Une maison faite d’aube

Aujourd’hui N.S. Momaday
demeure le seul écrivain
amérindien récompensé par le Prix
Pulitzer. C’était en 1969 avec son
ouvrage majeur, Une maison faite
d’aube
. La nouvelle traduction
réalisée par Joëlle Rostkowski,
grande spécialiste de littérature
amérindienne, nous permet ainsi
d’apprécier toute la beauté de
cette prose qui plonge dans les
racines des pins de Californie ou
suit les traces de ces loups qui « le
soir, attirés par les feux de camp des chasseurs, (…) s’asseyaient en cercle dans la pénombre des sous-bois
comme des anciens réunis pour fumer ».

A travers la figure d’Abel, indien navajo revenu de la guerre, se
déploie toute la dichotomie entre la folie des hommes et l’ordre
naturel de la nature. Ode à une vie ancestrale menacée, la grande
force de la prose mystique de Momaday est d’inscrire des mots sur
ces ambiances et ces sentiments qui se passent justement de mots.
Du pueblo et de ces rites animistes tolérant le christianisme à
l’hostilité de la ville coure Abel, le héros du livre, fuyant le
déracinement, la sauvagerie des hommes et sa propre violence
intérieure d’une vie privée de repères. Chant d’un monde recouvert
d’une nuit de plus en plus longue, Une maison faite d’aube traversée
de pollen, de pluie et de merveilles n’a rien perdu de sa magie, bien
au contraire.

A lire également le très beau Crazy Brave (Globe) de Joy Harjo,
traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Nelcya Delanoë et Joëlle Rostkowski.

Par Laurent Pfaadt

N.Scott Momaday, Une maison faite d’aube,
Chez Albin Michel, 288 p.