Archives de catégorie : Lecture

#Lecturesconfinement : Le Tram de Noël de Giosuè Calaciura par Michel Quint

Voilà un conte de Noël qui
réconcilie avec l’humble humanité,
qui raconte une nativité
d’aujourd’hui, la seule qui vaille.
Voilà un texte magique, de l’ordre
du Carmen latin.

Michel Quint est l’auteur de
nombreux romans dont Billard à
l’étage
 (Calmann-Levy), Grand prix
de littérature policière en 1990.
Son roman le plus célèbre, Effroyables jardins (Joëlle Losfeld) a été porté à l’écran par Jean Becker avec Jacques Villeret et André Dussollier

Le Tram de Noël de Giosuè Calaciura (Notabilia)
par Michel Quint

#Lecturesconfinement : Une vie entière de Robert Seethaler par Jean Mattern

Une vie minuscule, une vie
simple, mais une vie entière,
voilà ce que nous offre ce très
beau livre publié il y a quelques
années chez Sabine Wespieser
Editeur. Andreas Egger, le
héros du roman de l’écrivain
autrichien Robert Seethaler,
est un homme ordinaire, un de
ceux qui n’écrivent pas
l’Histoire. Pour cet orphelin
accueilli par un lointain parent,
paysan dans les montagnes
autrichiennes, la vie est d’abord rude, puis douce quand il rencontre l’amour, avant que la guerre ne
le propulse sur le front russe. Cela pourrait tenir en quelques lignes,
mais l’écriture si poétique et si limpide de Seethaler nous fait
toucher du doigt de quoi sont faites nos existences, il en révèle la
beauté cachée et peut-être le sens. Un livre émouvant d’une
justesse rare.
Jean Mattern est éditeur et auteur de plusieurs livres dont Une vue
exceptionnelle
 (Sabine Wespieser Editeur, 2019). Son prochain
ouvrage, Suite en do mineur (Sabine Wespieser Editeur) paraîtra en
mars 2021.

Une vie entière
 de Robert Seethaler (Sabine Wespieser Editeur)
par Jean Mattern

#Lecturesconfinement : Le Pavillon d’or de Yukio Mishima par Corinne Atlan

Le roman le plus connu de Yukio
Mishima, à lire absolument avant ou
après avoir visité Kyoto et contemplé
le reflet doré du Pavillon d’or sur les
eaux de l’étang qui l’entoure. Mieux
vaut éviter un face-à-face trop direct
avec la beauté : celle du Pavillon d’or
va perturber un jeune moine bègue et
physiquement disgracié au point de
l’amener à incendier le célébrissime
monument (qui est à Kyoto ce que la
Tour Eiffel est à Paris). Au long d’un
récit philosophique au style ciselé,
inspiré d’un fait divers réel survenu en 1950, Mishima développe ses thèmes de prédilection : bien et mal,
laideur et beauté, Eros et Thanatos.

Une fine analyse psychologique émaillée de magnifiques
descriptions d’un temple reconstruit en 1954, symbole de la
splendeur menacée de la capitale impériale.

Corinne Atlan a été la traductrice de Haruki Murakami et de
Hitonari Tsuji dont Le Bouddha Blanc a obtenu le Prix Femina
étranger (1999). Également écrivaine, elle a publié plusieurs livres
dont Un automne à Kyoto(Albin Michel, 2018)

Le Pavillon d’or
de Yukio Mishima (Folio)
par Corinne Atlan

#Lecturesconfinement : Clint et moi d’Eric Libiot par Eric Giacometti

Clint Eastwood est l’un des derniers
monstres sacrés du cinéma.
Personne n’en doute, même ses
détracteurs. Mais qui est vraiment ce
type capable d’incarner le succulent
et très réac Inspecteur Harry et de
nous faire déraper le cœur sur La
route de Madison ? Eric Libiot,
critique et cinéphile, réussit à mettre
des mots sur ce qui nous émeut et
nous agace, chez ce bon vieux Clint.
L’auteur entremêle le fil de sa vie
avec celui de la star.
Un exercice casse gueule, mais que Libiot transforme en figure de haute voltige. Pour le plus grand
bonheur des admirateurs de l’« homme des hautes plaines »
d’Hollywood.
Avec son compère Jacques Ravenne, Éric Giacometti est l’auteur de
romans à succès parmi lesquels les enquêtes du commissaire
Antoine Marcas. On lui doit aussi les scénarios des tomes 21 et 22
de la bande-dessinée Largo Winch.

