Le bureau d’éclaircissement des destins

La romancière Gaëlle Nohant possède un réel talent pour ressusciter le passé et le magnifier littérairement. Tout le monde se souvient de Robert Desnos dans La légende d’un dormeur éveillé (Héloïse d’Ormesson, 2017), récompensé par le Prix des libraires. En 2020, elle découvre l’existence des archives Arolsen situées en Allemagne et qui concentrent le plus grand nombre d’archives sur le génocide et en particulier les objets ayant appartenu à des personnes assassinées dans les camps. A partir de ces matériaux, elle va bâtir ce magnifique roman autour de l’histoire d’Irène, archiviste au sein l’International Tracing Service chargée de restituer ces objets aux descendants des victimes. A partir d’une poupée de chiffon, d’une alliance, d’un médaillon et d’un mouchoir brodé, Irène avance, et le lecteur avec, dans trois enquêtes parallèles qui vont se mêler à sa propre vie.

Le bureau d’éclaircissement des destins qui a remporté le Grand Prix RTL-Lire Magazine 2023 et fut finaliste du livre européen emportera ainsi son lecteur de Thessalonique à l’Argentine en passant par Paris, Varsovie et Berlin. Construisant une magnifique fiction à partir de cette solide documentation, son livre est un exemple remarquable du pouvoir de la littérature et de sa capacité à populariser des sujets complexes et méconnus mais également une nouvelle preuve de cette magie inépuisable des mots qui redonnent un nom et une vie aux disparus. Le bureau d’éclaircissement des destins est bel et bien cette symphonie des adieux devenue, sous la plume sensible de Gaëlle Nohant, un chant mahlérien appelant à la résurrection

Par Laurent Pfaadt

Gaëlle Nohant, Le bureau d’éclaircissement des destins
Le Livre de Poche, 432 p.