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La Bible qui chante

L’opéra a désormais son ouvrage de référence.

nilsson

Il est un peu lourd à transporter mais n’en demeure pas moins indispensable. Les éditions Ullmann viennent ainsi de publier ce qui ressemble fort bien à l’ouvrage de référence que doit posséder tout mélomane qui se respecte.

Tout y est consigné : les œuvres, les compositeurs, les interprètes, les lieux. Il y a là bien entendu les incontournables : Mozart, Verdi, Wagner, Bellini, Donizetti, Carmen, la Traviata, Tristan et Isolde, la Flûte enchantée, etc. Mais on y trouve également des compositeurs nettement moins connus tels que Stockhausen, Nielsen ou Marschner qui composa Hans Heiling. Et à côté de ces opéras universellement joués, il y a ceux qui ont connu moins de succès ou ont été oubliés tels que Bastien und Bastienne de Mozart ou Vincent de Rautavaraa.

L’ouvrage placé sous la direction d’Andras Batta, directeur de l’académie de musique Franz Liszt de Budapest conjugue tous les goûts, du baroque au moderne en passant par le romantisme. Le Château de Barbe-Bleue de Béla Bartók côtoie ainsi le couronnement de Poppée de Monteverdi et La Belle Hélène de Jacques Offenbach. Extrêmement didactique, il permet aux non-spécialistes de comprendre la différence entre les différentes formes d’opéras : regia, bouffe et singspiel et aux plus avertis de découvrir un secret ou une anecdote.

L’ouvrage extrêmement bien illustré rappelle également la genèse de la création lyrique et l’évolution des interprétations des œuvres. Ainsi on apprend que Pavarotti adorait jouer Ernani de Verdi ou que Calaf dans Turandot de Puccini est l’un des rôles les plus héroïques jamais composés. Son côté histoire de l’opéra avec de nombreuses photos d’archives et morceaux de partitions est extrêmement instructif et on retrouve avec plaisir les grandes voix de l’opéra passées (Maria Callas, Birgit Nilsson, Teresa Berganza, Elisabeth Schwarzkopf, Enrico Caruso, Luciano Pavarotti, Placindo Domingo, Ruggerio Raimondi).

Cet ouvrage est véritablement un puits sans fond. En tournant chaque page, c’est une histoire, un air, une voix, un lieu, une passion, une rencontre ou un souvenir qui se rappelle au lecteur qui ne peut que refermer cet ouvrage à regret. Pour aussitôt, l’ouvrir à nouveau.

Andras Batta, Opéra : Compositeurs, œuvres, interprètes, Ullmann éditions, 2013
Par Laurent Pfaadt
Edition hebdoscope 1009, juillet 2014

Le tsar du violon

Le violoniste James Ehnes signe un nouveau disque consacré à la musique contemporaine russe.

Depuis près de vingt ans, James Ehnes, comparé par un critique canadien à Jascha Heifetz, confirme son exceptionnel talent. Après Paganini, Mozart, Bruch ou Elgar, il nous revient avec un disque consacré à Aram Khatchaturian.

Compositeur connu en France essentiellement pour la danse du sabre de son ballet Gayaneh, Aram Khatchaturian (1903-1978) a longtemps pâti de son image de compositeur « officiel » du régime soviétique quand d’autres comme Chostakovitch par exemple ont eu des rapports plus ambigus avec l’URSS et Staline en particulier.

Couronné par le Prix Staline en 1941, le concerto pour violon dédié à David Oïstrakh rendit Khatchaturian célèbre dans le monde entier. L’œuvre marquée par un profond lyrisme est interprétée avec briopar James Ehnes et le Melbourne Symphony Orchestra même si on perçoit rapidement que le soliste domine outrageusement l’orchestre.

Grâce à sa parfaite virtuosité, James Ehnes et son Stradivarius Ex-Marsick de 1715, parvient magnifiquement à extraire toute la pureté du son, offrant ainsi un sentiment de plénitude qui n’est pas sans rappeler l’interprétation du violoniste russe Leonid Kogan. Comme dans ses disques précédents, la magie que délivre James Ehnes permet de transcender l’oeuvre. On est subjugué par son violon notamment dans cet Allegro vivace où notre virtuose se laisse entraîner dans cette frénésie musicale sans lui résister. L’orchestre australien trouve à ce moment son point d’équilibre et accompagne merveilleusement le violon.