Clint et moi
d’Eric Libiot (JC Lattès)
par Eric Giacometti

#Lecturesconfinement : Suzanne la pleureuse de Alona Kimhi par Hervé Barbaret

Certains écrivains cherchent la
difficulté. Évoquer une jeune
femme-enfant autiste orpheline
dans une famille travailliste
israélienne à l’ère Netanyahou
(alors qu’elle-même porte le nom
de Rabin) qui accueille un cousin
aussi étrange que charmeur, c’est
un peu comme vouloir traverser
l’Atlantique à la rame ou jouer la
chaconne de Bach avec des gants
de boxe. Pourtant, ce roman
initiatique aussi puissant que
profond possède un souffle rare. Tous ces ingrédients a priori improbables se marient en un ensemble
d’une cohérence et d’une rigueur narrative rares.

Découvrir ce qu’est l’altérité à travers les yeux progressivement
dessillés de Suzanne, en évitant tout pathos, est hautement à
recommander en ces temps de repli individualiste.

Et je dois dire que ce qui m’a le plus séduit dans ce qui n’aurait pu
n’être « que » un exercice virtuose, est que ce livre est très drôle.

Ancien secrétaire général du ministère de la culture, Hervé Barbaret
est le directeur général de l’agence France-Muséums
Suzanne la pleureuse de Alona Kimhi (Gallimard)
par Hervé Barbaret

#Lecturesconfinement : Anthologie de poésie haïtienne contemporaine, dirigée et présentée par James Noël par Thierry Beinstingel

Haïti : onze millions d’habitants et une
anthologie de poésie de six cents
pages… Et encore, ce recueil ne
concerne que les auteurs vivants à qui
l’écrivain James Noël a demandé de  »
limiter  » à cinq poèmes leur
participation.

Car en Haïti la poésie est un sport
national et surtout populaire. Il est
même écrit que  » certains romanciers sont prêts à se couper une jambe pour
courir en vers libres sur le papier et être
identifiés, immatriculés poètes « .
Voilà qui marque une différence avec notre monde des lettres françaises
qui ne jure que par la production de romans. Les poèmes qui figurent
dans cet ouvrage sont ainsi libres, comme leurs auteurs. René
Depestre s’en étonne presque « Il m’est échu d’être poète héritier
d’Arthur Rimbaud et des trésors d’Apollinaire « 
, à quoi Georges Castera
répond « N’aie pas le sens de l’habitable, camarade ! « . Joutes
langagières pourrait-on croire, mais l’enjeu va plus loin, il est
simplement question de survie, ainsi Michèle Voltaire Marcellin  »
L’été se faufile entre deux jours/ deux jours à vivre / ici on les vit à peine
ou mal /dans la fin l’ordure la blessure « 
. Aussi, parcourir ces six cents
pages décrit mieux qu’un roman les peines, les joies, la pauvreté et la
richesse d’un tel pays, où selon Kettly Mars : « La poésie est la seule
arme de construction massive »
.

Haïti donc : on peut, évidemment, se réjouir d’une telle présence
littéraire, si dynamique : Dany Laferrière, né à Port-au-Prince, n’est-
il pas élu à l’Académie française ? On peut ainsi déguster à satiété
chaque poème de cette anthologie. A raison de vingt pages par jour,
on peut distraire facilement notre ennui pendant le mois complet du
confinement : quel bonheur !

Haïti, quelques chiffres encore : une mortalité infantile douze fois
plus élevée qu’en France, une jeune fille de 22 ans assassinée car sa
rançon de 200 euros n’avait pas été payée, 73 personnes tuées à
coups de machette en 2018 : on attend l’enquête. Insécurité et
corruption s’accomplissent dans le silence international. En parlant
du monde : où en est la pandémie dans ce pays ? Ne cherchez pas les
chiffres, ils sont réduits au minimum : l’urgence de là-bas n’est pas la
nôtre.

Thierry Beinstingel est écrivain. Dernier livre paru Yougoslave,
Fayard, août 2020.

Anthologie de poésie haïtienne contemporaine, dirigée et présentée par James Noël (Points)
par Thierry Beinstingel

#Lecturesconfinement : A l’ombre de la Butte-aux-coqs d’Osvalds Zebris par Laurent Pfaadt

L’Histoire a le don de transformer
en mouvements de fond, linéaires,
inévitables, des situations uniques
en les revêtant de vernis
idéologiques et politiques. Alors
que parfois, ils ne sont que
l’agrégat de tragédies et de
volontés personnelles répondant
à leur propre logique et qui, mises
bout à bout, dans une imbrication
dont seule l’Histoire a le secret,
aboutissent aux mêmes résultats.

