Archives de catégorie : Lecture

L’aigle s’est évadé

Ben MacIntyre, auteur de L’espion et le traître, nous emmène dans le château de Colditz pour un nouveau récit passionnant

Avant de commencer la lecture de ce livre, on imagine Clint Eastwood ou Richard Burton déguisés en officiers de la Wehrmacht et s’introduisant dans cette forteresse pour libérer quelques hauts gradés. Car avec Ben MacIntyre, auteur de L’espion et le traître et Agent Sonya, le lecteur doit s’attendre, en entrant dans ce château, à un nouveau récit enlevé et plein d’action.


Il faut dire que l’endroit, une forteresse perchée au sommet d’une montagne de Saxe dominant la rivière Mule, est un véritable décor de cinéma. D’ailleurs il a été en 1972-1974, l’objet d’une série télévisée. Dans cet endroit battu par les vents ont été regroupés des prisonniers de marque, des officiers anglais, français, néerlandais, polonais, yougoslaves, américains parmi lesquels le neveu de Churchill ou Desmond Wilkinson Llewelyn, jeune lieutenant britannique qui, après-guerre deviendra l’éternel pince-sans-rire Q de la saga James Bond. Parmi eux, des Français particulièrement surveillés. « Le contingent français en expansion comprenait des personnalités indomptables, des hommes considérés comme irréductibles qu’on n’aurait pas pu garder dans un camp normal » écrit ainsi Ben MacIntyre. Des hommes dont l’évasion est devenue un art, un but ultime qu’il faut briser, mater.

Loin de parvenir à cet objectif, les Allemands et en premier lieu le responsable de la sécurité, le Leutnant Reinhold Eggers, vont au contraire stimuler leur imagination. Et Ben MacIntyre de nous narrer toutes ces incroyables tentatives comme tirées d’un film : on creuse des tunnels, on se déguise en officiers allemands. Un fuyard ainsi costumé se permet même de rabrouer, dans un allemand sans accent, un simple soldat qui a refusé de le saluer !

Il ressort ainsi de l’ouvrage de Ben MacIntyre, un côté irréel, presque factice et caricatural de Colditz, de ses occupants et de ses geôliers, tant les comportements des protagonistes du livre paraissent en décalage avec ce qui se passe de l’autre côté de l’Europe où la Wehrmacht est engagée dans les pires opérations d’extermination de l’histoire. A Colditz, les Allemands sont presque sympathiques de tant de mansuétude à l’égard de leurs prisonniers, presque ridicules. Ici, c’est un peu la guerre en goguette comme lorsqu’un pilote tchèque de la RAF, playboy à ses heures, fait engager comme assistante du dentiste du château, une magnifique créature rencontrée lors d’une évasion.

Mais derrière ce décor d’opérette se déploie une stratégie mûrement réfléchie. Celle de briser la volonté de ces as de l’évasion en les enfermant dans un ennui mortifère. A Colditz on ne fait rien, on passe son temps à se tourner les pouces et on déprime. Alors, on lit – un célèbre éditeur envoie même à nos illustres détenus des colis remplis de livres – on débat dans des clubs, on joue aux cartes et on boit du thé. Mais pas question de débattre avec n’importe qui et Ben MacIntyre montre également la stratification de cette société où la notion de frères d’armes ne vaut que pour certains.

Bientôt l’angoisse de la fin de la guerre parvient jusqu’à Colditz. De grotesques, les Allemands deviennent impitoyables car depuis le 20 juillet 1944, les SS ont accentué leur emprise sur le régime. On ne sait plus s’il vaut mieux quitter le château au péril de sa vie ou, au contraire, y rester au risque de devenir des otages convoités ou des victimes prestigieuses. Le livre change alors d’atmosphère et devient haletant. « Les nerfs sont sur le fil du rasoir » dit l’un d’eux. Et derrière les portes de la forteresse où se fomentent de nouvelles évasions se dressent les oreilles de notre brillant écrivain pour nous relater les dernières aventures d’un livre définitivement fascinant.

Par Laurent Pfaadt

Ben MacIntyre, Colditz, la forteresse d’Hitler
Alisio, 448 p.

La Reine des Amazones

Alors qu’il se rend à Thessalonique à l’invitation d’un ami pour y disputer une course de chars, Alix, toujours accompagné de son fidèle Enak, se retrouve à devoir affronter lors de cette épreuve une femme, l’intrépide Délia, appelée par ses partisanes, la reine des amazones. Dans le même temps, la province dirigée par un gouverneur lubrique et corrompu, est secouée par une série de disparitions de jeunes femmes dont la fille de son ami Hémon.


