Donnerstag 18. März – So 23. Mai 2021 Galerie 1: Emeka Udemba
#Another day in Paradise
An der „Regionale21“ zeigt Emeka Udemba die neue Installation #Another day in Paradise mit raumgreifender Malerei und Objekten. Ausgangspunkt ist seine Erfahrung, als Schwarzer in Deutschland zu leben und aufgrund der Hautfarbe oftmals als Anderer abgestempelt zu werden. Die Porträts sind von einer Art collagierter Schleier überzogen, der die verstellte Wahrnehmung thematisiert. Die mit Spiegelscherben beklebten Kapuzenobjekte spiegeln den Blick und die von ihm ausgehenden Machtstrukturen.
Galerie 2:
Künstler*innen: Nadine Cueni (CH), Daniel Dressler & Lynne Kouassi (CH), Jasper Simeon Mehler (CH), Paula Mierzowsky & Johann Diel (DE), Björn Nussbächer (CH), Julian Salinas (CH), Lea Torcelli (DE), Florian Thate (DE), Jodok Wehrli (CH)
Songs From the End of the World
Unsere Gegenwart ist nicht nur von einer Pandemie bestimmt, sondern sie muss sich auch mit den drohenden ökologischen Desastern stellen. Es scheint, dass wir aktuell die vielfältigen Symptome eines grundsätzlichen Wandels verspüren. Die an der „Regionale21“ gezeigten Positionen beschäftigen sich mit Themen des Übergangs, der Transformation oder der Auflösung. Einige versuchen, Reflexions- und Handlungsräume zu schaffen für mögliche Wege in die Zukunft.
Öffnungszeiten
Do/Fr 17-20 Uhr, Sa 14-20 Uhr, So 14-18
Es gelten die allgemeinen Abstands- und Hygienemaßnahmen. Terminbuchung erforderlich – online über unsere Homepage.
Arvo Pärt est très certainement l’un des plus grands compositeurs vivants. Son énorme production placée sous le signe du mysticisme et de la méditation explose littéralement dans ce Miserere. De cette œuvre musicale composée d’après le Psaume 51, « Miserere mei, Deus », « Ô Dieu, aie pitié de moi », tout le monde a en tête la version d’Allegri. Mais celle d’Arvo Pärt, composée initialement en 1989 et révisée en 1992, n’a rien à envier à son lointain modèle, bien au contraire.
Dotée d’une puissance émotionnelle absolument prodigieuse portée par un orchestre très inspiré et qui fait oublier la version de référence du Hillard Ensemble, cette version du Miserere, œuvre que Nanni Moretti utilisa dans son film Habemus Papam est véritablement portée par la grâce. Le caractère minimaliste de son écriture, loin d’appauvrir l’œuvre, la transcende au contraire, produisant un effet émotionnel similaire à celui de la troisième symphonie de Górecki. Quant à son Dies Irae, il est bienveillant, impérieux sans être punitif.
Une œuvre à posséder assurément dans sa discothèque.
Par Laurent Pfaadt
Arvo Pärt, Miserere, Chor des Bayerischen Rundfunks, Münchner Rundfunkorchester, dir. Howard Arman Chez BR Klassik
Leonid Brejnev adorait le théâtre. Et la pièce dont il fut le principal acteur s’apparenta tantôt à une honteuse tragédie, tantôt à une comédie pathétique. C’est ce que montre à merveille cette première biographie française du leader soviétique signée Andreï Kozovoï, maître de conférences à l’université de Lille. Pour quelle raison Brejnev ne suscita que peu d’intérêt parmi les chercheurs français ? Parce que coincé entre le turbulent Khrouchtchev et le réformateur Gorbatchev ? Parce que son époque ne vacilla pas comme à Cuba en 1962 ou à Berlin en 1989 ? Parce que Brejnev incarna parfaitement l’antihéros, objet des blagues les plus grotesques et symbole du discrédit moral de l’URSS ? Peut-être pour toutes ces raisons à la fois finalement.