Le roman d’Osvalds Zebris, couronné par le Prix de littérature européenne (2017) en est la
puissante et brillante démonstration. Tissant plusieurs fils dans
cette Lettonie secouée par la crise révolutionnaire de 1905 qui fit
vaciller l’Empire russe et son tsar, A l’ombre de la Butte-aux-Coqs est
un merveilleux écheveau, sorte de tapis dont le lecteur suit le
tissage, chaque fil répondant à sa propre logique et dessinant
progressivement un motif d’ensemble qui ne se révèle qu’à la fin du
livre. Au centre de ce tapis, deux familles situées en bas et au
sommet de la butte aux coqs et liées par un secret qui finira par les
déchirer. Les fils anarchistes qui souhaitent la fin de la monarchie,
ceux, puissants, de l’antisémitisme y compris au sein des forces de
l’ordre, ceux, incandescents de la réussite sociale et intellectuelle
notamment d’Arvids, figure centrale de l’ouvrage, ceux enfin du
réveil d’une conscience nationale lettone et de la haine envers les
russes tressent ainsi ce récit qui serpente sur le chemin escarpé de
la butte aux coqs où tout peut, à chaque instant, basculer vers la
perdition.

Comment l’adolescent haï parce qu’habitant une plus belle ferme,
dont le père a bafoué l’honneur de la famille rivale, et parce que
meilleur élève, est devenu l’ennemi national ? Cette histoire de
vengeance inavouable revêtue des oripeaux littéraires lettons
d’Osvalds Zebris et des grandes causes constitue assurément un
voyage sans retour dans les prémices déjà sanglants du 20e siècle, et
surtout dans une psyché humaine qu’il est toujours fascinant
d’explorer en compagnie d’un écrivain de talent.

A l’ombre de la Butte-aux-coqs d’Osvalds Zebris (Agullo)
par Laurent Pfaadt

 

#Lecturesconfinement : Les nourritures terrestres d’André Gide par Lise de la Salle

Ce livre me touche particulièrement car, à mon sens,  il représente
une ode à la vie et au vivant. Gide nous entraîne dans un voyage
initiatique, où la quête du désir et l’éveil des sens sont les principaux
thèmes. Un roman qui poursuit la liberté et cherche à s’affranchir du
moralisme et du conformiste de l’époque.
Lise de la Salle est pianiste, se produisant sur les plus grandes scènes du monde. Dernier enregistrement : Bach Unilimited (Naïve)
Les nourritures terrestres d’André Gide (Folio)
par Lise de la Salle

#Lecturesconfinement : Les deux mages de Venise de Philippe André par Jean-Pierre Luminet

Courant 1882, Richard Wagner
s’installe avec sa femme Cosima dans
un Palais de Venise. Quelques mois
plus tard, le père de Cosima, Franz
Liszt, rejoint le couple.
 Philippe
André, psychanalyste et musicien,
imagine de manière extrêmement
originale les derniers jours qu’ont
partagé, au crépuscule de leurs vies et
dans cette cité fantomatique, ces deux
dieux de la musique nouvelle. Style
flamboyant, constantes références
littéraires et musicales, festin de mots,
incessantes trouvailles littéraires. Qui a dit que le roman français se
mourait, ou bien s’étiolait dans la disparition du style ? Un très grand
livre, à lire absolument pour tous les passionnés de musique, d’art et de
culture.

Jean-Pierre Luminet est astrophysicien et écrivain, auteur d’une trentaine
de livres comprenant romans, essais et poésie. Son dernier ouvrage,
L’écume de l’espace-temps, est paru en octobre 2020 (Odile Jacob). 

Les deux mages de Venise de Philippe André (Le Passeur Editeur)
par Jean-Pierre Luminet

#Lecturesconfinement : 7 femmes de Lydie Salvayre par Anne Pauly

 

En ces temps de morosité, j’ai replongé avec un plaisir infini dans le
« 7 Femmes » de Lydie Salvayre. Elle y évoque le destin de sept
« allumées », sept écrivaines (Emily Bronte, Djuna Barnes, Sylvia
Plath, Colette, Marina Tsvetaeva, Virginia Woolf et Ingeborg
Bachmann) pour qui l’écriture était l’existence même et qui, malgré
l’adversité, ont écouté la petit voix qui leur disait de ne pas renoncer.
Sept portraits délicieux, comme sept exercices d’admiration,
délivrés par la plume vive et drôle de Lydie Salvayre. Quelle
jouissance !
Anne Pauly est écrivaine. Son premier roman, Avant que j’oublie
(Verdier) a obtenu, en 2020, le Prix du livre Inter.


7 femmes de Lydie Salvayre (Perrin)
par Anne Pauly