Il n’en faut pas moins pour que notre héros se lance dans une nouvelle enquête. Dans cet album, le 41e de la série, la scénariste Valérie Mangin à qui l’on doit Alix Senator, transpose habilement le phénomène #Metoo dans la Rome antique pour l’infuser avec le mythe des amazones. En installant ce personnage voulant bâtir une société féministe libérée du patriarcat romain, les auteurs parviennent astucieusement à évoquer un phénomène de société actuel via l’histoire et la mythologie. Chrys Millien qui fait ici ses premiers pas dans l’univers de Jacques Martin, réussit parfaitement, à coups de quadriges et de batailles, son baptême du feu. Sa reine des amazones, à la fois altière et intrépide est, avec ce côté brune mystérieuse assumé, très réussie. Quelques cases sont également appelées à demeurer dans les mémoires comme celle du suicide du coupable dans les dernières pages de l’album.

Une fois de plus, animé de son légendaire sens de la justice, notre héros va mener à bien son indéfectible quête de vérité afin de révéler le double jeu des protagonistes dans cette nouvelle aventure qui devrait toujours autant ravir les lecteurs de 7 à 77 ans.

Par Laurent Pfaadt

J. Martin, V. Mangin, C. Millien, Alix, La Reine des Amazones
Chez Casterman, 48 p.

8 jours en mai

Le 30 avril 1945, il est 15h30 lorsque retentit un coup de feu dans le bunker de la chancellerie du Reich. Adolf Hitler, Führer de tous les Allemands, responsable de la seconde guerre mondiale et de la Shoah, vient de se suicider. Dehors, les Soviétiques sont aux portes de l’épicentre du Troisième Reich. A 18h35, un télégramme de Martin Bormann, numéro 2 du régime arrive chez l’amiral Karl Dönitz l’informant de sa nomination en tant que président du Reich. 


Karl Dönitz

Ce fameux Reich de mille n’a alors plus que huit jours à vivre. Jusqu’à la capitulation sans condition de la Wehrmacht, le 8 mai à Reims s’ensuivent d’interminables manœuvres pour sauver ce qu’il reste de l’Allemagne et de sa puissance. C’est ce que raconte à merveille Volker Ullrich dans cet essai passionnant de bout en bout et qui se lit d’une traite. Une sorte de page-turner historique où tout est véridique.

L’auteur raconte l’agonie d’une bête blessée à mort qui tente, par tous les moyens et tous les stratagèmes, de survivre. Mais dans le même temps, en se fondant sur une multitude de sources notamment les journaux et les carnets intimes de nombreux acteurs, il survole, tel un aigle dans le ciel européen, l’ensemble de la situation pour suivre tantôt ces SS aux abois qui ignorent que leur Führer est mort et tuant leurs dernières victimes dans les marches de la mort, tantôt la progression des armées alliés, remportant ces inutiles batailles sanglantes où périssent quantité d’adolescents fanatisés par cet autre aigle qui, quatre ans pus tôt, avait mis l’Europe à genoux.

« A la fin de la journée du 30 avril, l’incertitude était donc totale sur la tournure qu’allaient prendre les évènements » écrit ainsi Ullrich. Les sentiments qui prédominent alors à la tête de la Wehrmacht et dans la SS sont emprunts de sidération et d’incrédulité. Goering a été écarté quelques jours auparavant et Himmler qui a tenté de négocier une paix séparée à l’ouest, doit se conformer au choix d’Hitler de nommer Dönitz. L’entrevue entre les deux hommes est d’ailleurs fascinante, Dönitz conservant un pistolet à portée de main au cas où…L’amiral installe son quartier général à Flensbourg, près de la frontière danoise et nomme le comte Schwerin von Krosigk comme chef d’un gouvernement provisoire où l’on retrouve les généraux Keitel et Jodl ainsi que le ministre de l’Armement, Albert Speer. 

Ne se limitant pas à la simple énumération des faits, l’historien allemand entre dans la psyché des acteurs pour nous dévoiler les ressorts de comportements parfois irréels. Car, comme lors de la bataille des Ardennes, quelques mois plus tôt, les dirigeants du Reich tentent de jouer un dernier va-tout, politique celui-là. Ils s’activent pour fracturer le camp allié en voulant signer la paix à l’ouest afin de mieux continuer le combat à l’Est contre l’URSS. Les tractations relatées avec brio par l’auteur resteront vaines mais l’aveuglement de Dönitz causa la mort inutile de nombreux Allemands voire même l’encouragea lorsqu’il décida d’exécuter les jeunes soldats qui avaient fait preuve de plus de clairvoyance que leurs chefs. Et dans le même temps, le lecteur assiste, médusé mais également, il faut le dire, fasciné, au délitement de la société national-socialiste. Il a fallu dix ans pour l’édifier. Huit jours suffirent pour qu’elle s’effondre à l’image d’un Joseph Goebbels, ce chancelier de 24 heures qui se suicide avec femme et enfants.

