Les enfants de Tintin

Le deuxième volume français de la grande aventure du journal de Tintin qui révéla notamment Alix paraît enfin

Ils furent des milliers, de 7 à 77 ans, à attendre chaque jeudi, sa venue dans les kiosques ou dans leur boîte aux lettres. Dans chaque numéro, le meilleur de la BD : Le secret de l’Espadon de Blake et Mortimer ou Le temple du soleil d’Hergé pour les plus anciens. Capitaine Sabre, Les Casseurs ou Chlorophylle pour les derniers chanceux, en 1988, auxquels appartint votre serviteur.


Près de sept ans après un premier volume, les éditions Moulinsart et Dargaud nous replongent ainsi dans la grande aventure du journal de Tintin. Ce deuxième tome est ainsi consacré au succès qu’il rencontra en France où le premier numéro est publié le 28 octobre 1948, deux ans après son lancement en Belgique. Reprenant la couverture de l’édition belge du 16 septembre 1948, l’hebdomadaire frappe fort : la première histoire d’Alix de Jacques Martin (Alix l’Intrépide) et une nouvelle aventure de Tintin : L’Or noir.

« Telle est la nationale par rapport à l’autoroute, les deux versions du journal Tintin, la belge et la française, n’arrêtent pas de se croiser et recroiser, se rapprochant ou s’éloignant l’une de l’autre au gré des années » Le succès de l’édition française fut très vite au rendez-vous et des générations entières se passionnèrent pour Ringo, Bernard Prince et ces autres aventures graphiques qui se succèdent au fil des pages de ce second volume. Les passionnés découvriront ou redécouvriront ces aventures d’Edgar P. Jacobs dans Le théâtre du mystère signé Rivière et Carin ou les premières planches du désormais mythique Pilote sans visage de Jean Graton.

Quiconque a lu le journal de Tintin ne l’oublia jamais. La grande aventure du journal de Tintin est ainsi plus qu’une compilation de bande-dessinées. On frissonnait devant l’ombre jaune et Bob Morane. On rigolait avec la dernière page et Cubitus. Glissés entre les différentes aventures, des reportages sur les inventions et découvertes en Chine ou la forêt amazonienne nous laissaient croire que Tintin n’était pas mort avec Hergé mais surtout qu’il vivait en nous. Ce livre replonge chacun de nous dans une enfance qu’il a quitté à regret, dans une nostalgie bienveillante faîte de souvenirs qui nous ont construit grâce à l’imaginaire et au talent de tous ces auteurs. On était devenu, grâce au journal de Tintin et comme il le proclamait, des « super-jeunes » à défaut d’être ses enfants.

Et comme un écho lointain à cet anniversaire d’un journal qui révéla d’autres enfants de Tintin notamment Alix, voici que paraît également ces jours-ci la 42e aventure du plus célèbre des héros romains. Le scénario signé Robert Seiter embarque Alix dans une aventure à la Indiana Jones, à la recherche du bouclier d’Achille, une arme qui pourrait donner des idées à des Grecs bien décidés à profiter de la guerre civile entre Pompée et César pour affirmer leur indépendance. Notre héros, toujours accompagné de son brave Enak est cette fois-ci assisté d’une autre brune sublime (grâce au trait magnifique de Marc Jailloux), Oratis qui n’est autre que la sœur d’Adréa rencontrée dans Le Dernier spartiate. Et notre petit groupe retrouve également une vieille connaissance, Arbacès, sorte d’Olrik romain, bien décidé à tout mettre en œuvre pour retrouver cette arme absolue.

Avec ses quelques clins d’œil fidèles aux albums de Jacques Martin en campant un Alix intègre et épris de justice, sa dimension mythologique, la société secrète des Myrmidons, Le bouclier d’Achille est assurémentun très bon cru. Les passionnés comme les néophytes seront ravis.

Par Laurent Pfaadt

La grande aventure du journal de Tintin, Escale en France, 1948-1988, volume 2
Editions Moulinsart/Le Lombard, 776 p.

Marc Jailloux, Roger Seiter, Jacques Martin, Le bouclier d’Achille
Chez Casterman, 48 p.