Mélancolie métallisée

SMITH DÉSIDÉRATION (Summa) à la Filature, Mulhouse

Vernissage ce samedi 11 juin de l’exposition de Smith. Le photographe avait déjà présenté son travail au printemps dans le cadre des Vagamondes sur une proposition de Christian Caujolle.
SMITH DÉSIDÉRATION est monté en association avec Corps Célestes, 5
e édition de la Biennale de la photographie de Mulhouse. Une exposition touffue qui s’inscrit bien dans la thématique de la manifestation, en accès libre dans la galerie jusqu’à la fin de l’été.


Devenu artiste complice de la maison, Smith reviendra mi-mars 2023 installer Transgalactique en tant que commissaire (Superpartners avec Nadège Piton) à l’occasion de la prochaine édition des Vagamondes. Nous l’attendons avec impatience dans ce nouveau rôle – de l’autre côté du miroir – tant son travail d’artiste est dense, polymorphe et gourmand de transdisciplinarité : Explorant la porosité des pratiques artistiques, scientifiques, de la philosophie et des narrations spéculatives, Désidération propose une autre mythologie du spatial. (Lucien Raphmaj).

Dans ses prises de paroles, Smith explique sa démarche avec une généreuse assurance maniant l’incohérence poétique, les oxymores… privilégiant l’élaboration de ses propositions plutôt que le détail des œuvres.
Dans celles-ci, il joue beaucoup sur la profondeur de champ. Son choix de mise au point favorise le plus souvent le paysage et le traitement technique l’impose en espace cosmique, surnaturel, changeant selon les déplacements du visiteur et le glissement de l’éclairage. Un personnage au premier plan souvent flou renforce cette irréalité de la lumière – nuit américaine, celle de vieux films de science-fiction (quand les effets spéciaux se cherchaient) voire l’ambiance suspendue de certains films d’Antonioni – ouvrant vers l’ailleurs, l’imaginaire.

Dans la galerie, Smith a installé un noyau architectural qui à la fois augmente la capacité d’accrochage et favorise une proximité immersive du regard avec l’œuvre modifiant la perception de la feuille d’aluminium du Dibond® – fréquemment à nu quand les surfaces sont unies et claires, suggérant quelquefois le voile d’essuyage d’une plaque avant gravure. Une virtuosité technique qui anoblit certains clichés qui pourraient apparaître banals : un coucher de soleil noir, d’autres jouant avec les codes du selfie…

De ces nombreuses photographies surgit l’impression que le monde (et ce cosmos imaginé) a renoncé aux couleurs sauf pour quelques détails à la marge. Et si elles s’invitent malgré tout, la monochromie en désactive l’éclat tapageur.

Par Luc Maechel

Commissariat d’exposition : Emmanuelle Walter
galerie de La Filature, Scène nationale de Mulhouse
du 31 mai au 25 août 2022
11h-18h30 du mardi au samedi & soirs de spectacles
http:// https://www.lafilature.org

Image : © SMITH_Desideration Prologue