En alliant une prodigieuse érudition qui entre dans les moindres détails comme celle du suicide d’Hitler et de la crémation de son cadavre, presque heure par heure, à un rythme narratif qui fait penser aux historiens anglo-saxons, entre vision panoramique et arrêts sur images, Volker Ullrich réussit le double pari de nous donner à comprendre ces quelques jours d’incertitudes marquant la jonction entre la fin d’une Allemagne et le début d’une autre en même que de composer une fresque sur laquelle de futurs écrivains trouveront matière à un récit tout aussi exceptionnel. Assurément l’un des meilleurs livres d’histoire de cette année 2023.

Par Laurent Pfaadt

Volker Ullrich, 8 jours en mai, L’effondrement du IIIe Reich, traduit de l’allemand par Denis-Armand Canal
Chez Passés composés, 352 p.

Le Prix Sheikh Zayed 2023 dévoile ses finalistes

Bien décidé à bâtir un soft power qui passe par la culture, les Emirats Arabes Unis ont déployé depuis plusieurs années de nombreux efforts dans ce domaine comme en témoignent le Louvre Abu Dhabi ou l’attention portée à l’architecture avec notamment les oeuvres de Zahia Hadid, d’Abdulmajid Karanouh et Aedas Arquitectos. En matière de promotion des lettres et de la culture arabe, le Sheikh Zayed Book Award organisé par le Centre de langue arabe d’Abu Dhabi sous les auspices du département de la culture et du tourisme d’Abu Dhabi est très vite devenu non seulement le prix le plus doté du Proche et Moyen Orient (près de 200 000 euros) mais également l’une des principales récompenses littéraires du monde en matière de littérature et de culture arabes. « Que représente le prix ? Précisément de sortir, comme le veulent les jeunes dirigeants des pays du Golfe aujourd’hui, d’une certaine image de la région, attachée au pétrole et à rien d’autre. L’Arabie et le Golfe veulent reconquérir la place qui leur revient assez naturellement dans la culture arabe » affirme ainsi l’historien Gabriel Martinez-Gros, nommé pour la deuxième année consécutive dans la catégorie culture arabe dans une autre langue.


Pour sa 17e édition, parmi les 3151 candidatures provenant de 60 pays dont la France, les membres du jury du Sheikh Zayed Book Award ont dévoilé leurs finalistes 2023 dans les six catégories du Prix :  Littérature, Jeune auteur, Édition et Technologie, Traduction, Culture Arabe dans une autre langue et Critique littéraire et artistique.

Dans la catégorie reine, celle de la littérature, trois écrivains se disputeront le prix. Le grand poète irakien, Ali Ja’far al-Allaq, figure de la littérature arabe et membre de l’union générale des écrivains arabes, auteur d’Ila Ayn Ayyathouha Al Kaseedah (« Whereto, O Poem? » Une Autobiographie, Alan Publishers and Distributors, 2022) affrontera deux femmes : l’égyptienne Reem Bassiouney qui rêvera de succéder à Iman Mersal, couronnée en 2021, et dont Al-Qata’i : Thoulatheyat Ibn Tulun (Al-Qata’i’ – La trilogie d’Ibn Tulun, Nadhet Misr, 2022), vaste fresque sur les Mamelouks se situant à la fin du 19e et au début du 20e a été récompensée par le prix Naguib Mahfouz, et la libanaise Alawiya Sobh avec Ifrah ya Qulbi (Réjouis-toi, ô mon cœur, Dar Al-Adab, 2022), que les lecteurs français ont découvert, il y a une quinzaine d’années chez Gallimard, avec Maryam ou le passé décomposé aura à cœur de défendre les couleurs du Liban, à l’heure du centenaire de la publication du Prophète de Khalil Gibran.

Dans la catégorie jeune auteur, trois auteurs sont en liste : l’irakienne Shahd Al-Rawi pour Fawka Jisr Al Joumhoureyah (Sur le Pont de la République, Dar Alhikma en 2020), l’égyptien Ahmed Lotfi avec Al Wahl wa Al Noujoom (La saleté et les étoiles, Aseer AlKotb, 2022) et l’algérien Said Khatibi et sa Nehayat Al Sahra’a (La fin du désert, Hachette Antoine / Nofal, 2022).

Les Français seront également bien représentés notamment dans les catégories culture arabe dans une autre langue, traduction et édition. Dans la catégorie culture arabe dans une autre langue, Gabriel Martinez-Gros, déjà nominé en 2021 pour L’Empire Islamique:  VIIe  –  XIe  siècle  (Passés composés, 2019) est à nouveau présent pour son ouvrage, toujours chez Passés composés, De l’autre côté des croisades (2021) que nous avions chroniqué. « Je ne peux que m’en satisfaire et contribuer à les aider dans ce mouvement d’innovation, qui tranche avec notre monde un peu frileux et conservateur » estime ainsi ce dernier. Il est cette année accompagné d’un autre compatriote, Mathieu Tillier, professeur d’histoire de l’Islam médiéval à la Sorbonne qui a publié en 2017, L’invention du cadi. La justice des musulmans, des juifs et des chrétiens aux premiers siècles de l’Islam (Editions de la Sorbonne).

