Rencontres au sommet

A la tête de l’orchestre de la radio bavaroise, Leonard Bernstein fait revivre le répertoire romantique

Les 13 et 14 juin 1987, le chef américain Leonard Bernstein donnait l’un de ses derniers concerts à Munich. Il lui restait un peu plus de trois ans à vivre. Barré par Karajan à Berlin, il fit de la capitale bavaroise, le temple musical de sa vision du répertoire romantique allemand. A l’image de ce qu’il élabora avec Mahler à Vienne mais avec un orchestre moins massif, moins titanesque dirons-nous,  Bernstein use ici, dans cet enregistrement de la « Grande » de Schubert, de la même approche, à la fois solaire avec des tempos très lents tout en conservant ce lyrisme qu’il lui était propre. Cela donne une symphonie assez exceptionnelle, sorte d’océan musical avec ses grandes vagues furieuses, immenses contenant cette fouge qu’il lui est propre. Un océan où se déploient de magnifiques chevaux marins comme sortis des profondeurs et dont le galop est comme emprunt d’un rythme presque « jazzy ».


Car de l’aveu même du chef d’orchestre , il y a un jazz Schubert. C’est ce qu’il dévoile dans le CD qui accompagne cette interprétation. Petite pépite tirée des archives de la radio bavaroise, les répétitions du chef avec l’orchestre durant ces deux jours se dégustent. De son appréciation du motif d’ouverture au cor du premier mouvement par Johannes Ritzkowsky à ses conseils aux membres de l’orchestre, cet enregistrement traduit une complicité captivante entre le chef et son orchestre.

Autre figure du romantisme allemand, Schumann appartient quant à lui pleinement au répertoire de Leonard Bernstein, un répertoire qu’il a interprété et gravé sur le disque à de maintes reprises en particulier avec son orchestre du New York Philharmonic dans cet enregistrement désormais culte de 1960 (Sony). Celui que le Symphonieorchester des Bayrischen Rundfunks nous propose de la seconde symphonie dite du Printemps date quant à lui de novembre 1983. Une fois de plus, générosité et lyrisme y sont manifestes. Générosité avec cette dimension pastorale que Bernstein déploie d’une manière post-romantique. Lyrisme ensuite avec sa vision tellurique qui donne l’impression d’être parfois dans la cinquième symphonie de Gustav Mahler. Le jazz vient naturellement clore ces enregistrements avec son propre Divertimento plein de couleurs éclatantes comme pour nous rappeler qu’il fut également un compositeur capable de transcender ses interprétations.

Par Laurent Pfaadt

Leonard Bernstein, Schubert Symphonie N°8 C-Dur, The Great, Symphonieorchester des Bayrischen Rundfunks, « Conductors in rehearsal », 2 CD
BR Klassik

Leonard Bernstein, Schumann Symphonie N°2 Symphonieorchester des Bayrischen Rundfunks
BR Klassik