New Création

Grâce à l’invitation de Pôle Sud et du Maillon, Bruno Beltrao avec les danseurs de sa compagnie « Grupo de Rua » nous emmène au Brésil, un Brésil qui vient tout juste de sortir d’une période sombre avec l’extrême- droite au pouvoir. C’est durant ce temps de paralysie du pays et des restrictions des libertés que le chorégraphe a élaboré cette pièce qui traduit un véritable esprit de résistance.


Danseurs, performers hors pair venus du Brésil et témoignant dans cette danse d’un véritable engagement.

Le plateau est leur territoire, vaste comme leur pays parfois plongé dans la pénombre (lumières Renato Machado). Ce n’est pas seulement le lieu de leur prestation mais celui où en solo, duo, ensemble ils en font le lieu des confrontations, des heurts, des étreintes, le lieu où les corps s’expriment de mille façons par la virtuosité, les gestes extrêmes, bras et jambes au maximum de leur extension, de leur tension, marche avec le corps renversé et à la limite d’un déséquilibre toujours maîtrisé. Impressionnante, la rapidité avec laquelle ils surgissent dans cet espace qu’ils traversent parfois à grandes enjambées et donnent lieu à des course folles.

C’est le heurt des corps propulsés les uns vers les autres, qui s’attendent, se cherchent, se bousculent, s’agrippent par le cou, les cheveux, s’empoignent avec vigueur. Ils peuvent sauter, tournoyer, s’affaler au gré des circonstances dont ils possèdent la clé qui nous échappe souvent mais que l’on devine proche de leur vécu ou de celui dont ils veulent évoquer les moments difficiles dans ces Favelas bien connues pour être des lieux de violence sans concession qui exigent du courage, de l’énergie pour survivre au milieu des surveillances policières, des rivalités entre bandes de trafiquants prêts à s’entretuer.

Dans ces costumes blancs pour les uns, noirs pour les autres, une seule danseuse apparaîtra en rouge, toujours bien adaptés à leur silhouette et permettant la liberté de mouvement dont ils font grand usage dans cette prestation(costumes Marcelo Sommer) les danseurs, Wallyson Amorim, Camila Dias, Renann Fontoura, Eduardo Hermanson, Alci Junior, Silvia Kamyla, Samuel Duarte, Leonardo Laureano, AntonioCarlos  Silva, Leandro Rodrigues, se lancent et s’élancent  dans cette chorégraphie qui mêle le hip hop réinterprété par Beltraoe et la danse contemporaine pour créer une œuvre d’art vivante et pas muséal, hors des sentiers battus, avec l’apport de la  bande son bruitiste bien évocatrice d’une ambiance urbaine de circonstance et de la musique signée Lucas Mercier/ARPX ,Jonathan Uliel, Saldanha, Ryoji Ikeda.

La liberté des corps pour déjouer l’oppression, mettre toute son énergie, sa virtuosité à jouer la violence pour la dénoncer, tel est le sens de cette chorégraphie que nous avons ressentie comme un manifeste particulièrement pertinent  au vu de l’actualité .

Marie-Françoise Grislin

Représentation du 2 décembre au Maillon