La nouvelle présence de Sindbad, éditeur de plusieurs Sheikh Zayed Book Award notamment Iman Mersal en 2021 que nous avions interviewé, dans la catégorie édition récompense à la fois l’immense travail de « passeur » de la littérature arabe en France de Farouk Mardam-Bey mais également l’ouverture artistique des Emirats arabes unis pour les différentes esthétiques littéraires diffusées par Sindbad.

Enfin dans la catégorie Traduction, la sélection de la traduction de l’essai de l’écrivain et psychanalyste Michel Schneider, Voleurs De Mots : Essai Sur Le Plagiat, La Psychanalyse et La Pensée (Gallimard, coll. Tel, 2011) par l’un des meilleurs traducteurs tunisiens, Abdelaziz Chebil, vient compléter une 17e édition où la France sera bien représentée.

Son Altesse Sheikh Hazza bin Zayed bin Sultan Al Nahyan remettant le prix littérature à l’écrivain marocain Bensalem Himmich
crédits : Sheikh Zayed Book Award

Ces nominations révèlent en tout cas l’engagement du jury en faveur d’intellectuelles ayant placées la place de la femme dans les sociétés arabes au cœur de leurs œuvres. Ainsi tant Reem Bassiouney que Alawiya Sobh ont construit des portraits de femmes prisonnières des carcans sociaux de leurs pays. Quant à Jalila Tritar, nommée dans la catégorie critique littéraire et artistique pour Mara’i an-Nisaa’: Dirasat fi Kitabat al-That an-Nisaa’iya al-Aarabiya (Le point de vue des femmes: Études sur les écrits personnels des femmes arabes, La Maison Tunisienne Du Livre en 2021), elle a fait de la place de la femme dans la littérature, la matrice de son oeuvre. Une autre façon de dire que de ce côté-ci du monde, la culture a de beaux jours devant elle.

Par Laurent Pfaadt

Retrouvez les premiers nominés du Sheikh Zayed Book Award sur : https://www.zayedaward.ae/en/media.center/news.aspx

Plus aller plus loin, Hebdoscope vous propose de relire quelques-unes de ses chroniques consacrées à certains nominés et anciens prix :

Gabriel Martinez-Gros : http://www.hebdoscope.fr/wp/blog/de-lautre-cote-des-croisades/

Les éditions Sindbad (Actes Sud) : http://www.hebdoscope.fr/wp/blog/un-etendard-litteraire/

Iman Mersal : http://www.hebdoscope.fr/wp/blog/rencontre/

« Une aventure humaine, intellectuelle et entrepreneuriale »

Nicolas Gras-Payen est éditeur. Passé par les éditions Tallandier puis Perrin dont il devint en 2012, le directeur littéraire, il fonde en 2019, la maison d’édition Passés composés consacrée à l’histoire. Il est également directeur du « pôle Histoire » de Belin Editeur depuis 2018. Pour Hebdoscope, il revient sur cette aventure éditoriale.

Voilà quatre ans que Passés composés existe. Quel bilan en tirez-vous ?

Je crois que nous pouvons être satisfait du chemin parcouru, tant par la qualité des autrices et auteurs qui nous ont fait confiance que par le soutien des libraires et des médias. Notre proposition éditoriale a rencontré un bel écho et je crois que nous avons su fédérer autour d’une ambition intellectuelle cohérente appuyée sur une logique commerciale efficace.

La maison d’édition a-t-elle trouvé sa place parmi les lecteurs ?

Oui, incontestablement. C’est bien sûr visible par la réception de nos best-sellers, de Barbarossa à l’Infographie de la Rome Antique ou de la Révolution, en passant par les biographies de Louis XIV ou Gengis Khan. Mais, tout aussi important, les lectrices et lecteurs d’histoire nous ont aussi fait confiance pour des livres plus complexes commercialement parlant mais absolument nécessaire à la vitalité de l’histoire.

Vous avez fait le choix de sujets parfois pointus, spécialisés et confiés à des historiens inconnus, en publiant leur sujet de recherche. Passés composés s’est-elle également donnée pour mission de révéler de jeunes talents, les historiens de demain ?

En réalité c’est incontournable selon nous pour deux raisons finalement assez évidentes. D’une part ce sont les jeunes auteurs qui portent la modernité des sujets par les questions qu’ils posent. Ne pas être à leur écoute nous condamnerait à republier en permanence sur les mêmes sujets avec les mêmes approches. D’autre part, il existe de formidables talents parmi la nouvelle génération d’historiennes et d’historiens qui seront les auteurs connus de demain. Mais si personne ne leur fait confiance pour se lancer, comment émergeraient-ils ? Néanmoins nous tentons de garder un équilibre entre les générations, les historiens plus matures ont bien sûr un savoir-faire et une réflexion dont l’histoire ne peut se passer.

