Archives de catégorie : Musique

Premier concert de la saison OPS

Beau programme lors de l’ouverture de la saison de l’OPS : outre l’amitié profonde et les liens de parenté qui les unissaient, Franz Liszt et Richard Wagner se seront, l’un et l’autre, présentés, dans la seconde moitié du 19e siècle, comme les promoteurs de la musique de l’avenir. Le jeudi 7 septembre, nous pûmes entendre le second concerto pour piano de Liszt donné par le pianiste russo-américain Kirill Gerstein et le Ring sans paroles de Richard Wagner, l’orchestre étant, pour les deux œuvres, dirigé par son chef Aziz Shokhakimov.


Ring sans paroles
© Grégory Massat

Écrit d’un seul tenant, le second concerto de Liszt offre ainsi l’allure d’un poème symphonique pour piano et orchestre. Quant au Ring sans paroles, il s’agit d’un arrangement dû au  chef d’orchestre et compositeur Lorin Maazel qui, en 1987, puisa dans le matériau sonore des quatre opéras de l’ Anneau du Nibelung de Richard Wagner, de quoi composer, là aussi, un grand poème symphonique d’une durée de quatre vingt minutes. La tétralogie de Wagner, sous sa forme opératique, dure quant à elle au moins quinze heures. Maazel la connaissait, c’est le cas de le dire, sur le bout des doigts puisqu’il lui arriva de la diriger par cœur (!) au festival de Bayreuth, où les opéras de Wagner sont, chaque été, donnés de manière rituelle dans le théâtre que lui construisit le jeune roi Louis II de Bavière. Rédigé par le compositeur lui-même, le livret du Ring est inspiré de la mythologie germanique et nordique. Il raconte les réactions en chaîne résultant du vol de l’or des filles du Rhin par le gnome Alberich. Véritable allégorie sur l’effondrement de la société et du  pouvoir, il peut se lire comme une critique de la civilisation marchande d’inspiration socialisante, matinée au demeurant de quelques touches d’un antisémitisme, courant à l’époque. De ce gigantesque ouvrage, Maazel a tiré une belle partition où les voix sont, le cas échéant, remplacées par des solos de bois ou de cuivres. C’est notamment le cas lors de l’entrée des dieux au Vahlalla, fort réussie, quand le trombone solo remplace la voix de Loge, nouant un très beau dialogue avec les cors. La première moitié de l’œuvre, puisant dans les deux premiers opéras, L’Or du Rhin et La Walkyrie, est particulièrement prenante, faisant preuve d’imagination et d’imprévu dans l’enchainement des fragments. Une fois passés les murmures de la forêt, tirés du troisième opéra Siegfried, toute la partie extraite du dernier volet Le Crépuscule des dieux sonne en revanche de manière bien plus conventionnelle, se contentant d’enchainer les parties symphoniques bien connues que sont le voyage de Siegfried sur le Rhin, la marche funèbre et l’incendie du Vahlalla. On regrette notamment que les belles parties méditatives du second acte du Crépuscule ou de la scène finale du troisième acte n’aient pas été retenues par Maazel : elles auraient constitué une salutaire accalmie sonore dans une dernière demi-heure où l’on joue forte presque tout le temps.

Toujours est-il que cette partition, souvent exigeante pour l’orchestre, aura montré celui-ci en très bonne forme : le bref mais difficile fragment de la chevauchée des walkyries témoigne, à lui tout seul, du niveau de l’orchestre que nous avons la chance d’avoir. L’interprétation d’Aziz Shokhakimov mit l’accent sur le dramatisme puissant de l’œuvre, de façon judicieuse même si on eût parfois aimé un peu plus de fluidité, comme au début de L’Or du Rhin, ou de lyrisme, lors des adieux  de Brünhilde et de Wotan.

Le concert avait donc débuté avec le second concerto pour piano et orchestre de Liszt, sûrement une de ses meilleures œuvres. La partie médiane est d’une grande beauté contemplative. Mais ce furent surtout les aspects tourmentés du début et ceux, combatifs et héroïques, de la fin qui ressortirent sous les doigts de Kirill Gerstein. Chef et orchestre se sont accordés avec le piano. Abordé ainsi, il émane de ce concerto un climat anticipant quelque peu ceux de Prokoviev.

                                                                                   Michel Le Gris

A chaque fois qu’on me donne des bandes, j’ai l’impression qu’on me remet des toiles de maîtres que personne n’a jamais vu

Frédéric d’Oria-Nicolas, co-fondateur et directeur général de The Lost Recordings nous raconte l’extraordinaire aventure de ce label spécialisé dans l’édition de concerts oubliés.


Frédéric d’Oria-Nicolas
  • Comment l’aventure The Lost Recordings a-t-elle débuté ?