Dans ce grand théâtre cynique et sanglant que fut le 20e siècle, Leonid Brejnev demeura longtemps dans la coulisse. Modèle de l’apparatchik ayant réussi à passer entre les gouttes des purges, il rejoignit la cour d’un autre ukrainien, Nikita Khrouchtchev qu’il trahit lors de la révolution de palais d’octobre 1964 qui le porta au pouvoir. Grâce à des archives inédites, l’auteur nous fait ainsi revivre presque heure par heure, au sein du Poliburo, cet évènement majeur du 20e siècle.
Fin politique, Brejnev installa une gouvernance faite de népotisme où l’on retrouva des membres de sa famille et de la « mafia de Dniepropetrovsk » c’est-à-dire de fidèles à lui, au sein d’un système qualifié de « culte de la personnalité sans personnalité ». En fait, celui-ci s’apparenta à un conservatisme qui ne dit pas son nom où les écarts avec le dogme soviétique ne furent pas tolérés. Prague en 1968 ou les dissidents en firent ainsi les frais. Mais l’inadaptation de ce conservatisme avec le monde de la deuxième partie du 20e siècle accéléra la chute du régime soviétique. Déclin économique irrattrapable, décisions géopolitiques hasardeuses comme en Afghanistan, Brejnev restera bien dans l’histoire comme le fossoyeur de l’URSS. Et le ciment du mythe de la grande guerre patriotique dont il usa ne parvint pas à éviter l’effondrement du système.
Le lecteur assiste ainsi en même temps aux dérives à la fois d’un système et de l’esprit d’un homme. En s’appuyant sur les carnets personnels de Brejnev dont il démêle en historien averti le vrai du faux, la réalité du mythe et en croisant d’autres sources inédites et passionnantes – comme celles de la répression de l’insurrection de Budapest en 1956 – Andreï Kozovoï nous montre combien Brejnev personnifia l’enfermement d’un système qui finit par pourrir de l’intérieur.
Par Laurent Pfaadt
Andreï Kozovoï, Brejnev, l’antihéros Aux éditions Perrin, 400 p.
Après l’humidité de la jungle, le froid polaire. Mais quel que soit l’environnement, il se trouvera toujours des hommes intrépides ou fous pour s’y confronter, s’y perdre. Voilà en substance ce qui attend le lecteur en s’embarquant dans ce nouveau voyage au cœur des ténèbres. Après La Cité perdue de Z, la Note américaine et le Diable et Sherlock Holmes, le nouveau récit magistral de David Grann nous emmène sur les traces d’Henry Worsley, aventurier moderne de l’Antarctique.
Fervent admirateur de l’explorateur britannique Ernest Shackleton qui mena de nombreuses expéditions dans l’Antarctique jusqu’à collectionner les effets personnels de ce dernier et descendant de l’un des compagnons de l’expédition Endurance que Shackleton mena en 1914, Henry Worsley effectua une brillante carrière dans les commandos d’élite de l’armée britannique avant que le démon de l’expédition polaire ne le rattrape. Très vite, avec d’autres descendants de compagnons de Shackleton, Worsley monta lui- aussi une expédition au Pôle Sud sur la base de celle de son illustre modèle qui renonça à atteindre le Pôle Sud pour préserver la vie de ses hommes. Les pages relatant ainsi, à un siècle d’intervalle, les expéditions de Shackleton et de Worsley sont, comme toujours avec Grann, haletantes. Les chutes dans les crevasses, la titanesque ascension du glacier Beardmore ou les vents coupant comme des rasoirs entretiennent le suspens. La mort est omniprésente car « l’Antarctique a deux façons de vous ôter la vie (…) Elle vous use sur une longue période en vous faisant peu à peu mourir de faim, de froid ou d’épuisement (…). Ou elle vous jette dans la gorge d’une crevasse en une fraction de seconde » relate ainsi Henry Worsley. Les figures disparues de l’exploration polaire dont celle de Robert Falcon Scott qui mena lui aussi une expédition vers le Pôle sud en 1912 et la mythologie du Pôle sud ajoutent à la dramaturgie, rendant ainsi plus palpitant encore l’exploit de Worsley et de ses compagnons.