Dans le même temps, vous publiez des ouvrages un peu plus
« grand public » ou sur des sujets moins convenus comme les impôts ou la pilule…

Tout à fait, c’est la logique que je viens d’évoquer. Elle correspond d’ailleurs aux différents publics de l’histoire, certains lecteurs entrant dans un livre en ayant déjà de larges connaissances quand d’autres sont dans une démarche de découverte. Bien sûr, l’histoire étant un monde, il y a aura toujours des thèmes à découvrir d’où notre attention à l’originalité des sujets.

Si vous ne deviez garder qu’un seul souvenir de ces quatre années…

Un seul me paraît bien difficile, cette aventure étant humaine, intellectuelle et entrepreneuriale, nous avons connu bien des joies depuis 4 ans.

Par Laurent Pfaadt

Dernières nouvelles de Yougoslavie

Dans ce siècle de déchirements et de sang que fut le 20e, l’ex Yougoslavie produisit, dans le sillage d’Ivo Andric, quelques grandes voix littéraires


Lorsqu’on évoque les lettres yougoslaves, un nom vient immédiatement à l’esprit : Ivo Andric, le maître, auteur de l’inoubliable Pont sur la Drina, prix Nobel de littérature en 1961 dont paraît ces jours-ci La chronique de Belgrade. En partie inédites, ses huit nouvelles offrent un voyage incroyable dans une Belgrade entre le début du 20e siècle et la fin de la seconde guerre mondiale, entre scènes de guerre et récits cocasses. Tout le génie d’Andric est là : dans cette capacité incroyable à dépeindre une époque et un pays à travers des personnages différents, ces « petites gens » comme il les appelle. Il y a indiscutablement quelque chose des Gens de Dublin de Joyce dans ces nouvelles, en ce sens qu’elles dévoilent, de la longue nouvelle Zeko en passant par Steven Karajan ou les femmes qui jalonnent ces récits, la vision d’une société à travers des personnages aux caractères si différents. Une société qui avance vers la guerre et tente de conserver malgré tout une humanité face à la barbarie. Si La chronique de Belgrade est une ode à ses habitants, la ville, de la Save qui se jette dans le Danube à la place Terazije et ses pendus en passant par la maison de rue Toltojeva, est elle-même un personnage à part entière qui se transforme, se métamorphose, s’enlaidit ou au contraire, se pare de ses plus beaux atours. 

A sa mort en 1975, Andric laissa un certain nombre d’héritiers littéraires. Son nom devint un prix récompensant un auteur de langue serbe qui fut attribué à Danilo Kis en 1983, traçant ainsi une sorte de filiation entre non seulement ce dernier et Andric mais également avec James Joyce. Pourtant, Danilo Kis demeure aujourd’hui oublié. Dans Extrait de naissance, titre de la biographie que lui consacre Mark Thompson, journaliste britannique qui a couvert les guerres d’ex-Yougoslavie, l’auteur du Sablier reprend vie. Évoquant sa vie notamment en France où il arriva dès 1962, d’abord à Strasbourg puis à Paris ainsi que son œuvre, Mark Thompson a construit un objet littéraire unique, récompensé par le prix suisse Jan Michalski de littérature (2015) et échappant aux cadres de la biographie pour décrire un écrivain tout aussi unique qui « aimait dire qu’il s’était entraîné à être écrivain bien avant d’en devenir un » et pour qui Le pont sur la Drina était le livre absolu. 

Cette première vision littéraire de l’écrivain serbe offre également à travers la lecture de son œuvre une profonde réflexion sur les deux grands totalitarismes qui secouèrent le 20e siècle. Le nazisme notamment pour celui qui allait immortaliser la Shoah dans cet inoubliable roman qui, longtemps, fut inédit, Psaume 44, l’un de ses premiers écrits avec ce bébé de deux mois dont les pleurs, au moment de passer les barbelés avec sa mère et de gagner la liberté signent à la fois un cri d’espoir et une condamnation à mort.  Le 22 février dernier, Kis aurait célébré ses 88 ans. Avec le slovène Boris Pahor, longtemps doyen des écrivains et disparu l’an dernier et Claudio Magris, son cadet de quelques années, Kis fut certainement l’un des plus illustres représentants d’une Mitteleuropa désormais bien lointaine, admiré de nombreux écrivains parmi lesquels Milan Kundera ou Susan Sontag et dont le nom fut évoqué pour le Nobel. 