J’ai été pianiste pendant vingt ans. J’ai joué sur les scènes de quarante-deux pays et j’ai toujours été passionné par les techniques de captation du son notamment sur des vinyles. Travaillant avec l’entreprise Devialet sur la restauration d’enregistrements mythiques, je fais un jour la connaissance de Michel Navarra, le fils d’André Navarra, le célèbre violoncelliste français. Je lui demande s’il veut bien m’aider à retrouver les bandes de son père. Il accepte et on retrouve ces dernières à Prague, à Londres, à Berlin, à Amsterdam. Là-bas, au Media Park, sorte d’INA néerlandais, la personne entendant la qualité de notre musique restaurée, vient vers nous et nous dit : « vous savez qu’ici on a des centaines d’inédits ! » On se regarde avec André Navarra, c’était impensable. On lui dit « mais comment ça des inédits ? » Le type voyant notre scepticisme remonte alors sur un charriot des dizaines de bandes avec des enregistrements d’Ella Fitzgerald, d’Oscar Peterson, de Sarah Vaughan, etc. On installe les bandes, on les écoute et on est complétement abasourdi. On se dit mais ce n’est pas possible, il ne s’agit pas d’inédits. On vérifie et effectivement ces enregistrements n’avaient jamais été publiés.

  • Que ressent-on à cet instant précis ?

Une des plus grandes émotions de ma vie. Je me souviens du premier titre que j’ai écouté, Everything must change de Sarah Vaughan. On était complètement transcendé. Et à chaque fois qu’on me donne des bandes, j’ai l’impression qu’on me remet des toiles de maîtres que personne n’a jamais vu. Encore aujourd’hui je ne comprends pas comment cela est possible. Comment ces trésors ont pu dormir sur des étagères pendant des décennies sans que personne ne fasse rien.

  • Après ces découvertes, vous allez alors de surprise en surprise…

Oui parce qu’on pense d’abord qu’il s’agit d’un phénomène isolé. Pas du tout, il y en a partout ! On se dit qu’on a entre les mains de véritables pépites. Un patrimoine musical oublié. Et qu’il faut absolument faire quelque chose. Après Navarra, on sort alors plusieurs albums dont ceux découverts à Amsterdam et le succès est immédiat.

Pourtant, il faut dire qu’il est très difficile d’identifier ces albums. Il n’y a pas de base de données commune, qu’il y a des erreurs dans les classements, les noms d’artistes, les dates. Les archivistes ne sont pas remplacés et ceux qui restent doivent être convaincus. Car au début, ils voulaient nous donner des copies. Enfin cela coûte très cher.

  • Pourquoi ?

Parce qu’on se déplace avec tout notre matériel, en voiture ou en camionnette la plupart du temps pour transporter nos magnétophones qui pèsent plusieurs dizaines de kilos, mais également les enceintes, les câbles. Et puis on ne peut pas sortir les bandes. Donc, il faut être sur place, dans l’enceinte du lieu de conservation.

Et puis, il faut trouver un équilibre économique. Après notre découverte, je suis allé voir les majors pour leur parler de mon projet. Beaucoup m’ont répondu : « c’est super mais ça ne marchera jamais ». Elles se sont complètement trompées car on est totalement indépendant. On cherche, on restaure, on fabrique. On a nos clients, notre réseau de distribution, notre propre site internet. On ne dépend de personne.

  • Aujourd’hui vous continuez à sillonner l’Europe à la recherche de nouveaux enregistrements ?

Oui. On travaille avec la BBC, la RBD à Berlin, à Amsterdam. On reçoit des lettres de fans, de mélomanes du monde entier pour nous donner des contacts où trouver des enregistrements. A Buenos Aires ou ailleurs. J’ai l’impression d’être Indiana Jones. C’est passionnant.

  • Des archéologues de la musique en quelque sorte

Oui, cela s’apparente effectivement à de l’archéologie car vous n’avez aucune garantie. Vous creusez mais vous ne savez pas ce que vous allez trouver. Et puis, il y a beaucoup de déchets. Les gens s’imaginent qu’on trouve des pépites tous les quatre matins ce qui n’est pas le cas. Sur des centaines et des centaines de pages de données, on sélectionne peut-être 5% et dans ce pourcentage, il y a une pépite sur dix. On écoute des centaines d’heures de musique. Lors de notre dernier déplacement à Berlin, on est resté douze jours et on a sorti plus de soixante enregistrements. Et sur ces soixante, on en a sélectionné peut-être cinq dont un Callas, un Erroll Garner et un Dexter Gordon.

Pour autant, il y a des trésors partout. J’adorerai trouver des bandes à Moscou notamment en classique. Mais avec leur administration et maintenant la guerre, c’est devenu impossible. Notre quête est sans fin, on en a pour des années à tout chercher. Donc nos aventures ne sont pas près de s’arrêter !