Le disque est complété par des quatuors de Chostakovitch où James Ehnes retrouve ses compères du quatuor Ehnes. Ils parviennent à faire ressortir cette mélancolie absolue contenue dans ces œuvres Shostakovitch en particulier dans le 7e quatuor que le compositeur dédia à sa première femme disparue brutalement.

Au final, ce disque permet à la fois de mesurer l’exceptionnel talent du violoniste canadien et de redécouvrir une œuvre méconnue et pourtant digne des plus grands concertos.
james ehnes

Khachaturian : Violin Concerto
Shostakovich: String Quartets 7 and 8 James Ehnes (violin)
Melbourne Symphony Orchestra/Mark Wigglesworth, Ehnes Quartet (Onyx)
Par Laurent Pfaadt

Edition hebdoscope 1009, juillet 2014

Une vieille dame qui se porte bien

Pour sa 75e édition, la Quinzaine musicale de San Sebastien affiche une programmation à la hauteur de sa réputation.

 

Plus vieux festival de musique classique d’Espagne, la quinzaine musicale fêtera cet été (1-31 août 2014) sa 75e édition. Créée en 1939 alors que venait de s’achever une guerre civile qui déchira le pays, la Quincena Musical Donostia-San Sebastian entama avec la 8e symphonie « Inachevée » de Schubert cette aventure musicale unique qui perdure encore aujourd’hui. Nombreux ont été les grands noms à avoir fait entendre leur talent (Christoph von Dohnányi, Valéry Gergiev, Igor Markevitch, Ivo Pogorelich, Yehudi Menuhin, Mstislav Rostropovitch ou Narciso Yepes pour ne citer que ces exemples) dans les différents lieux de la perle du Cantabrique. Du palais de Miramar au nouvel auditorium du Kursaal dessiné par l’architecte Rafael Moneo qui remplaça l’ancien casino en passant par le théâtre Victoria Eugenia, la Quinzaine Musicale demeure chargée de souvenirs

Côté musique cette année, les organisateurs ont voulu renouer avec les origines. Ainsi, l’orchestre symphonique d’Euskadi (22 août) et l’Orpheon Donostarria, véritables âmes basques de la Quinzaine animeront plusieurs concerts. L’orchestre national du Capitole de Toulouse sous la baguette de son chef Tugan Sokhiev viendra en voisin interpréter les oeuvres de Berlioz, Grieg et Moussorgski accompagné notamment par la pianiste russe Elisabeth Leonskaya (1er et 2 août).

Plusieurs grands chefs de renommée internationale feront le déplacement. Tout d’abord, John Eliot Gardiner et son English Baroque Solists et le Monteverdi Choir (5 août) – ce dernier célébrant son demi-siècle d’existence – ont inscrit la Quinzaine musicale dans leur tournée européenne qui devrait s’achever le 6 octobre à Paris. Renouant avec l’héritage baroque de la Quinzaine, l’ensemble fera retentir Bach, Haendel et Scarlatti dans le Kursaal. Le prodige québécois, Yannick Nézet-Séguin, chef principal depuis 2012 de l’orchestre de Philadelphie, conduira à cette occasion l’orchestre philharmonique de Rotterdam pour trois concerts, le premier consacré à Mahler (24 août), le second au Requiem de Verdi (26 août) et le troisième avec l’extraordinaire pianiste américain Emanuel Ax dans le premier concerto de Brahms (27 août). Enfin, Ivan Fischer, dernier héritier de la grande tradition de la direction d’orchestre hongroise (Reiner, Szell ou Dorati) et ayant dirigé les plus grands orchestres du monde, sera une nouvelle fois à la tête de son orchestre du festival de Budapest à l’occasion de deux soirées particulièrement attendues au cours desquelles il dirigera les troisième et quatrième symphonies de Brahms (30 août) avant d’achever en forme d’hommage cette édition prestigieuse de la Quinzaine musicale par la huitième symphonie de Schubert (31 août).

Enfin, l’opéra et la danse ne seront pas oubliés puisque la Bohème de Puccini qui partageait l’affiche de la première édition sera donnée les 15 et 17 août et la compagnie de Victor Ullate complètera cette programmation qui promet d’ores et déjà d’être riche en sensations et surtout en émotions.
Rotterdams 12 Agosto 31

La Quincena musical, Donostia-San Sebastian (Espagne), 1-31 août 2014.

Retrouvez toutes les informations sur www.quincenamusical.com
Par Laurent Pfaadt

 

Edition hebdoscope 1009, juillet 2014