De la tragédie au rire, il n’y a qu’un pas que franchit allègrement l’écrivain croate Ante Tomic dans Qu’est-ce qu’un homme sans moustache ? comédie absolument savoureuse qui s’attarde sur la vie de Don Stipan, curé alcoolique repenti, personnage comme échappé des rues du Belgrade d’Andric ou de l’univers d’un Emil Kusturica. Après Kresimir Aspic dans Miracle à la combe aux aspics (éditions Noir sur Blanc, 2021), Ante Tomic s’attache une nouvelle fois à un personnage excentrique, ce curé pas comme les autres autour duquel gravitent d’autres personnages tout aussi loufoques, ces hommes et ces femmes de ces contrées balkaniques qu’il décrit avec une langue aussi délicieuse qu’un agneau rôti. Ici le rire constitue autant un ravissement littéraire qu’une arme pour conjurer les souvenirs toujours vivaces d’une autre guerre.

Les frontières du rire ne furent malheureusement pas, en ex-Yougoslavie, les seules à être franchies. Et les braises de ce nationalisme encore ardent qui vint à bout de ce pays crée en 1918, ne permettent toujours pas aux plaies de la guerre d’être cicatrisées. Il faut pour cela le baume de ces nouvelles voix de papier, comme celle de Faruk Serhic, jeune auteur bosniaque qui a décidé d’entrer avec son livre, Le livre de l’Una, prix de littérature européenne, dans ces mêmes variations funestes de la Bosnie que peignit en son temps Ivo Andric. Le héros de Serhic, un vétéran bosniaque de la guerre d’ex Yougoslavie qu’aurait pu rencontrer Mark Thompson dans ce livre absolument magnifique, choisit l’hypnose pour combattre les fantômes de la guerre et exorciser ses traumatismes. A la manière de l’Una, cette rivière qui s’écoule et au bord de laquelle il aimait, enfant, pêcher, notre héros remonte le courant de sa vie. L’Una de Serhic comme la Save d’Andric sont ces rivières d’ex-Yougoslavie qui charrient les corps, les souvenirs et les destins. Elles sont aussi ces chemins de mémoire faits de sédiments sanglants et de bulles de rire avec leurs cours paisibles et leurs furieuses cataractes.

« Une grande tendresse unit Ivo Andric aux hommes, mais il ne recule pas devant la description de l’horreur et de la violence, ni devant ce qui, à ses yeux, apporte surtout la preuve de la réalité du mal dans la vie. Il ouvre, en quelque sorte, la chronique du monde à une page inconnue et s’adresse à nous du plus profond de l’âme tourmentée des peuples slaves du sud » avait dit Anders Osterling en remettant le prix Nobel à Ivo Andric. C’est ce que l’on ressent assurément à la lecture du Livre de l’Una.

Par Laurent Pfaddt

Ivo Andric, La chronique de Belgrade, traduit du serbe par Alain Cappon,
éditions des Syrtes, 192 p.
Mark Thompson, Extrait de naissance, l’histoire de Danilo Kis, traduit de l’anglais (Royaume-Uni) par Pascale Delpech,

éditions Noir sur Blanc, 608 p.

Ante Tomić, Qu’est-ce qu’un homme sans moustache ? traduit du croate par Marko Despot, éditions Noir sur Blanc,
éditions Noir sur Blanc, 208 p.

Faruk Serhic, Le Livre de l’Una, traduit du bosnien par Olivier Lannuzel,
Agullo Editions, 256 p.

Adrénaline à Adelaïde

Dimanche 2 avril 2023 se tiendra une nouvelle édition du Grand Prix d’Australie, étape désormais incontournable et régulière du championnat du monde de Formule 1, au même titre que Monza, Spa Francorchamps ou Suzuka. Des millions de spectateurs et téléspectateurs verront s’affronter les Ferrari, McLaren ou Williams et sitôt la course achevée ou pour se préparer à ce nouveau choc de bolides, plongeront dans l’album Paddock de Philippe et Jean Graton, nouvelle aventure de Michel Vaillant ayant pour décor le Grand Prix d’Australie qui se tenait alors encore dans la ville d’Adelaïde.


Nous sommes donc le 13 novembre 1994. Le titre doit se jouer entre Damon Hill, Michael Schumacher et un certain…Michel Vaillant bien évidemment. Le décès d’Ayrton Senna quelques mois plutôt et dont Jean Graton rend hommage à la fin de son album, remplacé par Nigel Mansell qui reprend du service à 41 ans a rebattu les cartes y compris au sein de l’équipe Williams Renault. Mais cette dernière est secouée par un nouveau drame : le carburant destiné à ses F1 a été déversé tandis que des parieurs spéculent sur la participation de leur champion. Dans le même temps, la Benetton de Schumacher est victime d’un sabotage à la glue. Les regards se tournent alors vers l’écurie Vaillante Elf qui semble profiter de la situation. D’ailleurs, Tim, le jeune apprenti de Michel Vaillant est très vite accusé. Il n’en faut pas moins pour mettre la pression sur notre héros à quelques heures du départ tandis que Françoise, l’épouse de Michel, mène l’enquête et affronte tous les dangers et les serpents qui règnent dans le paddock. 

