Rencontre interview JD Morvan

JD Morvan

« La BD permet de
raconter des choses
compliquées d’une
manière simple »

D’abord connu pour
son œuvre de
science-fiction et sa
série Sillage, le
scénariste Jean-
David Morvan
adapte avec le
dessinateur argentin
Facundo Precio, un
classique de la
littérature de la Grande guerre, les Croix de bois de Roland Dorgelès.
Pour Hebdoscope, il revient sur la conception de ce roman
graphique ainsi que sur son attachement aux sujets historiques.

  1. Quel rapport avez-vous avec le roman de Dorgelès ?

Dorgelès habitait dans le village où vivaient mes parents. Et en lisant
le roman j’ai commencé très tôt à imaginer son adaptation en BD.

  1. Comment avez-vous réalisé cette adaptation ?

Le plus difficile n’a pas été d’adapter le roman. Mon éditeur
souhaitait faire quelque chose d’un peu différent du roman stricto
sensu. Comme Dorgelès fait un transfert sur plusieurs personnages
dans son roman, il me fallait aussi raconter la vie de ce dernier. J’ai
ainsi travaillé sur sept de ses romans pour ajouter les morceaux
censurés des Croix de bois présents ailleurs, sur sa biographie pour
explorer sa vie privée et ainsi faire quelque chose de cohérent.
Quelques fois, j’avais un peu la tête proche de l’explosion ! Mais au
final, je crois que tout s’enchaîne bien…

  1. Votre travail avec le Mohamed Ali est un peu différent…

Oui, tout à fait car ici je disposais du témoignage d’Abbas, le
photographe qui a couvert le match et que j’ai rencontré. Il y avait
aussi l’histoire du match et celles d’Ali, de Foreman et de Don King.
Enfin, je devais aussi expliquer le contexte et bien entendu l’histoire
singulière d’Abbas. Mais comme avec les Croix de bois, j’ai réussi, avec
tous ces matériaux, à rendre cette histoire lisible.

  1. Sur ces deux albums, vous avez travaillé avec deux dessinateurs
    argentins différents qui ont leurs styles propres

Oui, le trait de Rafael Ortiz avec qui j’ai l’habitude de travailler
correspondait parfaitement à l’univers de la boxe et donne cette
puissance nécessaire au bouquin. Quant à Facundo Precio, son
travail est incroyable. Il n’avait aucun débouché en Argentine. Je l’ai
aidé à venir en France. On est allé ensemble à Verdun et sur les
champs de bataille pour travailler sur les Croix de bois.

  1. En tant qu’étranger, qu’a-t-il découvert ?

Il a été très ému car pour lui, pour les Argentins, il s’agit de la vieille
Europe avec sa longue histoire tragique, eux qui n’ont qu’une
histoire relativement récente.

  1. Pensez-vous que le roman graphique est un médium
    particulièrement efficace pour permettre aux jeunes
    générations de découvrir la Grande guerre et ses témoignages ?

J’ai adapté ce roman que j’ai adoré étant jeune et je pense qu’il y a
encore des jeunes qui le liront mais il est vrai que le roman
graphique permet un accès intéressant. L’avantage de ce dernier est
de retranscrire visuellement certains détails du conflit et de mieux
en comprendre la complexité. La BD permet ainsi de raconter des
choses compliquées d’une manière simple.

  1. Vous semblez avoir une appétence particulière pour les sujets
    historiques comme le montre vos récents travaux ?

Pendant longtemps, j’ai été cantonné à la science-fiction mais j’ai
toujours eu le sentiment de raconter de l’histoire en faisant de la SF.
J’utilise des éléments de l’histoire pour transposer cette dernière
dans le futur et lui donner un vernis différent. Mais cela reste de
l’histoire.

Par Laurent Pfaadt

A lire : Roland Dorgelès, JD Morvan/Precio, Les Croix de bois
Chez Albin Michel, 104 p.

 Magnum Photos : Abbas-JDMorvan/Ortiz, Mohamed Ali,
Kinshasa 1974
Chez Dupuis, 136 p.