Interview par Laurent Paadt

Festival et Salon RACCORD(S)

La Bellevilloise – 19-21, rue Boyer, 75020 Paris

Né à l’initiative des Éditeurs associés, une association qui depuis 2004 mutualise des compétences entre éditeurs de petites et moyennes tailles et travaille à faire connaître leurs catalogues tout en plaçant le livre et la lecture au centre de leurs démarches, le festival Raccord(s) fête le livre et la lecture chaque année, crée des espaces de dialogue avec d’autres formes d’art et de savoir et invite le public à découvrir les ouvrages sous une forme originale : lecture théâtrale, performance, exposition, atelier, spectacle jeunesse, danse, balade ou dégustation qui se doublent d’un salon pour rencontrer et découvrir la production des éditeurs indépendants participants. L’entrée est libre et gratuite à toutes et tous, enfants comme adultes.

Pour fêter ses dix ans d’existence, la programmation du festival se met en mouvement : concerts, lectures musicales et dansées, atelier pour les grands et pour les petits, débats, déambulations, signatures, et bien d’autres surprises. La partie salon de l’événement prend elle aussi de l’ampleur avec une sélection remarquable de 42 maisons d’édition indépendantes venues de France, mais aussi de Belgique, de Suisse, d’Italie, du Canada, et du Brésil parmi lesquels Aux Forges de Vulcain à qui on doit Le soldat désaccordé de Gilles Marchand, prix des libraires 2023, La Contre Allée et les éditions de la Peuplade dont les livres Mississippi de Sophie Lucas et Le compte est bon de Louis-Daniel Godin figurent dans la première sélection du prix Wepler 2023, Hélice Hélas qui remporta avec Nétonon Noël Ndjékéry (Il n’y a pas d’arc-en-ciel au paradis) le prix Hors Concourt 2022, les éditions du Sonneur qui publie l’émouvant Ni loup ni chien de Kent Nerburn et bien d’autres encore qui réserveront à coup sûr de merveilleuses rencontres littéraires .

Par Laurent Pfaadt

Festival et Salon RACCORD(S) 10e édition
du 14 et 15 octobre 2023

Retrouvez toute la programmation de Raccord(s) sur les réseaux sociaux :

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Les héros étaient en blanc

La 45e édition du festival de Marciac a réuni quelques grands noms de la musique mondiale

Qui aurait pu prédire, il y a quarante-cinq ans, qu’un modeste festival de jazz perdu en pleine campagne gersoise réunirait les plus grandes stars du rap, du jazz, du rock, de l’afro beat et de la world musique ? On aurait ri des délires de ce jeune rêveur passionné de musique certes mais un peu barjot. Et pourtant, le rêve est non seulement devenu une réalité mais se prolonge depuis près d’un demi-siècle. Et comble de l’audace, voilà que toutes ces stars ont été réunies en une seule édition !


C’est la légende du rap français, Mc Solaar qui ouvrit le bal en forme de panthéon de cette 45e édition avant d’être suivi par Ben Harper venu offrir les titres de son dernier album, Wide Open Light et Nora Jones qui a envoûté le public du chapiteau. Ce dernier était ainsi prêt à accueillir la star du jazz Grégory Porter qui, une fois de plus, a fait honneur à sa réputation avec une musique alliant charme et rythme. Payant de sa personne, le chanteur, ayant revêtu un costume crème, a été à la hauteur de l’évènement.

Gilberto Gil
© Sanaa Rachiq

Puis vint le boss du festival, Wynton Marsalis. Fidèle à lui-même, alliant autorité et humilité chevillés à la trompette, il rendit hommage à son prédécesseur à la tête du festival, Guy Laffite. Accompagné d’une véritable dream team avec notamment la magnifique flutiste/saxophoniste italienne Alexa Tarantino avec laquelle il donna quelques duos d’une incroyable beauté, il joua quelques-uns de ses plus grands tubes dans un extraordinaire déluge musical si bien que celui qui se déversait au dehors au même moment dut s’arrêter. Mais les miracles des hommes en blanc, se tenant sur l’Olympe du jazz, ne faisaient que commencer. Et tel un Corcovado de la musique, les bras en croix avec sa guitare céleste, Gilberto Gil accompagné de sa family, vint ravir le cœur des festivaliers. Comme une vague bruissant d’une fureur languissante, son arrivée fut suivie d’une acclamation générale pour celui qui confesse bien volontiers que « Marciac est une espèce de maison pour moi ». La communion du Corcovado pouvait commencer. Du Brésil à « Touche pas à mon pote ! » qu’il composa pour SOS Racisme en 1985 en passant par des rythmes reggae avec la reprise d’une chanson de Bob Marley en portugais, Gilberto Gil qui céda volontiers la scène à plusieurs membres de sa famille reçut un accueil à la hauteur de sa générosité.