Comme à chaque fois, Jean Graton aidé de son fils Philippe qui s’est immergé dans l’écurie Williams pour écrire ce 58e album de la série paru en 1995, n’a pas son pareil pour mêler suspense criminel et tension sur la piste. Car bientôt arrive ce 35e tour qui allait rester dans toutes les mémoires, celui de l’accrochage entre la Williams de Damon Hill et la Benetton de Michael Schumacher et allait valoir à ce dernier son premier titre de champion du monde. 

Le lecteur côtoie ainsi pour son plus grand bonheur personnages de fiction et grands noms de la F1. Ensemble, ils construisent une magnifique aventure dans ce qui reste l’un des meilleurs albums de la série consacré à la F1 et que vous n’êtes pas près d’oublier.

Par Laurent Pfaadt

Philippe et Jean Graton, Paddock, Michel Vaillant, Graton,
48 p. 1995

Le succès des séries Netflix nous fait dire qu’il y a une vraie appétence du public pour le genre

« Le succès des séries Netflix nous fait dire qu’il y a une vraie appétence du public pour le genre »

Elsa Delachair est éditrice chez 10/18, responsable de cette nouvelle collection imaginée avec le magazine Society.

1. Comment est née l’idée de cette nouvelle collection ?

Les éditions 10/18 et Society travaillaient déjà ensemble sur un podcast, appelé « Histoires d’Amérique » consacré au catalogue de la maison : des émissions sur nos grands auteurs (Toni Morrison, Jim Harrison, Richard Price etc). Et quand, à l’été 2020, Society a rencontré un immense succès avec le double numéro sur Xavier Dupont de Ligonnès, nous avons commencé à réfléchir ensemble à cette collection. L’idée était de conserver les Etats-Unis comme territoire d’exploration, mais non plus à travers ses grands auteurs mais plutôt à travers ses faits divers.

2. Les grandes affaires criminelles en livre de poche sont une tradition éditoriale de longue date…

Oui, mais plutôt sous l’angle de la fiction j’imagine. Ou du moins de la reprise en poche de livres qui ont eu un succès en grand format d’abord. Là, la dimension originale du projet tient à l’association d’une maison d’édition à un journal, pour sortir des histoires inédites au prix et au format poche. 

3. Les succès de Mindhunter ou de Dahmer sur Netflix plus récemment vous ont-ils convaincu qu’il y avait un regain d’intérêt pour les tueurs en série ?

Notre collection n’est pas une collection consacrée aux serial killers, c’est une collection consacrée aux faits divers, ce qui recouvre beaucoup de type de criminalités. Les serial killers en sont bien sûr un des aspects. Mais sur les 2 premiers livres qui sortent, seul un des deux est consacré à un tueur en série. Le 2e est une histoire d’enlèvement d’enfants et de son traitement judiciaire dans une Amérique patriarcale. 

Sur les 4 livres qui paraîtront cette année, seul un est consacré à un tueur. Mais bien entendu, le succès des séries Netflix nous fait dire qu’il y a une vraie appétence du public pour le genre.

4. Votre collection se veut un voyage dans l’Amérique mais également dit quelque chose socialement de ce pays, de sa violence notamment

Cette collection a pour point de départ de cartographier les affaires criminelles d’un pays, immense, complexe et hétérogène. Nous choisissons un fait divers par état, et nous l’explorons grâce à la voix du journaliste qui retranscrits à la fois les faits criminels mais aussi l’ambiance, la géographie, l’histoire des lieux. Il est évident que les faits divers racontent bien plus que le simple crime dont ils sont l’objet : les faits divers sont de véritables reflets sociologiques, politiques, historiques. 

5. Vous avez choisi un format assez court, deux cents pages max qui rappellent un peu les romans dits de gare…

C’est une volonté de départ : des livres courts, pas chers, qui se lisent comme des polars. Ils sont construits comme des polars, se lisent rapidement, les chapitres sont calibrés pour être lus en une séquence de lecture minimum. Nous voulions faire une collection grand public et de qualité. Le travail des journalistes est profondément documenté (par des recherches bibliographiques, d’archives, et de terrain également) : c’est une véritable démarche, ils ont d’abord effectué une partie des recherches depuis la France puis sont partis plusieurs semaines enquêter sur les lieux des affaires. C’est donc une approche très sourcée du simple fait que les auteurs soient journalistes. Cela aussi, c’était l’un des points de départ du projet.

6. Pouvez-vous nous dire quels serial killers les lecteurs seront-ils être amenés à croiser dans les prochains numéros ?

Alors, comme décrit plus haut, ce ne seront pas des serial killers à proprement parler. L’Inconnu de Cleveland, qui paraîtra en juin, s’intéresse à un personnage très énigmatique qui s’est suicidé au début des années 2000 et dont l’identité très trouble et le fait qu’il ait cherché systématiquement à disparaître des radars a conduit les enquêteurs à s’interroger sur le profil de cet homme : que cherchait-il à cacher ? Son histoire, qui se passe en Ohio, nous conduira bien sûr sur les pas d’un tueur très célèbre.

