La plupart ne reviendront pas

Fils d’un industriel du textile, Eugenio Corti s’engagea à vingt ans dans l’armée italienne et demanda à être affecté, en 1942, sur le front russe. Sa littérature allait ainsi se nourrir de la guerre et de la débâcle des forces de l’Axe en URSS. Cette dernière, décrite dans La plupart ne reviendront pas, ouvrage paru en 1947 et que les éditions Noir sur Blanc republie aujourd’hui dans une nouvelle traduction revue et augmentée, servit de premier jet à son magnum opus, Le Cheval rouge, publié en 1983 et devenu depuis un monument de la littérature italienne.


Il y a dans ce récit glaçant de l’anéantissement de la 8e armée italienne lors de la grande contre-offensive du Don en 1943, des moments poignants, à la fois tragiques et héroïques. Ainsi seuls 30 000 des compagnons de Corti revinrent indemnes de la terrible retraite de l’hiver 1942-1943 où la Wehrmacht et leurs alliés notamment italiens furent repoussés, encerclés, anéantis. Mais surtout, derrière les mots, c’est le poids de l’Histoire sur les hommes qui donne à la prose de Corti toute sa force. Une volonté de relater, de ne pas trahir la mémoire des morts pour échafauder un monument littéraire dédié à ses compagnons d’infortune. C’est ce qui rend la littérature de Corti unique et consacra sa popularité de l’autre côté des Alpes. La plupart ne reviendront pas n’est pas uniquement un grand récit de guerre mais, à l’instar d’un Mario Rigoni Stern, une témoignage littéraire admirable célébrant les hommes dans la guerre.

Cette nouvelle édition vient ainsi consacrer à juste titre le retour d’un écrivain quelque peu oublié et pourtant fondamental dans la littérature du 20e siècle, à ranger indiscutablement aux côtés des Hemingway et Grossman.

Par Laurent Pfaadt

Eugenio Corti, La plupart ne reviendront pas
Aux éditions Noir sur Blanc, 320 p.