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Voces Suaves © Bertand Pichène
Voces Suaves © Bertand Pichène

Un enregistrement réhabilite le
compositeur
Maurizio Cazzati

Grâce au travail de fourmi entrepris par le Répertoire International des Sources Musicales (RISM) qui recense les œuvres musicales, il est possible de redécouvrir des partitions oubliées, des compositeurs méconnus qui pourtant furent très célèbres et joués au-delà de leur simple pays de résidence. C’est ainsi que la musique du compositeur italien Maurizio Cazzati (1616-1678) a traversé les frontières notamment les Alpes pour être entendue jusqu’au lieu de cet enregistrement, la collégiale St Michael de Beromünster dans le canton de Lucerne.

Maître de chapelle à Bologne puis à Mantoue, Maurizio Cazzati qui fut un contemporain de Monteverdi et de Cavalli, produisit une œuvre de 66 pièces essentiellement de musique sacrée. Sa Messa e Salmi op. 36 comprenant une messe, six psaumes et un Magnificat a ainsi été joué dans ce haut lieu de la musique baroque helvétique. Il n’en fallait pas moins au chef Francesco Saverio Pedrini, organiste reconnu et aux Voces Suaves pour s’emparer de cette œuvre et lui redonner, près de quatre siècles après sa première écoute,
une seconde vie.

Dans ce qui constitue une première mondiale, l’interprétation des œuvres de Cazzati frappe d’abord par leur beauté apaisante nimbée d’une espèce de plénitude. On est loin des Magnificat de Vivaldi ou de Bach qui impressionnent par leur grandiloquence. Ici, la voix de la Vierge portée admirablement par les sopranos Mirjam Wernli et Lia Andres, est plus intime, plus humaine dira-t-on, car elle semble émanée de l’intimité du foyer.

Le Gloria s’inscrit dans cette même atmosphère. Porté par la douceur des voix de l’ensemble vocal bâlois, il n’y a jamais de violence, jamais de brutalité, bien au contraire. A cette beauté s’ajoute une écriture musicale novatrice pour l’époque dans l’utilisation notamment de ritournelles qui sont utilisées comme des éléments constituants de la Messa ou du Gloria alors qu’à cette époque et notamment chez Monteverdi, elles ne font qu’ouvrir et fermer les œuvres.

La musique de Cazzati est accompagnée de plusieurs œuvres de
Sebastian Anton Scherer, compositeur baroque allemand, qui permettent d’apprécier toute la beauté de l’orgue de Beromünster bien servie au demeurant par une formidable prise de son qui concourt indiscutablement à la réussite de ce disque qui rendra justice à ce compositeur oublié.

Maurizio Cazzati, From Bologna to Beromünster,
Mass & Psalms op.36, Voces Vocals, Francesco Saverio Pedrini,
Claves Records, 2016.

Laurent Pfaadt