Et la 4e affaire, qui paraîtra en octobre, s’intéressera à un avocat au-dessus de tout soupçon, accusé du double meurtre de sa femme et de son fils et au procès-fleuve qui vient de se dérouler en Caroline du Sud.

Laurent Pfaadt

Bananes amères

En utilisant le polar, Philippe Godoc sensibilise de la plus belle des manières l’opinion au scandale du Chlordécone

C’est un scandale de santé publique, presque une affaire d’Etat qui, pendant longtemps, a été ignoré. Le chlordécone est ainsi le nom de ce pesticide utilisé dans les Antilles notamment dans le traitement des bananeraies contre le charançon. Interdit aux Etats-Unis depuis 1976, il a fallu attendre 1993 pour qu’une mesure similaire soit prise en France. Ce décalage de dix-sept années fut surtout le fruit d’un intense lobbying qui a conduit à une pollution des sols et de la faune, entraînant chez l’homme une recrudescence de cancers. Révélée ces dernières années, l’affaire du chlordécone, commercialisé sous les noms Kepone et Curlone, a fait l’effet d’une bombe dont les explosions continuent de résonner surtout depuis l’ordonnance de non-lieu rendue le 2 janvier dernier. Une bombe qui, comme à chaque fois, donne naissance à des œuvres littéraires. 


La première d’entre elle est signée Philippe Godoc, responsable associatif dans la protection des milieux marins, et dont l’amour pour la Guadeloupe, son île d’adoption depuis quarante ans, l’a conduit à écrire ce manifeste en forme de polar.

Et il faut dire que celui-ci marche assez bien. On y entre très facilement en suivant Marc Montroy, journaliste pour un journal écologique qui enquête sur le Kepone. Car, de Richmond aux Etats-Unis à la métropole en passant bien évidemment par les Békés, les descendants des colons blancs des Antilles, nombreux sont ceux qui ont intérêt à ce que l’affaire ne s’ébruite pas, surtout ceux qui commanditent les meurtres qui suivent et se rapprochent de Montroy. Philippe Godoc tire ainsi plusieurs fils – les meurtres, l’enquête journalistique sur le Kepone et l’histoire personnelle du héros, tragique, qui se confond avec celle de la Guadeloupe – lui permettant de tenir en haleine assez efficacement son lecteur. 

Une petite dose américaine subitement tirée de la chaleur moite d’un sud façon John Grisham combinée à quelques scènes dignes d’un film d’action viennent ainsi donner du piment antillais à ce thriller écologique entre lanceurs d’alerte et tueurs à gages haïtiens où l’on ne s’ennuie jamais. Une belle découverte à la fois instructive et pleine de rythme.

Par Laurent Pfaadt

Philippe Godoc, Kepone
Viviane Hamy, 432 p.

American Predator

Depuis plusieurs années maintenant, la mode du true crime, ces affaires criminelles racontées comme des polars, séduit de plus en plus de lecteurs. En voici un qui devrait assurément ravir les amateurs du genre.


Ainsi, parallèlement à la nouvelle collection de 10/18 consacrée à certaines affaires criminelles américaines (voir l’interview de son éditrice), les amateurs de sensations fortes plongeront avec effroi dans American Predator de Maureen Callahan, Grand prix étranger de littérature policière 2022, qui raconte l’histoire d’un tueur en série qui commit onze meurtres sur l’ensemble du territoire américain, de l’Alaska à la Floride en passant par New York et le Vermont. Le 2 février 2012, une jeune serveuse, Samantha Koenig disparaît à Anchorage en Alaska. Les caméras de surveillance captent le tueur, Israël Keyes, un homme ordinaire, père de famille qui part en vacances avec cette dernière entre deux meurtres comme si de rien n’était et qui, à cet instant est déjà actif depuis près de quinze ans. Mais à cet instant, personne ne le sait et Israël Keyes, lui, se joue de la police en donnant une fausse preuve de vie de sa victime en lui cousant, ouvertes, les paupières…

En suivant plusieurs chemins narratifs, la journaliste Maureen Callahan s’introduit dans la tête du tueur pour l’analyser, chapitre après chapitre, strate après strate comme devant un microscope et nous révèle sa psychologie tout en la confrontant à celles des autres personnages du livre. Celui-ci se veut également une plongée fascinante dans les méandres du système policier américain qui profita à ce tueur machiavélique qui changea son modus operandi pour éviter d’être repéré et se joue des frontières des différents Etats du pays.

Maureen Callahan fait ainsi de cette affaire un thriller angoissant et impossible à lâcher avant la fin. Nuits blanches garanties

Par Laurent Pfaadt

Maureen Callahan, American Predator
10/18, 384 p.