Mais le grand intérêt du livre vient après, lors de ce point de bascule entre quête et obsession. Henry Worsley, acclamé comme un grand explorateur des pôles réunissant des fonds importants pour des œuvres caritatives, veut aller plus loin, dans l’exploit, dans l’effort, dans l’absolu. Pourquoi ? Pour voir « son âme à nu » comme il l’écrivit lui-même. A cet instant, la littérature du journaliste américain excelle une fois de plus à rendre compte de ces ténèbres, ceux qui traversent le cœur des hommes. Worsley vient de rejoindre Percy Fawcett, tous deux prisonniers de leurs propres obsessions. A un siècle d’intervalle, les deux hommes ne vécurent que pour cela. Leurs proches furent sacrifiés, la vie quotidienne ne compta plus. Enfermé dans leurs rêves destructeurs, ils n’ont eu, sans se l’avouer, d’autres horizons que la mort. Ce fut le prix à payer voir son âme à nu dans la blanche obscurité.
Par Laurent Pfaadt
David Grann, The White Darkness éditions du sous-sol, 160 p.
L’écrivain californien a le don de se trouver là où on ne l’attend pas. Et pour ce recueil de nouvelles qui se veut le dernier de sa longue et fascinante production, il nous emmène au pays des morts. Préparez- vous donc à côtoyer goules, sorcières, vampires et autres fantômes. De cette Europe qu’il a sillonnée à Kyoto et cette merveilleuse nouvelle qui voit une Geisha transformée en cerisier en passant par le Mexique, ces trente-deux nouvelles nous conduisent de cimetières en lieux hantés mais plus étrangement parmi les vivants, parmi nous. Et si le lecteur prend plaisir à suivre les traces de l’écrivain, chaussant ses bottes littéraires dans celles, incommensurables, des frères Grimm ou des romantiques gothiques, la grande force de ces nouvelles tient avant tout dans le rapport, le calque dirions-nous, que projette Vollmann sur les vivants.
Ici, les monstres ne sont que des avatars qui servent à questionner nos représentations. Dans ce carnaval macabre au sein duquel William T. Vollmann règne, depuis ses débuts en littérature, en grand ordonnateur, les personnages ne cessent d’interpeller les lecteurs en les confrontant à leurs hypocrisies collectives. Les morts, qui n’ont plus rien à perdre, surtout pas la vie et libérés de leurs statuts sociaux et de leurs postures civilisationnelles, viennent ainsi questionner nos convenances sociales et leurs futilités.
Magistralement construit (comme à chaque fois), le récit de l’écrivain s’insinue dans les interstices de cette violence qui constitue le ciment des rapports humains. La mort, l’assassinat et même le sexe, ne sont que l’aboutissement de la grande œuvre de tout humain, celle qui le voit, à chaque étape de sa vie, domestiquer la violence. Dans ces pages, ceux que nous appelons monstres, viennent nous rappeler qui nous sommes réellement. Mais loin d’être un réquisitoire morbide, ce livre est avant tout une introspection. Car ces vampires et fantômes interrogent nos rapports à la vie, aux autres et au monde. La mort comme le sexe ne sont-ils pas en définitive nos derniers espaces de liberté ? Vollmann semble en tout cas le penser. Et à cet instant, le lecteur se met à danser avec les morts. Le carnaval n’est-il pas avant tout une fête ?
Par Laurent Pfaadt
William T. Vollmann, Dernières nouvelles et autres nouvelles Chez Actes Sud, 896 p.