Pourtant, le festival n’avait encore rien vu, oh non ! En clôture, il avait invité un autre homme en blanc, celui qui, depuis des décennies, célèbre à coups de kalashnikov, les mariages et, avec la même verve, les enterrements. Et pour ces noces de vermeil (45 ans), il avait décidé d’inviter la Terre sainte, rien que cela ! Trois violonistes juif, chrétien et musulman portant un orchestre au diapason ont ainsi fait monter les spectateurs sur leurs chaises dans une allégresse générale. On se frappa des cuisses secouées de spasmes et on battit frénétiquement la mesure. Morceaux de son nouvel album et succès passés notamment tirés des films d’Emir Kusturica mélangés à des rasades de vodka – on l’espère factice – et caisse claire balkanique composèrent l’élixir divin de ce Dionysos de la world musique. La salle, chauffée à blanc et vibrionnante, était prête à se donner corps et âme au dieu de l’afro beat, Femi Kuti et à son énergie folle qui entama le concert par un « Ready to groove ? » qui tenait plus de la constatation que de l’invitation. 

Robin Mc Kelle
©Sanaa Rachiq

Il y eut bien évidemment quelques belles surprises durant ce festival. A côté de nos prestigieux invités, des artistes moins connus – en tout cas du public français – ont fait entendre leurs voix et leurs musiques inoubliables. La très belle Robin Mc Kelle qui naquit dans ce berceau divin avait presque un air de Fairuz jazzy tandis que le Raynald Colom Five Stars associant cinq talents dont Francesco Cafiso, saxophoniste à la Corto Maltese, concocta pour le festival un projet musical hallucinant. Quant à Cécile McLorin Salvant, artiste plurielle, elle fit entendre sa musique aux mille et une influences : française, américaine, haïtienne entre Aragon, Léo Ferré et standards de jazz. Tous ces artistes ne seraient rien sans des instrumentistes de génie, ces bardes au service des dieux de la musique, parfois dans l’ombre mais dont la lumière n’en fut pas moins éclatante durant ces trois semaines. Avertis ou néophytes ont ainsi pu s’extasier devant la transe de Weedie Braimah, percussionniste de Cécile McLorin Salvant avec son côté Nusrat Fateh Ali Khan ou Kristin Korb, cette étoile basse venue du Montana qui a l’habitude de contempler ces montagnes où se tiennent les génies et qui, au sein du Raynald Colom Five Stars, sut dispenser son éclat durant cette éclipse d’un soir.

Goran Bregovic
©Sanaa Rachiq

D’autres génies sont restés dans cette ombre qu’ils servent avec passion, ces centaines de bénévoles qui, des brigades propreté à la billetterie en passant par les chauffeurs et les préposés aux foodtrucks, parfois vêtus de blanc comme leurs idoles, ont fait de cette 45e édition plus qu’un succès, un moment inoubliable pour tous.

Zeitgenuss Karlsruhe

Festival für Musik unserer Zeit

Vom 12.–15. Oktober 2023

DONNERSTAG, 12.10.2023

Workshops und öffentliche Proben

11–17 Uhr Hochschule für Musik Karlsruhe CampusOne – Schloss Gottesaue

Räume werden auf dem aktuellen Tagesplan bekannt gegeben.

EINTRITT FREI

ZeitGenuss_EINS
Jubiläumskonzert 30 Jahre ALEPH Gitarrenquartett

ALEPH Gitarrenquartett
© Sabine Haymann

19:30 Uhr

Hochschule für Musik Karlsruhe CampusOne – Schloss Gottesaue Wolfgang-Rihm-Forum

ALEPH Gitarrenquartett Andrés Hernández Alba Tillmann Reinbeck Wolfgang Sehringer Christian Wernicke

SAM•ComputerStudio der Hochschule für Musik Karlsruhe, Klangregie

Hans-Peter Jahn, Moderation

Dominika Szope, Leiterin des Kulturamtes der Stadt Karlsruhe: Grußwort
Prof. Dr. Matthias Wiegandt, Rektor der Hochschule für Musik Karlsruhe: Grußwort

Uraufführungen von Birke Bertelsmeier, Ludger Brümmer, Huihui Cheng, Arturo Fuentes, Irene Galindo Quero, Zeynep Gedizlioğlu, Malte Giesen, Núria Giménez-Comas, Sara Glojnarić, Georg Friedrich Haas, Alberto Hortigüela, Markus Hechtle, Manuel Hidalgo, Nikolaus A. Huber, Peter Jakober, Jens Joneleit, Bernhard Lang, Sophie Youjung Lee, Yunseck Lee, Yangkai Lin, Jörg Mainka, Helmut Oehring, Jaime Reis, Franz Ferdinand August Rieks, José María Sánchez-Verdú, Martin Smolka, Mathias Spahlinger, Lisa Streich, Erika Vega, Gerhard E. Winkler, Fredrik Zeller.

15 Euro | 10 Euro (erm.)

Quatre garçons dans la tempête

Deux ouvrages reviennent sur l’histoire du groupe de heavy metal Metallica

Il y a tout juste quarante ans, quatre jeunes californiens inconnus sortaient leur premier album. Baptisé Kill Em all (Tuez-les tous), celui-ci allait non seulement devenir culte avec des titres comme Seek and Destroy ou Whiplash désormais entonnés à chaque concert, obtenir cinq étoiles du magazine Rolling Stone mais surtout signer le point de départ d’une incroyable aventure musicale qui allait conduire le groupe à remporter dix Grammy Awards – plus qu’Elvis Presley, James Brown ou The Police – et à remplir des stades entiers.


