Danser sur des débris

Troisième livre paru en français après son monumental Fabrique des salauds et Baiser ou faire des films, Danser sur des débris est en réalité le premier de roman de l’écrivain allemand Chris Kraus. Il narre à la première personne l’histoire de Jesko, un jeune styliste ayant depuis longtemps rompu avec sa famille conformiste et petite-bourgeoise. Iconoclaste et libéré de ce milieu qu’il abhorre, Jesko brûle la vie par les deux bouts. Car le jeune homme se sait condamné par une leucémie. Et voilà qu’il entrevoit l’un espoir d’une guérison. Seul problème : sa mère, qu’il n’a plus vu depuis une vingtaine d’années, détient la clé de cette guérison.

Chris Kraus pose dans ce premier ouvrage les jalons de ses futurs livres : ceux d’une mémoire éclatée. Celle de Koja Solm, cet ancien nazi à la mémoire sélective dont il faut faire émerger la vérité dans La Fabrique des salauds. Celle d’une famille qui a explosé et dont les membres, comme des plaques tectoniques, s’attirent et se repoussent. La famille nous dit Krauss est un vase dont il faut prendre soin. Pour autant, même s’il se brise en une multitude de morceaux, il est toujours possible de le reconstituer, aussi coupants soient ses tessons. Et quand tout cela est raconté dans une langue douce-amère qui recèle à la fois le drame et la comédie, on finit par applaudir.

Par Laurent Pfaadt

Chris Kraus, Danser sur des débris, traduit de l’allemand par Rose Labourie
Chez Belfond, 217 p.