Les trésors archéologiques de l’Arabie se dévoilent

De récentes découvertes archéologiques aux Emirats Arabes Unis et une volonté politique en Arabie Saoudite viennent confirmer que la péninsule arabique constitua un carrefour culturel et marchand de premier plan. Aux Emirats Arabes Unis, l’importance accordée à l’archéologie pré-islamique ne date pas d’hier, bien au contraire. Si les première fouilles datent des années 1950 notamment celles de l’île de Sas Al Nakhl, la nouvelle campagne de fouilles a ainsi révélé que l’île fut un important port de la culture Umm an-Nar de l’âge du Bronze (2700-2000 avant J-C).


Tombs on Umm an-Nar Island courtesy of the Department of Culture and Tourism – Abu Dhabi

Le père fondateur du royaume, le Cheikh Zayed Al-Nahyane comprit très vite que la connaissance par le peuple de l’histoire de sa nation constituerait un puissant ciment de cohésion nationale du nouvel état ainsi qu’un important levier de développement « Notre père fondateur, le cheikh Zayed a joué un rôle déterminant dans la compréhension de l’histoire d’Abu Dhabi grâce à sa passion pour la terre et le peuple des Émirats arabes unis. L’ambitieux programme archéologique du DCT Abu Dhabi est un engagement à perpétuer cet héritage pour découvrir, préserver et éduquer sur notre passé » a ainsi déclaré S.E. Mohamed Khalifa Al Mubarak, président du DCT Abu Dhabi, l’instance gouvernementale chargée de la promotion et du développement du tourisme national et international.

Les nouvelles fouilles menées ont ainsi confirmé que l’île de Sas Al Nakhl fut un important carrefour du commerce de métaux, de perles bien évidemment mis en valeur par le nouveau musée de l’île de Derma et d’un bien jusqu’alors inconnu : le bitume importé de Mésopotamie et qui servait essentiellement à l’étanchéité des bâteaux. Plusieurs dizaines de milliers d’ossements ont également mis en lumière les habitudes alimentaires des habitants de l’île composées principalement de poissons, d’oiseaux de mer et de mammifères notamment le dugong, un mammifère marin très répandu dans l’Océan indien et en Mer rouge.

Ces découvertes viennent ainsi enrichir un peu plus un patrimoine archéologique pré-islamique important qui comporte notamment les sites d’Al Ain, classés au patrimoine mondial de l’UNESCO ou le monastère chrétien de l’île de Siniyah (VIe siècle) dans l’émirat d’Omm al Quaïwaïn. Un patrimoine archéologique qui trouvera toute sa place dans le nouvel écrin muséal du quartier Al Saadiyat d’Abu Dhabi, le musée national Sheikh Zayed à l’architecture originale qui doit, en principe, ouvrir ses portes en 2025.

Hegra
© Hubert Rague

En Arabie Saoudite, l’évolution et la connaissance du passé pré-islamique ont longtemps été minorées. Pendant des décennies, les sables du désert et de l’Islam avaient, dans ce pays où se trouvent les deux principaux lieux saints de l’Islam, recouverts un passé archéologique pourtant d’une beauté stupéfiante. Aujourd’hui, sous l’impulsion du prince Mohammed Ben Salmane, les trésors et vestiges pré-islamiques s’affichent dans les plus grands quotidiens et des spots publicitaires lors des mi-temps de matchs de football invitent les touristes du monde entier à venir les visiter. Parmi ces trésors figurent incontestablement le site de Madâin Sâlih situé à une vingtaine de kilomètres d’Al-Ula, un lieu magique entre la nabatéenne Petra en Jordanie et le film Dune. D’ailleurs, la comparaison avec le joyau jordanien n’est pas fortuite puisque Madâin Sâlih abrite les vestiges de la cité de Hegra édifiée par ces mêmes nabatéens, premier site saoudien à avoir été inscrit sur la liste de l’UNESCO (2008) et surnommé la « seconde Petra ».

Le site d’Al-Ula devrait faire l’objet d’un projet faramineux de la taille de la Belgique porté par une société française et combinant parc naturel, touristique et archéologique. Signe de cette nouvelle promotion touristique, l’exposition « Al-Ula, Merveille d’Arabie » au musée du palais de la cité interdite de Pékin qui fait suite à celle qui s’est tenue à l’Institut du monde arabe à Paris entre octobre 2019 et mars 2020, et résultante d’une coopération entre l’Arabie Saoudite, la France et la Chine invite les visiteurs chinois à prendre conscience de la magnificence du patrimoine archéologique saoudien.

Plusieurs millénaires après l’âge du bronze, cette exposition inscrit ainsi un peu plus la péninsule arabique au centre des échanges entre Asie et Europe. Un carrefour qui n’a certainement pas fini de révéler tous ses secrets et ses merveilles.

Par Laurent Pfaadt