James Hetfield aux Monsters of Rock, 1987 

The Four Horsemen, titre de l’une des chansons de Kill Em all, est devenu le surnom de ce quatuor porté par la voix et les compositions de James Hetfield et la batterie unique d’un Lars Ulrich. Le livre de Marc Aumont évoque ces premières années qui suivirent la naissance du groupe en 1981 après la fameuse annonce dans un journal local de Los Angeles d’un Lars Ulrich recherchant d’autres musiciens. Deux membres fondateurs (Hetfield, Ulrich) qu’une nouvelle annonce porta à trois avec le recrutement de Dave Mustaine, « l’imprévisible », qui claqua la porte deux ans plus tard, avant l’enregistrement de Kill Em All, remplacé par Kirk Hammett, ancien élève de Joe Satriani. Cliff Burton, le bassiste, rejoignit le trio pour former la version première de Metallica qui produisit deux albums de légende : Ride the lightning (1984) avec notamment For Whom the Bell Tolls et Creeping Death puis surtout Master of Puppets (1986) dont la chanson éponyme est devenue l’un des titres phares de la série Stranger things.

Embarqué dans les bus et les avions de ces concerts et ces tours sans fin, ce livre passionnant suit pendant près de quatre décennies, le groupe sur la route, des petites salles lors de la conquête de l’ouest des Etats-Unis à l’été 1983 aux stades et autres grandes messes en plein air comme cet incroyable concert, cette « démesure totale » comme le rappelle Marc Aumont, donnée sur la base aérienne de Tuschino près de Moscou quelques mois avant la chute de l’URSS en 1991 et drainant près d’un million de fans ! Bien évidemment l’ouvrage ne fait pas l’impasse sur les crises que traversa le groupe. La drogue et l’alcool qui conduisirent au départ de Dave Mustaine qui fonda Megadeth. La mort de Cliff Burton dans un accident de bus, remplacé par Jason Newsted qui fit des merveilles sur And Justice for all et le Black Album avant son départ, remplacé par l’actuel bassiste, Robert Trujillo.

Tout au long de ces quarante années, le son de Metallica a évolué mais le point de bascule fut atteint à l’occasion du Black album vendu à trente millions d’exemplaires et qui fit entrer le groupe dans une dimension planétaire avec leurs titres Nothing else matters ou The Unforgiven. Certains y ont vu un reniement. D’autres, une consécration. A cette occasion, le photographe Ross Harlin suivit le groupe durant les deux années de leur tournée planétaire, entre 1991 et 1993, et en tira un livre incroyable de photographies en noir et blanc. Souvent inédites, elles montrent le groupe entre Djakarta et Turin, entre Jacksonville en Floride et Mexico, sur la route, en backstage ou à travers de magnifiques portraits. Moscou est à nouveau présente mais à la foule de Tuschino, Ross Halfin a préféré des scènes plus intimes comme la pose d’un Lars Ulrich devant un drapeau de Lénine. Ou ce magnifique cliché pris à Denver dans le Colorado de ce même Ulrich répondant au téléphone sans savoir qui se trouve au bout du fil. Robert Trujillo, alors bassiste de Suicidal Tendencies qui assurait à cette époque les premières parties du groupe californien, et livre sa perception extérieure du Black Album, considère ainsi que Ross Halfin apporte avec ses clichés « une touche et une approche uniques à ce que l’on peut appeler l’œil du cyclone de tout concert de rock’n’roll ».

Kirk Hammett en répétition à Copenhague
Photograph : Ross Halfin

Le photographe dévoile ainsi les hommes derrière leur musique. Les liens d’affection entre James Hetfield et Lars Ulrich explosent littéralement, le côté secret d’un Kirk Hammet qu’il rompt uniquement en concert, est émouvant. Devenus les personnages d’une histoire et d’un voyage photographiques, Ross Halfin restitue dans ses pages une atmosphère assez unique.

Ce livre, magnifique, enchantera aussi bien les fans du groupe que les simples amateurs de musique, conscients de se trouver devant l’un des mythes de la musique, à ranger définitivement aux côtés des Beatles, des Rolling Stones ou de Led Zeppelin. De l’aveu même de James Hetfield, « ce livre raconte l’incroyable voyage entrepris avec le Black Album. » Un voyage au-delà de la musique.

