72 saisons en enfer

Le célèbre groupe californien de heavy metal, Metallica, a donné deux concerts exceptionnels au stade de France

Dans les travées du stade de France, on pouvait croiser en ce mois de mai soixantenaires arborant fièrement leurs T-shirts élimés et déteints des premiers albums et adolescents à la barbe duveteuse venant d’acquérir celui de 72 Seasons. Un père venu d’Aix-en-Provence partageant sa passion avec son fils de neuf ans qui demande « Avec Metallica, y aura des flammes ? » ou un ado de 14 ans arborant le blouson en jean sans manches d’une mère ayant fait quelques infidélités aux Guns ou à Megadeth. Lars, James et Kirk sauront lui pardonner… Ainsi presque quatre ans jour pour jour après son unique concert en France, ici même au stade de France en 2019, le groupe californien aux dix Grammy Awards était de retour. Et il n’est pas venu seul puisqu’il était accompagné de son petit dernier, 72 Seasons, son onzième album studio.


Les fans français étaient donc aux anges ou plutôt avec les démons du groupe notamment dans ce dernier album qui évoque ces années de construction adolescente parfois difficiles de tout être humain. Pour ce 27e concert parisien, le deuxième au stade de France avec une setlist différente du premier, les hostilités débutèrent avec le traditionnel Ecstasy of gold tiré du Bon, la Brute et le Truand avant d’enchaîner sur Creeping death, deuxième chanson la plus jouée du groupe après Master of Puppets donné en final lors du premier concert. Le ton était ainsi donné : offrir la parfaite alchimie entre les succès d’hier et ceux du nouvel album même si ce 11e se résuma à 72 Seasons, If Darkness Had a Son et You must Burn ! Les spectateurs embarqués dans une scénographie à couper le souffle à grands renforts de pyrotechnie et de show à l’américaine avec une batterie disparaissant régulièrement sous terre et un Kirk Hammett en Elvis revenu d’entre les morts avec sa guitare tatouée d’un « It comes to life », ont pu grâce au snakepit, cette scène serpentant dans les spectateurs et qui a fait la marque de fabrique du groupe, presque toucher leurs idoles lors de moments uniques et inoubliables.

Les tubes du groupe ont ainsi ravi anciens et nouveaux fans : Cyanide jouée pour la première fois dans cette tournée avec la basse d’un Robert Trujillo transformé en sceptre des ténèbres, Whiskey in the jar et Battery portés par un Hetfield très en forme s’armant de sa petite dernière ESP Vulture frappée des couleurs de 72 seasons pour Welcome Home (Sanitarium). Sans parler des solos magistraux d’Hammett sur King Nothing et surtout Moth into Flame que les four horsemen adorent jouer en concert.

Et puis la nuit est tombée au son du Call of Ktulu, un appel des ténèbres dans cette nuit noire, lovecraftienne bien évidemment comme ce black album qui fut celui de la consécration. Comme un hymne sorti de ces enfers musicaux, le stade entonna The Unforgiven puis Wherever I may roam avant que One – fallait-il y voir une allusion à la guerre en Ukraine ? – et la batterie d’Ulrich transformée en danse macabre pour Enter Sandman ne viennent sonner le glas d’un concert mémorable.

Au final, plus de deux heures d’un concert spectaculaire et tonitruant où Metallica a une fois de plus fait honneur à sa réputation live et a réuni dans un même élan infernal et de communion, les différentes générations qui suivent le groupe depuis près de quarante ans. L’enfer était ainsi pavé des tubes enflammés de ce groupe désormais mythique. Et oui mon petit gars, il y avait des flammes, dans les yeux et dans les cœurs.

Par Laurent Pfaadt

Metallica poursuivra sa tournée européenne en Angleterre et en Suède avant de revenir en Allemagne, en Pologne et au Danemark notamment en 2024.

A écouter : 72 seasons, Blackened Recordings/Universal Music mon article : http://www.hebdoscope.fr/wp/blog/72-seasons/