande organisée »… Ce système de perversion
kleptocratique s’exténue, à force de sur-accumulation infondée
et de plus en plus visible, vers son auto-destruction annoncée, à
ce qu’il semblerait : y aurait-il précisément des limites à
l’acceptation de la spoliation et de la misère organisée ?

Michel Loetscher
Pour hebdoscope décembre 2016

Eloïse Benhammou,
Kleptocratie française,
Le Jardin des Livres