Back to Baku

A la veille d’un nouveau Grand Prix d’Azerbaïdjan, le roi est-il de retour ? Après sa deuxième place à Melbourne, Lewis Hamilton semble n’avoir pas dit son dernier mot. Le champion le plus titré de l’histoire de la F1 – à égalité avec Michael Schumacher – en a vu d’autres. C’est ce que montre le livre de Frédéric Ferret, journaliste à l’Equipe. Sur le circuit urbain de Bakou qu’il avait dompté le 29 avril 2018 face à Raïkkönen et Perez dans une course absolument folle où les Red Bull s’étaient sabordées, Lewis Hamilton mit ce jour-là un coup d’arrêt aux Ferrari et entama sa marche triomphale vers un cinquième sacre. Pourtant, trois ans plus tard, en 2021, sur ce même circuit qui de son propre aveu s’avéra « traumatisant », Hamilton allait perdre en partie son titre de champion du monde…


Les années se suivent et ne se ressemblent pas. Pourtant, le Britannique était habitué à une certaine routine, celle d’enchaîner les titres avec son équipe Mercedes comme on enfile des perles. Il est pourtant bien loin le temps où ce jeune garçon de treize ans admirait Mika Hakkinen au volant de sa McLaren Mercedes lors de la victoire du pilote finlandais au Grand Prix du Brésil en 1998. Cette même McLaren Mercedes qui allait faire en 2008 de ce surdoué, un des plus jeunes champions du monde.

Vingt ans exactement sépare Interlagos de sa victoire à Bakou. Vingt ans d’une aventure qui débuta en F1 en mars 2007. Il est alors 4e sur la grille de départ du Grand Prix d’Australie. Cinq grands prix plus tard, il remporte sa première victoire au Canada, l’une de ses plus belles selon l’auteur, avant de lutter jusqu’au bout face à un Kimi Raïkkönen sur Ferrari qui ne le devança que d’un petit point.

(L to R): Valtteri Bottas (FIN) Mercedes AMG F1 on the podium with team mate and race winner Lewis Hamilton (GBR) Mercedes AMG F1. 13.09.2020. Formula 1 World Championship, Rd 9, Tuscan Grand Prix, Mugello, Italy, Race Day. – www.xpbimages.com, EMail: requests@xpbimages.com © Copyright: Charniaux / XPB Images

Hamilton sut tirer les leçons de cet échec qu’il n’a jamais accepté. Un petit point pour battre le record de Schumacher, cet autre monstre sacré à qui il doit être comparé. « Ils ont en commun une motivation et une détermination extrêmes qui leur ont permis de connaître le succès qu’ils ont » assure Ross Brown ingénieur légendaire interviewé par l’auteur et qui fréquenta les deux hommes. Un point, c’est peut-être ce que l’histoire de la F1 retiendra. Car Lewis Hamilton dut en permanence lutter contre les meilleurs pilotes de son époque, parfois même au sein de sa propre écurie contre Fernando Alonso, puis contre Nico Rosberg dont l’accrochage en 2018 au premier tour du Grand Prix d’Espagne allait offrir à un rookie de 18 ans, Max Verstappen, sa première victoire. Mais comme tous les grands fauves du sport, à l’image d’un Mohamed Ali qu’il vénère, Hamilton fonctionne, comme son idole Ayrton Senna, à l’instinct. « Hamilton est un créateur hors pair, refusant toute préparation préalable, jouant sur l’improvisation permanente » écrit ainsi Frédéric Ferret. 

La carrière de Lewis Hamilton est une histoire de patience et de travail aboutissant à tous les records : plus de cent pole positions, 188 podiums à ce jour, 103 victoires sur 31 circuits différents. Le journaliste qui suit le champion depuis près d’une vingtaine d’années n’omet rien dans son livre : les grandes victoires et les titres comme les erreurs et les « coups » de celui qui a « écrasé tous les records et reconstruit la discipline ». Comme à Bakou en 2017 lorsqu’il provoqua le quadruple champion du monde, Sébastian Vettel qui finit par lui donner un coup de roue et écopa d’une pénalité. Bakou encore.

Dans le même temps, le champion aux sept couronnes est devenu un objet de pop culture. Ses tenues vestimentaires, ses prises de position contre le racisme et en faveur du mouvement #Blacklivesmatter après la mort de George Floyd en ont fait une icône qui a dépassé le cadre de la formule 1. En septembre 2020, à l’image d’un Tommie Smith au JO de 1968, il monte en vainqueur du Grand Prix de Toscane avec un T-Shirt « Arrest the cops who killed Breonna Taylor » en référence à cette jeune femme tuée par la police de Louisville dans le Kentucky en mars 2020. Il a même prêté sa voix à une voiture dans le dessin animé Cars 2 (2011).

Arrive aujourd’hui la nouvelle génération emmenée par Max Verstappen et, à l’image d’un Mohamed Ali sur le retour, Lewis Hamilton connaît ses premières défaites notamment ce KO d’Abu Dhabi en 2021 qui suscite encore de vives discussions et ouvrit l’ère du Hollandais. Celle du Britannique est-elle pour autant refermée ? Car l’histoire du sport fonctionne par cycles. « On sait désormais que, dans n’importe quelle condition, l’Anglais sait gagner. Avec la manière. Il sait également perdre. Ce n’est pas une légende…c’est de l’histoire » écrit le journaliste de l’Equipe. Pour autant, les exemples de Lauda ou de Prost ont montré qu’il ne faut jamais enterrer les grands champions. Alors Bakou fera-t-il mentir à nouveau cette même histoire ?

Par Laurent Pfaadt

A lire :
Frederic Ferret, Les années Hamilton, Solar éditions/L’Equipe, 160 p.

La carrière de Lewis Hamilton étant indissociable de Mercedes et de son écurie de course Mercedes-AMG Petronas Formula One Team, la rédaction vous conseille également l’ouvrage AMG Mercedes, élégance et puissance (Glénat, 2022)

A voir :
Cars 2 (2011)