25 août 1985. Un homme monte sur la plus haute marche du podium du Grand Prix des Pays-Bas. Pour la dernière fois de sa carrière. Après ce jour, il faudra attendre 35 ans et un enfant du pays pour revivre une telle scène.

Cet homme n’est autre que Niki Lauda, l’homme qui six ans plus tôt a survécu aux flammes, l’homme qui est allé en enfer et en est revenu pour reprendre le titre anglais de ses mémoires. Comme un passage de témoin, il laisse derrière lui cette génération de pilotes qui allait dominer les années 80 et 90.
Ce jour-là, après un dernier duel avec son coéquipier chez McLaren, Alain Prost, Niki Lauda tire sa révérence sur ce circuit qui douze ans plus tôt avait vu Roger Williamson, autre martyr du sport automobile, entrer dans la mythologie de la F1.
Niki Lauda, lui, y est entré de son vivant. Ce fils de grands industriels viennois apprit très tôt à lutter pour survire. Contre son milieu social qui le destinait à tout sauf à être ce gladiateur des temps modernes. Il devait devenir un empereur du papier. Et pourtant nombreux furent les journaux et les livres qui chroniquèrent son sacre. Ce fut un autre jour d’août, en 1971, qu’il fit ses débuts en F1, chez lui en Autriche. Après des passages chez March et BRM, arrachant au passage une troisième place à Monaco, il se vit propulsé cavalier chez Ferrari. Bien avant Todt et Schumacher, il forma alors avec Daniele Audetto, l’un des duos les plus mythiques du paddock qui offrit à la marque en 1972 avec Clay Regazzoni un titre de champion du monde des constructeurs qui fuyait Ferrari depuis onze ans.
Lauda dut attendre 1975 pour glaner le premier de ses trois titres de champion du monde face l’Hesketh de Hunt et la McLaren de Fittipaldi. Puis vint cet autre jour d’août, celui de 1976 sur le circuit du Nürburgring. On connait tous la suite. Visage défiguré, poumons intoxiqués. Les commentateurs et les médecins ne donnèrent pas cher de sa peau. Et pourtant, son retour à Monza, sur les terres de Ferrari au volant de sa 312 T2, six semaines après l’accident avec, justement, cette nouvelle peau qui valait de l’or, surprit tout le monde. Tout le monde sauf lui. « Quand on se regarde dans le miroir après s’être brûlé le visage, soit on se suicide, soit on vit avec » dira-t-il plus tard dans le documentaire Lauda : The Untold Story (2014). Plus que vivre avec, il décida de vaincre avec. Et s’il laissa cette année le titre à James Hunt, il gagna une immortalité que livres et films entretiendront longtemps de part et d’autre du globe, d’Hollywood aux dessins animés japonais.
Deux titres supplémentaires (en 1977 avec Ferrari puis en 1984 avec McLaren) et le voilà à Zandvoort en ce 25 août 1985 pour gagner une dernière course et laisser derrière lui une ombre indélébile pareille à une fumée noire, une ombre qui ne quitta jamais le paddock et recouvrit l’écurie Mercedes et Lewis Hamilton de son influence protectrice avec l’idée que la volonté humaine peut vaincre tous les obstacles et même triompher de la mort. Une volonté qui, aujourd’hui encore, dépasse le simple cadre du sport pour faire de ce pilote d’exception, un héros contemporain.
Par Laurent Pfaadt
A lire :

Pour ceux qui souhaiteraient retrouver Niki Lauda en BD, on leur conseillera l’album de Michel Vaillant, 300 à l’heure dans Paris (1983) où avec sa McLaren, il affronte Vaillant, Prost et Pironi au pied de la Tour Eiffel ainsi que K.O pour Steve Warson (1979)
Daniel Ortelli, Loïc Chenevas-Paule, Jean-François Galeron, Les champions du monde de Formule 1, Casa éditions, 176 p.
A voir :
Rush de Ron Howard (2013)
Lauda : The Untold Story (2014) de Hannes Michael Schalle