Par Laurent Pfaadt

Ross Halfin, Metallica, The Black Album en noir et blanc, Glénat, 2022

Marc Aumont, Metallica, bêtes de scène, EPA, 2022

A beautiful hart

La célèbre chanteuse californienne était en concert à
Baden-Baden

Il y a bientôt trente ans, Beth Hart sortait son premier album. Et à 51 ans, sa fougue est demeurée intacte comme en témoigne le concert magistral qu’elle donna à un public d’un Festspielhaus plus habitué aux symphonies et aux concertos classiques. Pour autant, les nombreuses têtes blanches furent aussi, dans leurs jeunes années, des fans de Led Zeppelin à qui Beth Hart rend un hommage appuyé et plein de fougue dans son dernier album. La chanteuse n’avait que huit ans lorsque le célèbre groupe londonien se sépara mais comme elle le rappelle : « c’est tellement bien fait, c’est intemporel. Cela durera toujours. Parfois, des gens viennent d’une autre planète et réalisent des œuvres d’art qui resteront à jamais. » Les fils inextricables du destin de la musique l’ont ainsi conduit inévitablement vers Led Zeppelin. D’ailleurs, lors de sa prestation phénoménale au Kennedy Center, il y a plus de dix ans, à l’occasion d’un hommage à Buddy Guy qui l’émerveilla, jeune, à San Francisco et dont elle interpréta, au Festspielhaus, son tribute I’d rather go blind, elle avait reçu une standing ovation de Robert Plant et Jimmy Paige.


Sur scène, Beth Hart ne fait jamais semblant. Dans la passion qu’elle transmet à ses spectateurs, faisant de ses concerts, des moments toujours uniques. Dans l’intensité de sa musique ancrée dans les racines du blues tout en s’en extrayant pour sublimer des moments de folk, de rock ou de jazz qui façonnent un style qui lui est propre et qui est, à chaque fois, convaincant. Dans les textes qu’elles délivrent où elle se met à nu devant un public qui le lui rend bien. Car les chansons de Beth Hart parlent souvent d’elle, de sa famille comme de sa sœur disparue trop tôt avec ce Sister Heroine émouvant et son mari (Mechanical heart) ou des démons qui la tourmentent (War in my mind). Dans un même élan se mêlent sueur et larmes et viennent ruisseler sur ce piano, sorte de prolongement de son être où lorsqu’elle s’y assoit, le monde semble s’arrêter. Sur le clavier siffle alors le serpent pour pourfendre la violence des hommes et rugit la lionne à la crinière virevoltante dans Fat man. Portée par une voix qui relève du don, Beth Hart n’est ainsi jamais autant exceptionnelle que lorsqu’elle s’assoit devant son piano. 

Accompagnée de son fidèle Jon Nichols et de sa Vintage, du bassiste Tom Lilly et de son incroyable batteur Bill Ransom qui l’avait déjà accompagné à la fin des années 90 avant de la rejoindre depuis 2012, Beth Hart a enchaîné les tubes : Bad Woman Blues et Sugar Shack dans une magnifique version acoustique. Elle n’hésite pas à troquer son piano pour enfiler une guitare et accompagner Nichols dans un duo particulièrement savoureux dans The Ugliest House of the Block.

En guise de rappel, Beth Hart et ses musiciens ont conclu en apothéose ce concert avec la reprise magistrale d’un Whole Lotta Love figurant désormais sur ses setlists en posant sa voix rauque sur les riffs et les distorsions d’un Jon Nichols qui fit oublier la version que donna Beth Hart avec Slash. La gamine de huit ans ressuscita de la plus belle des manières le mythe tout en construisant un plus le sien. Et les cheveux des spectateurs, s’ils sont restés blancs, n’en demeuraient pas moins dressés.

Par Laurent Pfaadt

Beth Hart sera en tournée en France à partir du mois de novembre : A Marseille (Espace culturel du Solo d’Arenc, 14/11), à Mérignac (Le Pin galant, 16/11), à Annecy (L’Arcadium, 30/11) avant deux dates à l’Olympia (2-3/12)

A écouter : 

A Tribute to Led Zeppelin, Wagram Music

Black Coffee (Mascot Provogue) avec Joe Bonamassa qui sera, lui, en concert au festival de Carcassonne (18 juillet) et à Jazz in Marciac (22 juillet)

72 saisons en enfer

Le célèbre groupe californien de heavy metal, Metallica, a donné deux concerts exceptionnels au stade de France

Dans les travées du stade de France, on pouvait croiser en ce mois de mai soixantenaires arborant fièrement leurs T-shirts élimés et déteints des premiers albums et adolescents à la barbe duveteuse venant d’acquérir celui de 72 Seasons. Un père venu d’Aix-en-Provence partageant sa passion avec son fils de neuf ans qui demande « Avec Metallica, y aura des flammes ? » ou un ado de 14 ans arborant le blouson en jean sans manches d’une mère ayant fait quelques infidélités aux Guns ou à Megadeth. Lars, James et Kirk sauront lui pardonner… Ainsi presque quatre ans jour pour jour après son unique concert en France, ici même au stade de France en 2019, le groupe californien aux dix Grammy Awards était de retour. Et il n’est pas venu seul puisqu’il était accompagné de son petit dernier, 72 Seasons, son onzième album studio.


