L’Ouzbékistan célèbre sa nouvelle Renaissance

Pour sa septième édition, le congrès international sur l’héritage culturel de l’Ouzbékistan se tenait à Samarcande

Au début du XVe siècle, le sultan Ulugh Beg, poursuivant en cela l’œuvre de son père Tamerlan, engageait la première Renaissance de ce qui ne s’appelait pas encore l’Ouzbékistan en chargeant notamment le mathématicien et astronome Qadi-Zadeh Roumi de constituer ici, à Samarcande, une bibliothèque qui allait regrouper entre ces murs les plus grands savants du monde connu. Quelques six siècles plus tard, de nombreux intellectuels venant du monde entier étaient invités à discourir sur cet exceptionnel héritage culturel.« La promotion de notre héritage culturel constitue une priorité. Beaucoup de choses ont été réalisées mais beaucoup restent à faire. Nous n’en sommes qu’au début » estime ainsi Firdavs Abdulkhalidov, président du conseil d’administration du World Society for the Preservation, Study and Popularization of the Cultural Legacy of Uzbekistan (WOSCU)


Firdavs Abdukhalidov présentant un manuscrit
Copyright WOCSU

Et comme cadre de sa réunion, le WOCSU avait choisi le joyau de l’Asie centrale, à savoir la ville de Samarcande, inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2001. Parmi les innombrables richesses qu’Occidentaux, Russes et éminents spécialistes de l’Asie centrale et de la Turquie vinrent évoquer durant trois jours et cinq conférences internationales figuraient des manuscrits islamiques, arabes, perses ou moghols de grande valeur. Traités de médecine, d’astronomie, de géographie, lettres et versions inestimables du Coran, ce septième congrès a ainsi mis en lumière l’exceptionnel patrimoine de ces savants venus à la cour des Timourides. Les grandes institutions du monde entier, du palais Topkapi à Istanbul à la bibliothèque de Cambridge en passant par le musée d’État du palais Tsarskoe Selo qui possède près de 600 pièces ou la bibliothèque de Berlin et son Jahângîr’s album réalisé pour l’empereur moghol Nūr-ud-dīn Muhammad Salīm, présentèrent ainsi leurs trésors qui ont fait, ici, l’objet d’un impressionnant travail de recensement. Le WOCSU a ainsi édité près de soixante-dix publications formant une base de données conséquente de l’héritage et du patrimoine de l’Ouzbékistan où figurent non seulement ces précieux manuscrits mais également le cinéma, les tapis, la céramique, l’art du 20e siècle ou des artefacts.

Jahangir album from Berlin

Cette nouvelle Renaissance voulue et souhaitée par le pouvoir n’en est cependant qu’à ses débuts notamment en archéologie et les chantiers restent nombreux et colossaux. D’ailleurs comme le rappela à juste titre Frederick Starr, expert américain de l’Asie centrale, « l’Ouzbékistan a l’opportunité de changer l’Asie centrale et le monde. Le pays se trouve à l’aube de nouvelles avancées grâce aux découvertes en cours en matière d’archéologie ». Et l’expert de plaider pour le développement de la recherche et de la formation de futurs archéologues qui s’inscriront dans la lignée d’un Edvard Rtveladze, découvreur en 2019 du site de Kampir Tepe et que le congrès a honoré cette année, un an après sa disparition.

Alexander Wilhelm/Charlotte Kramer/Frederic Starr
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Le congrès a également évoqué l’apport des nouvelles technologies qui offrent des possibilités illimitées comme la numérisation de chefs d’œuvres et la création d’un musée virtuel « pour rendre vie à un passé prestigieux qui dépassera les frontières de l’Ouzbékistan » toujours selon Frederic Starr. Toutes ces initiatives doivent ainsi permettre de développer et de renforcer une politique éducative considérée par les autorités du pays comme un puissant levier de développement. Des initiatives visant à démocratiser ces chefs d’œuvre sont ainsi à l’œuvre dans le pays et en dehors comme celle menée par la maison d’édition Faksimile Verlag qui, selon son directeur, Alexander Wilhelm, souhaite « rendre nos contenus édités accessibles au public ». De quoi nourrir une Renaissance qui n’a certainement pas fini de nous surprendre…

Par Laurent Pfaadt

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