Ce sont des bateaux que l’on regarde partir de Christophe Fourvel
L’auteur anime des ateliers d’écriture accueillant notamment des allophones, beaucoup étant des migrants d’hier et d’aujourd’hui, et même d’avant-hier. Il a ainsi collecté la parole d’une quarantaine d’entre eux. Des textes fragments évoquant leur vécu d’ailleurs et d’ici, illuminés par moments d’une saillie tranchante ou renversante comme celle d’Omassad : Le monde est un pays aux serrures compliquées où tout est rouillé sauf le ciel. (p. 35)
Les textes courts – souvent juste un paragraphe – s’enchaînent esquissant un paysage humain où se mêlent les origines et les générations. Des itinéraires, des vies qui glissent de là-bas vers ici, se posent, la plupart du temps, dans de petites villes. Des destinées semblables fuyant un printemps arabe ou le génocide arménien, et qui viennent de l’Est, des Balkans, d’Afrique ou d’Asie… Leurs paroles plurielles disent la récurrence de ce chemin d’exil, une composante éternelle de notre (in)Humanité.
Les confessions s’inscrivent dans l’enfance, scandent l’impérieuse nécessité du départ bien plus que l’envie. Ce : Il nous fallait juste partir résonne d’une bouche à l’autre, même si la guerre, les violences, la pauvreté sont invoquées. Leurs récits n’insistent guère sur les débris d’images concassées par la peur, les patrouilles, les armées arrogantes ou ivres (p. 86), préfèrent s’attarder sur leurs vies neuves avec la perspective d’un accomplissement.
Un univers littéraire et poétique dont l’auteur agence les fragments en citant l’Iliade et l’appel de ses aèdes sous les murs de Troie, en élargissant les perspectives afin que sa voix d’écrivain amplifie la matière sensible de ces hommes, ces femmes, car la vie pèse beaucoup plus lourd que la littérature (p. 14). L’exilé trouve ainsi une humanité et une identité grâce à ses propres mots : il ne sera personne avant son récit, sinon Il est une allégorie, un symbole, une pré- histoire que l’on s’illusionne de connaître. (p. 102)
Au fil des pages, l’unité nait de cette diversité et l’écriture tout en délicate broderie de Christophe Fourvel nous mène dans l’intimité de ces frères et sœurs humains avec la conviction que cette proximité fera tomber le mur des préjugées : Essayer d’être raciste avec de tels groupes d’humains, vous n’y arriverez pas. (p. 86)
par Luc Maechel
chez médiapop éditions, nov. 2020, 141 p. Collection Ailleurs
Invité du mini-Festival du livre de Colmar mis en ligne du 22 au 27 février, Christophe Fourvel est interviewé par Jacques Fortier en compagnie de Marion Muller-Colard (Wanted Louise, Gallimard)
Das Badische Landesmuseum stellt sein Jahresprogramm vor
Fürstlich wird sich das seit der Nachkriegszeit als modernes Museum genutzte Karlsruher Schloss in seinem Erdgeschoss präsentieren, sobald sich die wegen der Pandemie geschlossenen Türen wieder für das Publikum öffnen. Die neu eingerichtete Ausstellung „Schloss und Hof“ zeigt nach aufwendiger Restaurierung Pracht und Eleganz früherer Zeiten. Ihr Herzstück ist das Thron-Ensemble der badischen Großherzöge mit Hockern, Säulen-Kandelabern und einem in über drei Metern Höhe angebrachten Baldachin. Das durch Blattgold, Brokat und Seide glänzende Ensemble stammt aus dem Jahr 1838, als Großherzog Leopold den im Obergeschoss des östlichen Mittelbaus gelegenen Thronsaal neu möblieren ließ. Zu den Kroninsignien gehört ein Zepter, das Juweliere 1811 aus einem um 1625 in Siebenbürgen gefertigten Streitkolben umgestalteten, indem sie ihn vergoldeten, mit Diamanten besetzten und seinen Knauf durch eine filigrane Krone ersetzten. Eine Fürstengalerie zeigt 14 Bildnisse, beginnend mit Stadtgründer Karl Wilhelm bis zum 1918 abgedankten Großherzog Friedrich II. und ihren Gattinnen. Zudem vermittelt ein großes Modell einen Eindruck von der Architektur des Schlosses und der Geometrie der barocken Planstadt Karlsruhe.