Les fans français étaient donc aux anges ou plutôt avec les démons du groupe notamment dans ce dernier album qui évoque ces années de construction adolescente parfois difficiles de tout être humain. Pour ce 27e concert parisien, le deuxième au stade de France avec une setlist différente du premier, les hostilités débutèrent avec le traditionnel Ecstasy of gold tiré du Bon, la Brute et le Truand avant d’enchaîner sur Creeping death, deuxième chanson la plus jouée du groupe après Master of Puppets donné en final lors du premier concert. Le ton était ainsi donné : offrir la parfaite alchimie entre les succès d’hier et ceux du nouvel album même si ce 11e se résuma à 72 Seasons, If Darkness Had a Son et You must Burn ! Les spectateurs embarqués dans une scénographie à couper le souffle à grands renforts de pyrotechnie et de show à l’américaine avec une batterie disparaissant régulièrement sous terre et un Kirk Hammett en Elvis revenu d’entre les morts avec sa guitare tatouée d’un « It comes to life », ont pu grâce au snakepit, cette scène serpentant dans les spectateurs et qui a fait la marque de fabrique du groupe, presque toucher leurs idoles lors de moments uniques et inoubliables.

Les tubes du groupe ont ainsi ravi anciens et nouveaux fans : Cyanide jouée pour la première fois dans cette tournée avec la basse d’un Robert Trujillo transformé en sceptre des ténèbres, Whiskey in the jar et Battery portés par un Hetfield très en forme s’armant de sa petite dernière ESP Vulture frappée des couleurs de 72 seasons pour Welcome Home (Sanitarium). Sans parler des solos magistraux d’Hammett sur King Nothing et surtout Moth into Flame que les four horsemen adorent jouer en concert.

Et puis la nuit est tombée au son du Call of Ktulu, un appel des ténèbres dans cette nuit noire, lovecraftienne bien évidemment comme ce black album qui fut celui de la consécration. Comme un hymne sorti de ces enfers musicaux, le stade entonna The Unforgiven puis Wherever I may roam avant que One – fallait-il y voir une allusion à la guerre en Ukraine ? – et la batterie d’Ulrich transformée en danse macabre pour Enter Sandman ne viennent sonner le glas d’un concert mémorable.

Au final, plus de deux heures d’un concert spectaculaire et tonitruant où Metallica a une fois de plus fait honneur à sa réputation live et a réuni dans un même élan infernal et de communion, les différentes générations qui suivent le groupe depuis près de quarante ans. L’enfer était ainsi pavé des tubes enflammés de ce groupe désormais mythique. Et oui mon petit gars, il y avait des flammes, dans les yeux et dans les cœurs.

Par Laurent Pfaadt

Metallica poursuivra sa tournée européenne en Angleterre et en Suède avant de revenir en Allemagne, en Pologne et au Danemark notamment en 2024.

A écouter : 72 seasons, Blackened Recordings/Universal Music mon article : http://www.hebdoscope.fr/wp/blog/72-seasons/

Des bougies et des étoiles

Pour son quarante-cinquième anniversaire, le festival Jazz in Marciac a invité une pléiade de stars

Du chemin a été parcouru depuis cette idée folle d’organiser en 1978 la première édition d’un festival de jazz en plein milieu de la campagne gersoise. Et quel chemin ! Quarante-cinq ans plus tard, les plus grandes stars du jazz, du blues, de la folk et du rock se croisent sur la scène du chapiteau. Des légendes qui ont marqué de leurs empreintes indélébiles ce festival devenu incontournable tant pour les artistes que pour les passionnés ou simplement ceux qui veulent vivre une expérience musicale et humaine unique. 


Nombreux sont les festivals qui s’estimeraient heureux d’avoir comme tête d’affiche l’un des nombreux artistes qui, une nouvelle fois, monteront sur scène. Or, pour cette 45e édition, chaque soirée aura sa star internationale : Norah Jones, Ben Harper, Gilberto Gil, Gregory Porter, Goran Bregovic et d’autres. Et c’est un Français et pas n’importe lequel qui ouvrira cette nouvelle édition : Mc Solaar, la légende du rap français qui précèdera Sofiane Pamart. Du rap pour ouvrir un festival jazz. Avec cet anniversaire, le festival rappelle qu’il a toujours voulu croiser les esthétiques et les styles musicaux. Le blues avec Poppa Chuby et le « King » Joe Bonamassa, en tournée dans toute la France. La pop et la folk avec Suzanne Vega qui, avec Luka et Tom’s Diner nous ramènera dans les années 80 avant que le génial Ben Harper dont les lives constituent toujours des moments inoubliables, ne monte sur scène avec sa désormais légendaire Weissenborn pour nous interpréter les titres de son nouvel album, Wide open light. Les musiques du monde avec un chassé-croisé entre l’Afrique de Fatoumata Diawara et Femi Kuti, la Cuba d’un Roberto Fonseca, fidèle parmi les fidèles du festival, le oud tunisien de Dhafer Youssef et les Balkans d’un Goran Bregovic qui mettra à coup sûr le chapiteau sens dessus-dessous.

