Sélection Festival America

Sortis à l’occasion de la rentrée littéraire ou plus anciens, Hebdoscope vous propose une sélection d’ouvrages d’auteurs présents au Festival America de Vincennes


Hernan Diaz : Trust, traduit de l’anglais par Nicolas Richard, Points, 456 p.

Prix Pulitzer 2023, Trust raconte l’histoire du magnat de la finance Benjamin Rask qui s’est enrichi après l’effondrement de Wall Street. Mais qui est-il réellement et pourquoi est-il si secret ?

Pour connaître l’épilogue de ce roman, le lecteur devra en permanence remettre en cause ces certitudes car en maître des illusions, Hernan Diaz, ne lui épargnera rien. Alternant plusieurs voix littéraires sous la forme de quatre processus littéraires absolument stupéfiants, Trust est un véritable tourbillon littéraire. Grand livre sur le rapport à l’argent, Trust montre également à quel point la réussite peut bien souvent devenir une cage.

Katja Schönherr, La famille Ruck, traduit de l’allemand par Barbara Fontaine, éditions ZOE, 352 p.

Présent dans la première sélection du prix Médicis étranger, La famille Ruck raconte l’histoire d’une famille ordinaire d’ex Allemagne de l’Est. A l’occasion d’un été où il a dû revenir auprès de sa mère malade, Carsten, directeur marketing à Berlin et pas très enchanté de se coltiner cette dernière, emmène avec lui sa fille Lissa, une ado chiante à mourir. Voilà donc nos trois générations réunies sous le même toit pour un jeu de massacres jubilatoire grâce au talent littéraire de Katja Schönherr. Tiraillée entre ses désirs personnels et ses obligations familiales, la cohabitation s’annonce périlleuse entre quolibets réprobateurs et autres mesquineries.

Une comédie sociale où l’on passe son temps à détester puis à aimer nos trois personnages. Un livre génial quoi.

Aleksandar Hemon, Un monde de ciel et de terre, traduit de l’anglais par Michèle Albaret-Maatsch, Calmann-Levy,

Qui a dit que l’amour était plus fort que tout ? Plus fort que les différences culturelles. Plus fort que les stéréotypes. Plus fort que l’Histoire. Aleksandar Hemon assurément. Dans ce roman puissant qui a remporté l’an passé le Grand prix de littérature américaine, l’auteur américain d’origine bosnienne nous emmène dans une fresque incroyable à travers la première partie de ce 20e siècle sanglant ayant débuté à Sarajevo. Deux hommes, Rafael, juif séfarade et Osman, un bosniaque musulman servant tous deux dans l’armée austro-hongroise, se rencontrent en Ukraine et tombent amoureux. Ce duo devient bientôt trio avec Rahela, la fille d’Osman devenue « leur fille » et que Rafael protégera envers et contre tout.

D’une plume épique qui rappelle parfois les films de Terence Malick avec ses successions de moments de grâce et de violence inouïe, Aleksandar Hemon nous emmène dans un voyage littéraire unique, magnifique au son de la sevdah, cette musique traditionnelle bosnienne et des multiples langues dispensée par ce coryphée littéraire, des prisons de Tachkent à Jérusalem en passant par Shanghaï et la vallée de Ferghana pour faire revivre ce passé qui a disparu. Inoubliable.

Stephen Markley, Le Déluge, traduit de l’anglais par Charles Recoursé, Albin Michel, 1056 p.

Comment ne pas passer à côté du Déluge de Stephen Markley, petit prodige de la littérature américaine, auteur d’Ohio qui remporta en 2020, le Grand prix de littérature américaine et est en cours d’adaptation télévisée ? Dans ce deuxième roman aux allures de fresque écolo qui coure sur un quart de siècle, l’auteur nous emmène au début de ce 20e siècle bouleversé par le réchauffement climatique en compagnie de personnages certes hétéroclites mais qui illustrent, chacun à leur manière, les défis représentés pour chacun de nous par le changement climatique et leurs conséquences politiques, économiques et sociales.

Avec son écriture cinématographique qui le fait ressembler à un film catastrophe de trois heures signé Roland Emmerich, ce romanest un véritable page-turner. Sorte d’arche de Noé contemporaine regroupant les différentes sensibilités de l’âme humaine, Le Déluge installe bel et bien Stephen Markley au sommet des lettres américaines. Une dystopie ? Non, un avertissement.

Dawnie Walton, Le Dernier Revival d’Opal et Nev, traduit de l’anglais par David Fauquemberg, Zuma, 512 p.

Prêt pour plonger dans le grand bain de la musique rock de la fin des années 60 ? A l’occasion du retour sur la scène musicale du célèbre duo Opal et Nev, le roman de Dawnie Walton, outre une savoureuse plongée dans les années 60, est avant tout une histoire de domination culturelle où comment les dominants écrivent l’histoire pour en exclure les dominés. A travers le prisme de la musique et de la culture pop qui réservera bien du plaisir aux lecteurs, Dawnie Walton fait voler en éclats, sur fond de lutte pour les droits civiques, nos certitudes et nos modèles culturels.

Immense succès littéraire aux Etats-Unis salué par Barack Obama et en cours d’adaptation en série télévisée, Le Dernier Revival d’Opal et Nev laissera dans votre esprit une petite mélodie littéraire que vous n’êtes pas prêt d’oublier.

Dario Diofebi, Paradise, Nevada, traduit de l’anglais par Paul Mathieu, Albin Michel, 656 p.

Un livre comme une partie de poker avec ses faux semblants, ses joueurs qui bluffent et cette tension qui monte tout au long de la partie. Cela tombe bien car notre auteur, joueur professionnel nous emmène dans l’hôtel Positano de Las Vegas qui vient d’exploser en compagnie de quatre personnages de prime abord différents mais qui cachent en réalité bien leur jeu que l’auteur dévoile habilement tout au long du récit.

Meilleur roman anglophone 2023 du magazine Transfuge, figurant parmi les 100 meilleurs livres de l’année 2023 du magazine Lire, vous ne lâcherez ce roman qu’une fois la dernière page lue.

Par Laurent Pfaadt