Die Zeit um 1900 und ihre Frauengestalten sind Thema der großen Sonderausstellung „Göttinnen des Jugendstils“, die für Mitte Dezember geplant ist. In Kooperation mit dem Allard Pierson Museum Amsterdam und dem Braunschweigischen Landesmuseum beleuchtet die Schau gleichermaßen Kunst- und Sozialgeschichte mit Leihgaben internationaler Jugendstil-Sammlungen wie den Königlichen Museen in Brüssel. Zu sehen sind Werke unter anderem von Gustav Klimt, Franz von Stuck, René Lalique, Jan Toorop und Aubrey Beardsley, aber auch die von Alfons Mucha für die Pariser Weltausstellung 1900 geschaffene Büste „La Nature“ aus dem Bestand des Museums in Karlsruher, wo sie allerdings länger nicht mehr ausgestellt war.
Jeweils bis zum 6. Juni verlängert werden die preisgekrönte Familienausstellung „Räuber Hotzenplotz“ sowie die Studioausstellung „Humanimal – Das Tier und Wir“. Zudem bringt das Museum seine digitalen Formate weiter voran, unter anderem ermöglicht das neue App-Format „Mein Objekt“ eine individuelle Begegnung mit Sammlungsstücken, und durch den Einsatz Künstlicher Intelligenz wird das digitale Tool iCurator entwickelt, mit dem Nutzerinnen und Nutzer museale Inhalte selbst zusammenstellen können. Das Keramikmuseum Staufen, eine Zweigstelle des Badischen Landesmuseums, zeigt bis Ende November „Die wilden 70er – Freiheit in Farbe und Form“ – damals waren italienisches Design und experimentelle Glasurschöpfungen in der Keramik besonders angesagt.
Stabat Mater « divin poème de la douleur » selon Bellini
Le Musée Unterlinden accueillera un concert Le Stabat Mater « divin poème de la douleur » selon Bellini du Chœur de Chambre de Colmar-Alsace enregistré le 14 mars dans la Chapelle du Musée et diffusé le 2 avril sur les réseaux sociaux. En ces temps de fermeture des établissements culturels, ce concert au Musée, permet à deux acteurs culturels d’imaginer une collaboration inédite et fructueuse : le Musée Unterlinden, d’une part avec sa collection et notamment son chef d’œuvre le Retable et le Chœur de Chambre de Colmar, d’autre part, l’ensemble professionnel international parrainé par Mireille Delunsch, l’une des artistes lyriques les plus importantes de notre région.
Être audacieux » Musique & peinture Pantxika de Paepe, directrice du musée a sélectionné plusieurs œuvres représentatives issues des collections du musée, en lien avec la thématique du Stabat Mater en couvrant toutes les périodes stylistiques et allant, ouvertement, jusqu’à l’art contemporain. En introduction au concert, la directrice éclairera ainsi la thématique même du Stabat permettant au public de mieux comprendre comment l’œuvre de Scarlatti s’intègre pleinement dans un contexte socio-historico-artistique.
« Notre souhait pour la diffusion de ce concert était de s’entourer d’un média régional de qualité, fortement implanté et spécialisé en musique classique : Accent 4. Afin de correspondre parfaitement au lieu et au format, le programme du concert annulé a été adapté – nous confie Lucie Guati, administratrice de l’ensemble. La Crucifixion de Mathias Grünewald et le jour du Vendredi saint sont des « figures obligées » qui orientent nécessairement notre programmation vers des œuvres musicales sacrées écrites sur ce sujet. Le choix d’un Stabat Mater, ce « divin poème de la douleur » selon Bellini . qui n’est autre que le fil rouge de la saison 2020/2021 du Chœur de Chambre de Colmar s’est imposé comme une évidence. »
Ecrire sur son passé ou sur ceux qui ont fait de vous ce que vous êtes, avec leurs histoires tragiques, leurs souffrances, n’est jamais chose aisée. On en sort bouleversé, transformé. Comme le rappelle l’essayiste autrichien Martin Pollack dans l’introduction de ce magnifique livre: « Il n’est jamais facile d’écrire sur sa propre famille, sur les êtres qui nous sont les plus proches, à qui nous devons une enfance radieuse et heureuse grâce à l’amour dont ils nous ont entourés. Cet amour exige notre reconnaissance – et notre loyauté, même si nous ne partageons pas leurs idées. » Et lorsque cette émotion est adossée à des questions éthiques, à des interrogations sur le sens à donner à ceux qui traversent l’histoire sans la changer mais qui changent les destins des êtres qu’ils engendrent, cela donne des livres qui font date.