Les grandes voix féminines seront également au rendez-vous. Ils auront pour noms Norah Jones, Robin Mc Kelle et Selah Sue. Parmi ces tourbillons musicaux incessants, il faudra vous préparer à quelques tempêtes. Le cyclone brésilien de Gilberto Gil, l’incendie d’un Gregory Porter ou l’éclipse musicale d’un Pat Metheny toujours aussi fascinant. On prêtera aussi attention à ces nouvelles voix en devenir, les étoiles montantes d’Endea Owens, de Laura Prince, de Sarah Lenka ou de Samara Joy qui illumineront les scènes du chapiteau ou de l’Astrada. Car ici à Marciac révéler les talents et acclamer les légendes vont de pair.

Tout cette galaxie musicale sera placée sous la figure tutélaire d’un Wynton Marsalis, « meilleur trompettiste de jazz vivant » et parrain du festival depuis une trentaine d’années qui conduira une cohorte plus jazzy que jamais où l’on retrouvera notamment Brad Mehldau, Kenny Barron et Abudllah Ibrahim. Etoiles, galaxies ou éclipses, préparez-vous donc à une nouvelle révolution musicale.

Pour vous accompagner dans ces nuits magiques, rien de mieux, à l’ombre d’un arbre ou entre amis que quelques lectures. Hebdoscope vous conseille notamment Fatal tempo (Albin Michel, 2023) de l’autrice de polars norvégiens à succès, Randi Fuglehaug. Après La Fille de l’air, cette nouvelle enquête de la journaliste Agnès Tveit nous emmène en plein festival de jazz de Voss sur la piste d’une diva empoisonnée qui réservera au lecteur bien des surprises. Pour ceux qui sont plutôt blues, on leur conseillera Delta Blues de Julien Delmaire (Grasset, 2021), une merveilleuse histoire d’amour dans le delta du Mississippi entre thriller, Klux Klux Klan, culte vaudou et surtout musique de ces années 30 avec des bluesmen inoubliables qui vous hanteront longtemps, surtout après avoir entendu Joe Bonamassa !

Par Laurent Pfaadt

Pour retrouver toute la programmation de Jazz in Marciac : https://www.jazzinmarciac.com/

OPS – Brahms

Pour son dernier concert de la saison consacré à Brahms, Saint-Saëns et Nina Senk, l’OPS affichait un casting de luxe, avec la violoniste Isabelle Faust et le violoncelliste Jean-Guihen Queyras. L’orchestre jouait sous la conduite de son directeur musical, Aziz Shokhakimov.


Tous droits réservés © Nicolas Roses

La soirée débutait par une courte pièce de la slovène Nina Senk, Elements, composé en 2013 sur une thématique de la haute montagne. La version pour grand orchestre était donnée, ce soir du 24 mai, en première audition française. Dans une écriture moderne devenue aujourd’hui classique, la pièce débuta dans une belle rutilance sonore qui alla en s’épurant, telle la transcription musicale d’une ascension alpestre.

Dès le début du double concerto de Johannes Brahms, le violoncelle de Jean-Guihen Queyras et le violon d’Isabelle Faust donnèrent le ton : beauté de timbre et éloquence de phrasé dans une conception de grande tenue dont la sobre vitalité prit le pas sur un lyrisme mélancolique, parfois exagérément souligné chez les interprètes de cette œuvre fin de siècle (1887). Cette approche svelte et lumineuse fut, de toute évidence, partagée par Aziz Shokhakimov, qui tira de l’orchestre un jeu remarquable de couleurs et de transparence. Après un Allegro initial à la rythmique entrainante, le mouvement lent fit entendre un cantabile d’une étonnante spontanéité, presque schubertienne, en tout cas bien préférable à la solennité un peu compassée souvent de mise ici. La même fraîcheur se retrouva dans un finale n’évoluant pas, pour une fois, de façon claudicante mais sonnant comme une véritable invitation à la danse,soutenue par un orchestre aérien et ponctuée par la timbale d’une finesse et d’une musicalité remarquées.

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Depuis qu’il est en poste à Strasbourg, les quelques incursions d’Aziz Shokhakimov dans la musique française ne m’ont guère convaincu : que ce soit dans Bizet, Debussy ou Ravel, le phrasé m’a paru quelque peu lesté et manquer de respiration. On n’y retrouvit pas l’aisance et le talent dont le jeune chef fait preuve dans le répertoire germanique et slave. Avec la troisième symphonie avec orgue de Camille Saint-Saëns qui clôturait cette belle soirée, le ton sembla cette fois trouvé et le jeu orchestral fut proprement extraordinaire, d’une virtuosité et d’un éclat sonore emportant les quelques réticences que l’œuvre parfois inspire. Avec un jeu d’une telle conviction, même le pompeux dernier mouvement soutint l’intérêt jusqu’au bout.

Michel Le Gris