Faux poivre est à ranger dans cette catégorie. Monika Sznajderman raconte ainsi la vie de sa famille polonaise où les branches juive et catholique suivent des routes parallèles, chacune avançant aveuglément ou consciemment au bord du précipice de ce 20e siècle sanglant sans jamais se voir. Les uns seront décimés, les autres subiront le déclassement. Grâce aux nombreuses photographies, le lecteur s’attache très vite aux merveilleuses figures qui traversent l’ouvrage notamment celles des grands-mères : Amelia, si libre, si belle, assassinée lors d’un pogrom en 1941 et Maria, aristocrate romantique comme sortie d’un roman de Romain Gary. Elles sont rejointes par d’autres personnages, ce grand-père déporté à Treblinka et Marek, ce père dont le livre n’est finalement qu’un long dialogue bouleversant. « Pourtant, sur ces photos-là, intactes en apparence, une ombre apparaît. Meme s’il ne s’agit pas d’une ombre physique au sens littéral, mais de celle des temps qui se profilent, car nous en savons davantage, car nous connaissons l’issue » écrit ainsi l’auteur.
Monika Sznajderman marche dans cette ombre avec ses mots traversés tantôt par des moments de chaleurs, bucoliques, comme ces étés à la campagne mais le plus souvent brisés par des orages terribles et glaçants comme lorsque débute la Shoah et se déploie cette indifférence, antisémite ou non, face au sort de ses voisins juifs distants de quelques dizaines de kilomètres. Viens alors à l’esprit ces mots de Valcav Havel, lorsqu’après la guerre, l’oncle Zygmunt est torturé par les communistes : « Face au mal, il ne faut pas reculer même si ce mal n’a pas d’abord été commis contre nous. Sinon notre indifférence aux autres n’aura qu’une seule conséquence : l’indifférence des autres à notre égard. »
A travers le récit de sa famille qui personnifie dans toute sa complexité le drame de la Pologne contemporaine victime des deux totalitarismes du 20e siècle, Monika Sznajderman nous rappelle que la mémoire, celle que l’on doit aux autres et a fortiori à ceux qui nous ont précédés, n’est jamais facile à construire. Qu’il nous faut appréhender ce sentiment d’imposture, sortir de cette culpabilité à raconter ces vies anonymes et si familières tout en évitant le jugement et en singularisant ces existences. Suivre avec elle cette ligne de crête au-dessus des précipices de l’histoire est un privilège littéraire autant qu’une leçon.
Par Laurent Pfaadt
Monika Sznajderman, Faux poivre, Histoire d’une famille polonaise, Editions Noir sur Blanc, 288 p.
A lire également : Martin Pollack, Empereur d’Amérique, le grand exode de Galicie, Editions Noir sur Blanc, 2015, 256 p.
La 1ère édition du programme de résidences croisées franco-allemandes AZ – ALLER & ZURÜCK est lancée !
Mené par les Instituts Goethe de Nancy et de Strasbourg et le Bureau des arts plastiques de l’Institut français d’Allemagne (Berlin), le programme de résidences ALLER & ZURÜCK fait suite au programme Ouest-Ost (2017-2020) et est soutenu par l’OFAJ (l’Office franco-allemand pour la Jeunesse), la DRAC Grand Est et le Centre français de Berlin.
Le premier appel à candidatures est lancé, pour une résidence de 4 mois à Berlin de juillet à octobre 2021.
Il s’adresse à des artistes émergent·e·s à partir de 25 ans, vivant et travaillant dans le Grand Est et dont la discipline entre dans le champ des « arts visuels » : peinture, dessin, photographie, arts graphiques, vidéo, sculpture, installation.